La croix a dû apparaître aux contemporains de Jésus de Nazareth comme la ruine absolue. Aucun homme, ni juif, ni grec, n’aurait imaginé conférer un sens religieux à la croix qui est l’élément le plus spécifique du christianisme dans le concert des religions : Jésus est mort jeune, torturé, rejeté par les autorités civiles et religieuses, trahi et renié par ses disciples, abandonné des hommes et de son Dieu. Il est difficile d’interpréter ce fait qui dépasse notre compréhension. Au moment où Jésus est déposé dans le tombeau, personne n’aurait parié dix centimes sur l’avenir de la petite fraternité qu’il a initiée. Et pourtant… de cette ruine absolue est né le mouvement qui a le plus influencé l’histoire de l’humanité de ces deux derniers millénaires.

Ces mêmes disciples, où les trouvons-nous quelques semaines plus tard ? À Jérusalem en train d’annoncer l’Évangile à la foule venue dans la ville sainte pour le pèlerinage de Pentecôte[1] ; devant le Sanhédrin, le tribunal religieux qui a condamné Jésus, en train de confesser le nom de Jésus et d’annoncer qu’ils préfèrent obéir à Dieu plutôt qu’aux injonctions de ce tribunal[2] ; en route dans tout l’Empire romain pour annoncer l’Évangile jusqu’aux extrémités de la terre, et cela malgré l’opposition des pouvoirs religieux et policiers. Lorsque la question est posée à ces disciples : « pourquoi faites-vous cela ? », tous ont la même réponse : « Celui qui était mort, nous l’avons revu vivant ; celui que vous avez crucifié, Dieu l’a ressuscité[3]. » Pour les disciples, l’expérience de la résurrection a été une puissance de vie qui les a relevés.

En relisant ces faits, l’historien Henri Guillemin en arrive à la conclusion suivante : « Le constat de l’Histoire ne peut pas être : le Nazaréen ressuscita, car nul ne sait au juste ce qui s’est passé. Mais l’Histoire se doit d’enregistrer comme un fait établi, indéniable… que les disciples de Jésus ont cru, comme on croit à une vérité d’évidence, avoir revu vivant celui qui venait d’expirer. »

Le souffle et la respiration

Le mot que l’on traduit par Esprit veut aussi dire le vent, le souffle, la respiration. S’il n’y avait pas de vents, le monde serait une fournaise. Sans souffle, la flûte n’émet aucun son ; et sans respiration, il n’y a pas de vie. Comme le disait un patriarche orthodoxe : « Sans l’Esprit saint, le Christ reste dans le passé, l’Évangile une simple lettre morte, l’Église une organisation, l’autorité une domination, la mission une propagande, la prière personnelle un monologue stérile et l’agir chrétien une morale d’esclave. »

[1] Ac 2.14-36

[2] Ac 4.20

[3] Ac 4.10