Dans une tribune publiée dans Le Monde le 4 mai 2018, les acteurs de l’action sociale et médico-sociale, parmi lesquels la Fondation de l’Armée du Salut et les fédérations nationales FAS et Uniopss, tirent le bilan d’une année d’action gouvernementale marquée par le manque de concertation et de prise en compte des publics et des acteurs concernés. Un appel à écouter la société, dont aucun changement ne peut se réaliser s’il est décrété par le haut.

Le secteur associatif a le sentiment de ne plus être reconnu comme un interlocuteur naturel du gouvernement dans l’élaboration des politiques publiques. Les phases de concertation sont réduites à leur plus simple expression, lorsqu’elles ne sont pas simplement supprimées. Elles portent au mieux sur la mise en œuvre des décisions, mais très rarement sur leur préparation et leurs impacts. La diminution des aides personnalisées au logement (APL), la réduction drastique du nombre d’emplois aidés, l’intensification du contrôle des migrants, la réduction des crédits, le projet de loi logement… la liste est longue des sujets sur lesquels les associations n’ont pas été écoutées par les pouvoirs publics avant que soient prises des décisions majeures.

C’est un signal négatif pour les associations, dont l’avis ne semble pas intéresser les pouvoirs publics. C’est aussi une perte d’efficacité car le gouvernement se prive de l’expertise de ceux qui sont au plus près des populations concernées. Les associations n’ont pas le monopole de la vérité, mais elles ont leur part de vérité. Changer la société ne se décrète pas d’en haut, sans le public concerné et sans les corps intermédiaires.

Dans le secteur de la lutte contre l’exclusion, un exemple illustre notre propos : la circulaire du 12 décembre 2017, qui impose la visite des services de l’Office français de l’immigration et de l’intégration et des préfectures dans les centres d’hébergement pour vérifier le statut juridique des migrants. Ce texte remet en cause plusieurs droits essentiels et se révèle d’une application pour le moins chaotique. Les associations ont déposé un référé devant le conseil d’Etat. Celui-ci a rejeté la demande d’annulation de la circulaire mais en a fait une interprétation qui donne raison aux associations sur plusieurs points décisifs. Le Défenseur des droits a demandé la suspension du texte. N’aurait-il pas été plus productif d’échanger avant sa rédaction avec les associations qui gèrent les centres d’hébergement ? Des solutions plus acceptables et plus respectueuses auraient sans doute été trouvées. […]