Les Huit Montagnes des réalisateurs belges Felix van Groeningen et Charlotte Vandermeersch est une adaptation brillante et touchante du roman éponyme de l’auteur italien Paolo Cognetti, ayant reçu notamment en France le prix Médicis étranger en 2017.

Les Huit Montagnes, c’est l’histoire d’une amitié. Celle de deux enfants, Pietro et Bruno, devenant des hommes, qui tentent de ne pas marcher dans les pas de leurs pères, mais qui, à travers les chemins qu’ils prennent, finissent toujours par revenir chez eux.

Un film d’une grande richesse multiple, beau, poétique, émouvant… pour parler de l’amitié entre deux hommes qui ont de profondes difficultés pour parler de leurs sentiments. Deux histoires à la fois parallèles et tissées entre elles, passant par des victoires et des défaites au grand jeu de la vie. Deux histoires d’hommes marqués par deux pères qui laissent des traces indélébiles dans leurs vies différemment. Des pères dont on voudrait là se démarquer mais qui à la fois influencent, se perdent et se retrouvent. C’est aussi un récit sur les choix existentiels, la quête d’un sens, au cœur principalement de l’époustouflante vallée alpine italienne d’Aoste, merveilleusement photographiée.

Mais les « huit montagnes » du titre font référence en réalité aux huit plus hauts sommets du Népal (où se joue aussi une partie du scénario), symbole mystérieux de l’ambition et de la conquête du monde, auxquels s’ajoute un autre sommet, plus central, mais unique. Quels sommets appréhender ? Choisir de rester ancrer sur celui de l’acquis, du terrain connu et aimé, ou oser affronter les multiples sommets qui ouvrent sur d’autres panoramas et d’autres possibles ?

Personnellement, je n’ai pu m’empêcher de penser au verset premier du livre de Michée chapitre 4, dans la Bible qui dit : « Un jour viendra où la montagne de la maison du Seigneur sera fermement établie au sommet des montagnes, et elle se dressera au-dessus des collines ».

Un film qui résonne aussi comme une méditation extrêmement intelligente sur notre capacité à aimer, et la façon dont elle est façonnée par les expériences arbitraires et irréversibles de l’enfance, mais aussi par notre relation à notre environnement. Dans ce chemin qui se trace, se manifeste également la notion de construction ou de reconstruction, pour être plus exact. En construisant une rudimentaire maison, les deux hommes vont tenter de réécrire leurs histoires, reconstruire leur enfance, reconstruire leur amitié l’un pour l’autre. Mais est-ce suffisant ?

C’est un film qui transpire l’amour en prenant son temps, comme une randonnée en altitude, et qui fait profondément du bien, même si la tristesse l’emporte quelque part… Les Huit Montagnes nous emportent et nous récompensent avec un sentiment d’exaltation qui pourrait séduire un Jury sensible aux relations humaines et à la beauté de la Création.