Combien d’associations protestantes ont inscrit la francophonie dans leurs statuts ? Sans doute aujourd’hui plusieurs dizaines, si ce n’est largement au-delà de la centaine si l’on inclut toutes les associations cultuelles qui se réfèrent à la dimension francophone. En resserrant la focale sur les plus grandes associations françaises « loi 1901 », le montant est bien plus réduit. Nul n’est plus qualifié que le missiologue Jean-François Zorn pour nous guider dans la découverte de ces réseaux. Dans une contribution pionnière publiée dans l’ouvrage collectif La nouvelle France protestante (Labor et Fides, 2011), il distingue quatre principaux pôles associatifs protestants de langue française fondés depuis la métropole.

« Pour le maintien et le développement du culte protestant dans les colonies »

La première association protestante française qu’il relève a été constituée le 4 juillet 1903, sous la IIIe République, au temps des colonies. Son titre est alors « Association pour le Maintien et le Développement du Culte Protestant dans les Colonies Françaises et Pays de Protectorat Français ». Le nom n’est pas resté jusqu’à aujourd’hui, et l’on comprend pourquoi ! Les aléas politiques et les puissantes vagues de décolonisation sont passées par là.

Au fil du XXe siècle, cette association a changé de titre à quatre reprises, au gré des mutations progressives de l’Empire colonial français, pour en arriver à prendre le nom de Commission des Églises Évangéliques d’Expression Française à l’Extérieur: la CEEEFE. Jean-François Zorn fait observer qu’une « ultime réforme de ses statuts en août 2009, l’a transformée en une Communauté d’Églises Protestantes Francophones dans le monde, membre associé de la Fédération Protestante de France »(1). Elle est constituée d’Églises qui revendiquent l’identité protestante (sur un axe luthéro-réformé) et qui utilisent la langue française hors du territoire métropolitain. Cette Communauté, dotée d’un site internet http://eglises-protestantes-francophones.org/, a pour objet de fédérer les Églises qui en sont membres afin de renforcer la communion spirituelle et les liens d’amitié et d’entraide entre elles, d’une part, et avec les Églises ou organismes membres de la Fédération Protestante de France, d’autre part (art. 3 des statuts).

35 Églises locales francophones dans 16 pays

Elle regroupe actuellement 35 Églises locales, présentes dans 16 pays, mais aussi – pour des raisons historiques et parfois de droit local des cultes – les Églises luthéro-réformées des DOM. Elle tient habituellement son Assemblée générale chaque année le dernier week-end d’août en France chez les diaconesses de Reuilly (à Versailles).

Quatre types d’Églises se retrouvent dans ce réseau francophone protestant :

  1. La plupart des anciennes Églises du Refuge huguenot, héritières du « premier âge de la francophonie protestante », comme celle de Berlin, Londres, Canterbury, mais aussi Stockholm, Luxembourg, Copenhague, ainsi que les Églises wallonnes des Pays-Bas ;
  2. Des Églises du Maghreb (Algérie, Maroc, Tunisie), du Liban, de Djibouti ;
  3. Des Églises des départements d’outre-mer (DOM), Antilles, Guyane, Réunion ;
  4. Des Églises protestantes nées de l’immigration ancienne ou plus récente composées de protestants de langue française vivant à l’étranger, comme aux États-Unis, dans les pays arabes (Égypte) et en Israël.

Cette classification proposée par Jean-François Zorn n’est pas étanche. Certaines Églises peuvent appartenir à plusieurs types. Dans son rapport de 2009, le pasteur Yves Gounelle, alors président, soulignait « l’attractivité de la CEEEFE » puisque les Églises francophones de Rome, de Moscou et des Émirats Arabes-Unis ont posé leur candidature, depuis acceptée. Présidée actuellement par le pasteur Bernard Anterion, la CEEEFE se fixe aujourd’hui quatre priorités, présentés dans son bulletin consultable en ligne(2) :

  1. Être un réseau communautaire, de soutien, d’accompagnement, un regard extérieur offert aux Églises et aux pasteurs ;
  2. Être une présence (protestante) d’expression francophone de la foi en Christ dans le monde ;
  3. Valoriser le savoir-faire et l’expertise des Eglises membres en matière de diversité et de vivre-ensemble et l’offrir aux Églises francophones ;
  4. Donner légitimité et crédibilité aux Églises membres dans les pays où elles sont implantées.
(1) Jean-François Zorn, « Les protestants français et la francophonie », in Sébastien Fath et Jean-Paul Willaime (dir.), La nouvelle France protestante, Genève, Labor et Fides, 2011, p.281.