Henry Masson, président de la Cimade depuis quatre ans, évoque les défis actuels de la société française, notamment sur l’accueil des migrants, soulignant une fracture profonde plutôt qu’une fraternité. Il cite une réflexion de Charles Peguy qui rappelle que « la fraternité est un devoir d’urgence ». Cette idée, selon lui, reste pertinente face à une société fragmentée où la fraternité, inscrite tardivement dans la devise nationale, demeure un idéal difficile à atteindre. Henry Masson estime que la fraternité n’est pas un principe naturel, mais un objectif auquel la société doit constamment tendre.

Dans ce contexte, la Cimade, association fondée en 1939, incarne cette fraternité à travers l’accueil des étrangers, notamment ceux qui traversent la Méditerranée ou arrivent sans papiers. L’association s’est fait un devoir de défendre la dignité des migrants, notamment par le biais de permanences où des milliers de bénévoles apportent leur aide aux étrangers pour obtenir, notamment, un titre de séjour ou le statut de réfugié. En 2018, la fraternité a été consacrée comme principe constitutionnel en France, un combat auquel la Cimade a contribué, notamment en soutenant l’idée que ceux qui viennent en aide aux sans-papiers ne doivent pas être condamnés.

Henry Masson met en lumière la difficulté d’accueillir ceux qui ont tout perdu, ayant fui la guerre ou des régimes oppressifs, comme l’exil des réfugiés chiliens après la chute de Salvador Allende. Il aborde aussi le débat politique sur l’immigration, déplorant une tendance à associer tous les problèmes sociaux à l’immigration, une analyse qu’il juge erronée. Selon lui, les problèmes économiques et sociaux doivent être traités sans stigmatiser une partie de la population. Il critique la multiplication des lois sur l’immigration, sans vérifier l’application des précédentes, et rappelle que l’immigration est un phénomène mondial qu’aucun mur ou politique restrictive ne peut endiguer.

Pour Henry Masson, l’important est de créer des ponts entre les jeunes français et étrangers, pour construire une société fraternelle où les différences culturelles n’empêchent pas la solidarité.

Production : Fondation Bersier -Regards protestants
Remerciements : Henry Masson
Entretien mené par : Jean-Luc Mouton
Technique : Quentin Sondag