L’Église est faite de poussière, comme un vieux vase d’argile, mais l’apôtre Paul nous le dit : c’est un vase qui contient un trésor. Ce trésor qui change tout est la proclamation que tout homme, au-delà de ces rides et de ses lourdeurs, de ses fautes et de ses erreurs, de ses errances et de ses peurs… est beau et lumineux devant Dieu.

Quel est l’élément commun entre une mission isolée dans la brousse africaine, une grande communauté florissante de plusieurs milliers de membres dans le Middle West américain, un bout de pain partagé dans une prison chinoise, une réunion de prière dans un bidonville brésilien, un culte qui rassemble une poignée de fidèles dans une campagne reculée, un partage d’évangile dans un campus universitaire et la prière d’un aumônier dans la chambre d’un mourant ? Rien si ce n’est… la présence de l’évangile. S’il y a annonce de l’évangile, il y a déjà un bout d’Église selon la définition des Réformateurs qui dit qu’il y a Église là où l’Évangile est fidèlement prêché et où les sacrements sont droitement administrés.

Nous pouvons tirer trois conséquences de cette compréhension.

  • Evénement ou institution ?  L’Église est un événement avant d’être une institution. La description de la première communauté chrétienne se trouve dans les Actes des Apôtres dans le verset qui dit à propos des premiers chrétiens : Ils persévéraient dans l’enseignement des Apôtres, dans la communion fraternelle, dans la fraction du pain et dans les prière. Selon ce verset, il y a Église là où la Parole est annoncée, où les sacrements sont célébrés, où l’on partage et où l’on prie. Et peu importe les locaux, les noms de dénomination, les circonstances ou les moments de la semaine.

 

  • Le centre ou les frontières ? L’Église se définit plus par son centre que par ses frontières et ce centre n’est ni un homme, ni une institution, ni une doctrine, mais une parole. Si l’Église était un espace, son centre serait en Jésus-Christ, mais il n’aurait pas de portes, car nul ne peut définir ses limites. Un espace non borné est inconfortable et dans l’histoire les hommes ont voulu marquer la frontière entre le dedans et le dehors, la vérité et l’hérésie, les sauvés et les perdus. Face à cette tentation, nous devons nous souvenir que le fait de savoir qui est dans l’Église, ou n’y est pas, ne nous appartient pas.

 

  • Une Église imparfaite. Dans L’attente de Dieu, Simone Weil disait : L’Église ne s’adresse pas aux parfaits, les parfaits n’ont qu’à partir chez les stoïciens. Ce qui qualifie l’Église n’est pas la qualité des membres qui la composent, mais la conscience qu’ils ont d’être au bénéfice d’une parole qui leur est extérieure, d’être des hommes et des femmes pêcheurs et pardonnés. Heureusement que l’Église n’est pas parfaite, sinon personne n’oserait pas y entrer. C’est à cause de ses infirmités que nous pouvons l’aimer comme on aime un enfant malade.

Un vase et un trésor

Extérieurement, l’Église apparaît souvent comme une communauté d’hommes et de femmes quelconques. Elle a des lourdeurs et connaît des tensions, elle est souvent maladroite pour dire ce qu’elle croit, elle est une institution qui n’est pas toujours organisée de manière exemplaire. Elle est faite de poussière, comme un vieux vase d’argile. Mais l’apôtre Paul nous le dit : c’est un vase qui contient un trésor. Et c’est ce trésor qui change tout. C’est une parole, une annonciation, une espérance. La proclamation que tout homme, au-delà de ces rides et de ses lourdeurs, de ses fautes et de ses erreurs, de ses errances et de ses peurs… est beau et lumineux devant Dieu. Ce qui fait que l’Église tient debout, c’est l’assurance que Dieu ne voit aucun de ses enfants autrement que comme un fils, une fille de la résurrection.

Comme le disait Gustave Thibon : « L’Église est impure, limitée, rarement à la hauteur de la Parole qu’elle prétend transmettre. Et pourtant, je lui dois d’être aujourd’hui chrétien. Alors je m’incline. Au Moyen Âge, on appelait l’Église la « chaste putain », femme de mauvaise vie qui porte en elle un fragment central de sainteté et qui, en se prostituant, arrive à faire vivre ses enfants. »

Une prière

Pour terminer une prière écrite par André Dumas

Quand je pense à l’Église, je la voudrais telle qu’elle n’est pas : attirante, engageante, percutante, militante, sans doute aussi variée et universelle, secrète et évidente, riche et nourricière, pauvre et véridique, surprenante et solide. Bref, j’aimerais, mon Dieu, que ton Église, qui est notre Église, m’offre tout ce que je ne lui donne pas.

Alors, mon Dieu, fais que je cesse de blâmer l’Église, pour me dispenser moi-même d’y travailler. Fais que je cesse de lorgner ses déficiences, par le trou de la serrure, pour me protéger moi-même de franchir sa porte. Fais que je quitte le banc des spectateurs et des moqueurs pour m’asseoir au banc des acteurs et des célébrants. Car ainsi seulement je m’arrêterai de regarder ton Église, qui est notre Église pour y vivre avec les autres.

Production : Fondation Bersier
Texte : Antoine Nouis
Présentation : Gérard Rouzier

Cette vidéo est une rediffusion du 3 janvier 2018.