08.08.2021 : Jean 6.41-51 – Le pain de vie

Le pain qui donne la vie

Introduction

Après avoir interpellé la foule sur le sens du miracle, Jésus envoie un coup de poing à la figure en disant qu’il est le pain de vie qui doit être mangé. Au pied de la lettre, ce passage nous invite à être anthropophage, ce qui correspond à la transgression d’un interdit universel.

Il va falloir interpréter, mais avant, on doit retenir que Jésus fait ici de la théologie à coup de poings pour bousculer les certitudes spirituelles de ses interlocuteurs.

Points d’exégèse

Attention sur deux points.

Titre : Les hommes maugréent.

Les hommes maugréaient à son sujet. Le verbe maugréer (gogguzo) est une onomatopée qui évoque le roucoulement des colombes. Dans les évangiles, en dehors de ce récit, il est toujours employé pour évoquer la protestation des religieux face à la grâce : Quand Jésus partage la table des pécheurs, quand il est accueilli chez Zachée ou quand le maître de la parabole est généreux avec l’ouvrier de la onzième heure (Lc 15.2, Mt 20.11, Lc 19.7). Dans ce récit, les religieux maugréent parce que Jésus se présente comme un pain qui donne la vie à quiconque qui met sa foi en lui, ce qui vient bouleverser leur propre compréhension de la religion.

Titre : Jésus, fils de Joseph, dont on connaît le père et la mère.

Les religieux ont la même réaction que les habitants de Nazareth, ils essayent de contourner l’interpellation du Christ en l’interrogeant sur ses origines : « Qui est-il pour nous parler ainsi ? » Quand la parole bouscule, une façon d’esquisser l’interpellation de contester sa légitimité alors que la démarche de foi nous invite à écouter ce qu’il y a de juste en elle.

Pistes d’actualisation

1er thème : La référence à l’eucharistie

Jésus se présente comme le pain vivant descendu du ciel. Le prologue du quatrième évangile disait que la Parole qui était au commencement de toute chose a été faite chair, et maintenant, la chair est devenue pain pour la nourriture du monde. Non seulement Dieu est descendu de son ciel, mais il se donne à nous à travers le symbole du pain.

Cette lecture enrichit notre compréhension de l’eucharistie qui devient une marque de l’incarnation, le signe d’un Dieu qui est allé jusqu’au bout de l’offrande de sa personne pour que nous ayons la vie.

2e thème : Il est écrit dans les prophètes : Tous seront instruits de Dieu

L’objet de la foi est la connaissance de Dieu, c’est cette assurance que notre vie est en Dieu. Parmi les passages des prophètes, j’aime le verset qui dit à propos des temps messianiques : « La connaissance du Seigneur remplira la terre comme les eaux recouvrent la mer. » (Es 11.9)

Chez Ézéchiel : « Je vous donnerai un cœur nouveau et je mettrai en vous un souffle nouveau ; j’ôterai de votre chair le cœur de pierre et je vous donnerai un cœur de chair. Je mettrai mon souffle en vous et je ferai en sorte que vous suiviez mes prescriptions, que vous observiez mes règles et les mettiez en pratique. » (Ez 36.26-27)

Le royaume est présent lorsque la connaissance de Dieu couvre les montagnes et les vallées de mon histoire. Grâce à cette connaissance, je sais qui je suis et pourquoi je vis.

3e thème : La vie éternelle

Le pain est lié ici à la vie éternelle. Un verset du quatrième évangile dit : « La vie éternelle, c’est qu’ils te connaissent, toi, le seul vrai Dieu, et celui que tu as envoyé, Jésus-Christ. » (Jn 17.3)

Dans le quatrième évangile, la vie éternelle n’est pas une notion de temps mais de relation. La vie éternelle, ce n’est pas une vie perpétuelle, mais une vie inscrite dans l’éternité de Dieu, une vie qui déborde des limites de notre humanité. La vie éternelle c’est s’inscrire dans cette assurance que notre vie est précédée par le désir de Dieu et qu’elle s’achèvera dans son amour.

Une illustration : Celui qui mange de ce pain vivra toujours

Jésus veut-il dire que celui qui mange de son pain devient immortel ? Bien sûr que non, nous savons bien que la foi ne nous fait pas sortir des contraintes de notre humanité. Jésus n’est pas devenu pain de vie pour que nos sortions des limites de notre vie.

Donc, nous mourrons, mais la promesse de ce verset est que la vie en Christ nous permet d’espérer une vie en Christ au-delà de notre mort. Dans ses propos de table, Luther a dit alors qu’il était malade : « Debout ou couché, je m’en remets à la volonté de Dieu. Je m’abandonne totalement à lui, il fera bien ce qu’il fera. Car je suis sûr d’une chose, c’est que je ne mourrai point, car il est la Vie et la Résurrection, et celui qui vit et croit en lui ne mourra pas. Aussi je m’en remets à sa volonté et je le laisse faire ! »

Pour aller plus loin :
Le théologien Antoine Nouis propose un autre éclairage du texte biblique de Jean 6, 41-51 : https://campusprotestant.com/video/le-pain-du-ciel/

Production : Fondation Bersier
Intervenant : Antoine Nouis