Le récit de l’Ascension est raconté deux fois dans les Écritures, à la fin de l’évangile de Luc et au commencement des Actes des Apôtres. Le fait est d’autant plus troublant qu’à l’origine ces deux livres n’en faisaient qu’un. Pourquoi Luc a-t-il raconté deux fois le même épisode de deux façons différentes ?

Dans le troisième évangile, l’Ascension a lieu le soir de la résurrection. Après s’être révélé aux pèlerins d’Emmaüs et aux apôtres, Jésus se sépara d’eux. La plupart des manuscrits ajoutent et il fut enlevé au ciel[1].

Dans le livre des Actes, après la résurrection, Jésus est apparu pendant quarante jours à ses apôtres pour leur parler du royaume de Dieu, puis il fut élevé… et une nuée le déroba à leurs yeux[2]. Le récit est suivi de celui de la Pentecôte.

La présence de deux récits différents dans le même ensemble littéraire nous oblige à ne pas rester attachés à la littéralité du récit pour nous mettre à l’écoute de ce qu’il signifie. Ça tombe bien parce que si on essaye de se représenter la scène, on est un peu gêné. On veut bien croire aux miracles de l’évangile, mais l’ascension de Jésus se heurte à des questions absurdes du style : À quelle vitesse est-il allé ? Où s’est-il arrêté ? Le récit le plus connu, celui des Actes, ne dit pas que Jésus s’est envolé, mais qu’il fut élevé et qu’une nuée le déroba à leurs yeux. L’expression être élevé signifie que Jésus s’est retrouvé totalement en Dieu et la nuée est une image pour évoquer la présence divine. Jésus n’a pas décollé comme une fusée, il s’est dérobé du regard de ses disciples dans la présence de Dieu.

Si l’Ascension est racontée deux fois, c’est que les deux récits sont vrais. Elle se situe à une charnière en étant l’accomplissement de la résurrection et le commencement de l’histoire de l’Église. Où est le Christ ? Au ciel, c’est-à-dire en Dieu. Il n’est plus physiquement au milieu de ses disciples pour leur montrer le chemin, il est par son esprit à leurs côtés dans leur marche à la suite de l’Évangile.

Jésus est au ciel

Depuis que Jésus est au ciel, il n’est plus sur terre et ne se laisse enfermer dans aucun des lieux dans lesquels on veut l’enclore. Il n’est enfermé ni dans l’Église comme institution, ni dans le pain et le vin, ni dans notre expérience spirituelle, ni dans les systèmes théologiques, fussent-ils les plus justes et les plus intelligents.

L’Ascension est la fête de la liberté de Dieu qui échappe à notre mainmise. Les disciples ne sont pas les possesseurs du Christ, ils en sont les témoins.

[1] Lc 24.51.

[2] Ac 1.9.