Pourquoi avoir attendu si longtemps pour évoquer votre expérience spirituelle dans le désert, il y a 27 ans  ?

J’ai longtemps cru que c’était une expérience intime, personnelle, singulière qui ne concernait que moi. J’avais tort. Quand on a la chance de recevoir un peu de lumière, on doit la rendre, la diffuser.  J’ai mis du temps, car je n’étais pas prêt à vivre cette expérience. J’étais un athée, paisible mais solide dans son athéisme. Quand je suis entré dans le désert du Sahara, je ne cherchais rien, en tout cas pas Dieu.
Cette grâce est tombée sur quelqu’un qui n’était pas du tout prêt. Préparé sans doute, car j’avais fait de la philosophie et m’étais intéressé aux questions métaphysiques.
J’ai mis du temps à lui laisser sa place. Il y avait sans doute une partie de mon esprit rationnel et relativiste qui renâclait. Petit à petit, cette partie qui veut nier, qui s’aime et qui veut s’enivrer de sa force, a fini par céder devant l’évidence de la révélation. Cela a donc pris des années pour que je devienne le croyant que je suis.
Et puis, lorsque j’ai commencé à en parler, je n’en disais jamais assez. J’ai été lent. Mais ce qui a précipité le mouvement, c’est la violence du monde actuel. Ce monde qui retentit du vacarme d’abrutis qui tuent, massacrent et violent au nom de Dieu. Là, je me suis dit qu’il fallait que je parle de ma foi, qui grandit dans le silence intérieur et qui n’a rien à voir avec le vacarme ambiant.

Quelles réactions vous a valu votre ouvrage La Nuit de feu ? Certains ont-ils essayé de vous raisonner, en mettant votre expérience sur le compte des circonstances et du contexte particulier où elle s’est produite ?

Je l’avais fait avant eux. J’avais moi-même voulu réduire cette expérience à un phénomène physiologique ou psychologique. J’avais moi-même tenté maintes fois de refuser cette nuit comme elle s’était présentée, une nuit mystique, une rencontre avec Dieu. […]