L’évangile du dimanche du 24 août (Luc 13.22-30)
Les pleurs et les grincements de dents
Introduction
Le texte de ce dimanche est dur car il parle de porte fermée, de pleurs et de grincements de dents, de certains qui seront les derniers. Comment le concilier avec les passages qui parlent d’un Dieu d’amour et d’un accueil inconditionnel ?
Avant d’entrer dans l’interprétation, une remarque sur le contexte. Le premier verset nous que Jésus est en marche. Il n’a pas réuni ses disciples pour leur dire : « voilà la vérité éternelle sur ceux qui sont sauvés et les perdus », il a répondu à une question qui lui était posée. On peut penser que le but de sa réponse était de bousculer la tranquille assurance de son interlocuteur.
Points d’exégèse
Attention sur deux points.
Titre : Les autres et moi
L’interlocuteur de Jésus lui demande s’il y aura peu de sauvés. S’il interroge sur les autres, c’est qu’il pense que pour lui l’affaire est réglée, il fait partie des élus. Jésus le renvoie à sa responsabilité. C’est comme s’il lui disait : Ne t’occupe pas du salut des autres, mais de toi, es-tu passé par la porte étroite ?
L’évangile ne concerne pas les autres mais soi en premier. Luther disait souvent qu’on était seul à croire comme on est seul à mourir. La foi est d’abord une question de responsabilité individuelle.
Titre : Efforcez-vous d’entrer par la porte étroite
Le verbe s’efforcer évoque le combat. On peut traduire luttez pour entrer. Le salut n’est pas une confiance passive. Si l’évangile parle tant de changement, c’est que la vie chrétienne n’est pas naturelle, c’est un combat pour que mes attitudes, mes paroles, mes pensées et mes actions soient habitées par la foi et l’espérance.
Pistes d’actualisation
1er thème : Passer par la porte étroite
Dans l’évangile de Jean, Jésus a déclaré : C’est moi qui suis la porte (Jn 10.7). Si nous rapprochons les deux passages, lorsque Jésus demande à son interlocuteur s’il est passé par la porte étroite, il lui demande s’il est passé par lui.
Si nous considérons que c’est Jésus la porte étroite, alors ça change tout dans notre lecture de ce texte. Passer par la porte, c’est accepter de déposer nos idées et nos compréhensions, pour entrer dans la dynamique de l’Évangile. Il y a une sorte d’acte premier, c’est d’accepter ou de refuser de se laisser changer par l’Évangile. Tout le reste dépend de cette décision première.
2e thème : Un jour la porte se fermera
Un autre passage dur de ce récit est le verset qui dit que lorsque la porte sera fermée et qu’on frappera, le maître répondra : Vous, je ne sais pas d’où vous êtes. Cette parole nous gratte, mais elle nous rappelle un point : parfois il est trop tard.
Un sage disait qu’on pouvait tirer une leçon de tous les événements de la vie. Un disciple lui a demandé quelle leçon on pouvait tirer d’un voyage en train. Le sage a répondu qu’on pouvait rater un voyage parce qu’on avait une minute de retard.
Parfois une parole d’accusation, ou une parole qu’on n’a pas dite à quelqu’un qui nous a quittés ne peuvent se rattraper. Alors il ne reste que le pardon de Dieu.
3e thème : Il en viendra de partout
Au début de passage, la question posée à Jésus était : N’y aura-t-il que peu de sauvés ? À la fin du passage Jésus déclare qu’on viendra de l’est et de l’ouest, du nord et du sud pour s’installer à table dans le royaume de Dieu. Il y aura beaucoup de sauvés, mais pas obligatoirement celui qui lui pose la question.
Kierkegaard a écrit : « Dire aux autres. « Vous êtes perdus pour l’éternité », voilà qui m’est impossible. Pour moi, une chose est sûre : tous les autres seront bienheureux, et c’est bien assez – pour moi seul l’affaire est aléatoire. » Le message qui traverse ce récit peut se résumer en une phrase : Ne t’occupe pas du salut des autres – c’est une affaire entre eux et Dieu – préoccupe-toi plutôt de la façon dont tu vis l’Évangile aujourd’hui.
Une illustration : le feu au paradis et l’extinction de l’enfer
Une femme de Dieu se promenait dans la rue avec un seau rempli d’eau dans une main et une torche dans l’autre. On lui demande pourquoi. Elle répond : « La torche, c’est pour mettre le feu au paradis, et l’eau, c’est pour éteindre les flammes de l’enfer, afin que Dieu soit aimé pour lui-même. Que les gens cessent de penser à l’éternité et qu’ils vivent l’Évangile aujourd’hui. »
L’épître aux Hébreux du dimanche 24 août (Hébreux 12.5-7,11-13)
Les corrections du Seigneur
Le contexte – L’épître aux Hébreux
L’épître aux Hébreux est une exhortation à persévérer dans la fidélité. Pour cela, elle commence par une partie dogmatique qui interprète le ministère du Christ dans les catégories sacrificielles du Premier Testament, puis elle souligne la foi des hommes et des femmes du Premier Testament en soulignant leur fidélité même quand les promesses tardaient à se réaliser, et dans cette dernière partie, elle invite ses lecteurs à tourner les yeux vers le Seigneur malgré les difficultés.
