
Refuser les priorités dans l’indignation
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Publié le 28 janvier 2015
Auteur : Philippe Kabongo-Mbaya
Au moment où la France était rassemblée comme jamais par le passé à la suite des odieux attentats du 7 au 9 janvier, les massacres terroristes sur le continent africain ne faiblissaient point. Comme s’il s’agissait d’une chronologie concertée, Boko Haram avait poussé la barbarie encore un peu plus loin avec un carnage de plus de 2 000 personnes civiles dans le nord du Nigeria. Une horreur absolue. En ces mêmes jours, la somme des victimes atteint trois chiffres comme à Beni dans l’est de la république démocratique du Congo. Là-bas, un génocide de basse intensité poursuit en douce le dépeuplement du pays. Plus de six millions de morts depuis 1997 !
La manifestation mondiale de l’indignation, après les massacres de Paris, a poussé certains à crier au scandale devant cette géographie sélective de la compassion. Non pas pour relativiser le choc et le sentiment de l’innommable éprouvé par les Français, mais en interrogeant le sens ou la légitimité de l’affliction des Africains, se disant des « Charlie », alors que leurs sociétés connaissent nuit et jour la terrible réalité de la mort en vrac. Une terreur délibérément maintenue pour chasser les populations des certaines terres convoitées pour d’autres intérêts.
Paul Biya, président de la république du Cameroun, taciturne notoire, réputé pour son détachement vis-à-vis des agitations politiques dans son pays comme ailleurs en Afrique, cet homme avare en commentaires publics, est entré dans la danse de la rivalité victimaire. « Mes collègues africains rendent des hommages aux morts français mais les morts de chez nous ils s’en foutent. Vous faites honte à l’Afrique. »
Charlie et l’Afrique
Voilà ce qu’il avait tweeté au moment où six chefs d’État africains étaient à Paris, le dimanche 11 janvier lors de la marche pour « Charlie ». Rivalité victimaire ? Allons-y jusqu’au bout. Je n’ai jamais lu une expression d’indignation de Paul Biya au sujet de ce qui se passe dans l’est du Congo-Kinshasa, mais lorsque la terreur gagne l’extrême nord du Cameroun… […]
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