Que dit le texte ? – Le Seigneur corrige celui qu’il aime
Les épreuves traversées sont-elles envoyées par le Seigneur pour nous corriger ou pour éprouver notre fidélité ? Cette idée ne correspond pas à notre image du Christ car nous préférons les versets qui disent qu’il se tient aux côtés des cœurs brisés, mais d’une part les deux affirmations ne sont pas contradictoires et d’autre part de nombreux passages bibliques vont dans ce sens. Nous pouvons dire trois choses à ce sujet.
Quand on traverse une épreuve, il vaut mieux savoir qu’elle vient de Dieu que d’être la victime d’un hasard malheureux ou de forces maléfiques, car l’Écriture nous dit aussi que : Dieu est digne de confiance : il ne permettra pas que vous soyez mis à l’épreuve au-delà de vos forces ; avec l’épreuve il ménagera aussi une issue, pour que vous puissiez la supporter(1 Co 10.13).
Si certaines épreuves peuvent venir de Dieu, ce n’est pas le cas de toutes. Lorsque Jésus a évoqué les Galiléens massacrés par Pilate ou les ouvriers qui ont péri dans la construction de la tour de Siloam, il a dit que ce n’était pas un fruit de leurs péchés (Lc 13.1-5).
Nous avons tous fait l’expérience d’échec ou d’épreuves qui se sont avérés bénéfiques pour nous et notre vie spirituelle dans le long terme. Quand on traverse une épreuve, plutôt que de rester à maugréer sur sa cause, il faut toujours se demander comment en sortir par le haut et se dire avec l’épître de Jacques : Mes frères, considérez comme un sujet de joie complète les diverses épreuves que vous pouvez rencontrer, sachant que l’épreuve de votre foi produit l’endurance (Jc 1.2-3).
Quel est le lien avec le passage de l’Évangile ? – La porte étroite
Efforcez-vous d’entrer par la porte étroite. Le passage de l’évangile parle de la foi en termes d’efforts, il nous appelle au combat de la foi car parfois elle nous conduit sur des chemins escarpés.
Alors qu’on interrogeait un moine sur ce qu’il faisait dans son monastère, il a répondu : « on tombe et on se relève, on tombe et on se relève, on tombe et on est relevé. » Quand le chemin et qu’il passe par la vallée de la mort, de la maladie ou de la séparation, il faut rester accroché à l’exemple d’Abraham, Isaac et Jacob qui n’ont pas eu ce qu’ils attendaient, mais qui nous attendent aujourd’hui dans le festin du royaume.
Le livre d’Esaïe du dimanche 24 août (Esaïe 66.18-21)
Toutes les nations à Jérusalem
Le contexte – Le livre d’Ésaïe
Le livre d’Ésaïe évoque des événements qui se déroulent sur plus de deux siècles depuis la chute de Samarie en 722 avant notre ère jusqu’au retour d’exil en 530. Il évoque trois empires qui ont successivement dominé le Moyen-Orient : l’Assyrien, le Babylonien et le Perse, parfois en les distinguant et parfois en les assimilant.
Le chapitre 66 est le dernier du livre et fait référence aux difficultés que les Judéens qui sont revenus d’exil ont rencontrées à leur retour à Jérusalem. Il commence avec une invitation à ne pas reconstruire le temple car la gloire de Jérusalem resplendira lorsque toutes les nations viendront à elle. Il se poursuit avec l’image de l’accouchement qui est un temps d’épreuve, mais qui se termine par une nouvelle vie. Enfin le passage proposé à notre méditation est une vision messianique du rassemblement des Judéens qui sont disséminés dans toutes les nations pour célébrer le Seigneur sur la montagne de Jérusalem.
Que dit le texte ? – Dieu se forge un nouveau peuple
Le texte commence par le rassemblement de toutes les nations. Pour cela des exilés seront envoyés dans toutes les nations, jusqu’aux îles les plus lointaines, pour ramener les Judéens de tous les pays à Jérusalem.
Ce retour est considéré comme une offrande offerte au Seigneur.
Le but de ce texte est de soutenir le combat de ceux qui sont revenus d’exil. Le livre d’Esdras nous apprend que le retour a été particulièrement laborieux car les exilés ont trouvé une ville occupée par de nouveaux habitants qui n’ont pas accueilli ceux qui venaient de Babylone dans une perspective messianique et qui sont allés jusqu’à envoyer des lettres de délation au roi de Perse.
Quand les temps sont durs, il est bon d’être encouragé par l’assurance qu’on participe à une entreprise qui nous dépasse et qu’un jour toutes les nations rejoindront son combat.
Quel est le lien avec le passage de l’Évangile ? – La porte étroite
L’image de la porte étroite proposée par Jésus nous rappelle que parfois on peut avoir le sentiment d’être peu nombreux car nos contemporains ne sont pas intéressés par l’Évangile. La valeur d’une vérité ne se mesure pas au nombre de personnes qui la professent et Jésus prépare ses disciples à être minoritaires.
À côté de cet avertissement, le texte a aussi une parole d’encouragement en déclarant que même si nos voisins désertent, on viendra de l’est et de l’ouest, du nord et du sud pour s’installer à table dans le royaume de Dieu.
Le royaume est une réalité qui est au-delà de ce qu’on voit avec nos yeux et qui est plus grand que ce peut imaginer.
Production : Fondation Bersier – Regards protestants
Intervenants : Antoine Nouis, Christine Pedotti