L’évangile de Luc du 13 juillet (Luc 10.25-35) :
Dans un échange tendu avec un spécialiste de la Loi, Jésus est mis à l’épreuve : « Que dois-je faire pour hériter de la vie éternelle ? » lui demande-t-on. Jésus répond en retournant la question : « Que dit la Loi ? » L’expert cite alors le double commandement : aimer Dieu de tout son être, et son prochain comme soi-même. Jésus approuve, mais son interlocuteur insiste : « Qui est mon prochain ? » Pour répondre, Jésus ne donne pas une définition, mais raconte une histoire.
Un homme, en route de Jérusalem à Jéricho, est agressé, volé et laissé à moitié mort. Un prêtre passe, voit, et s’écarte. Un lévite fait de même. Seul un Samaritain, membre d’un peuple méprisé par les juifs, s’arrête, soigne les plaies du blessé, le charge sur sa monture, l’emmène dans une auberge et paie pour ses soins. À la fin du récit, Jésus interroge : « Lequel des trois a été le prochain de l’homme blessé ? » Et l’expert, à contrecœur, répond : « Celui qui a eu de la compassion. » Jésus conclut : « Va, et toi aussi, fais de même. »
Cette parabole bien connue est plus qu’une simple leçon morale. Elle déplace radicalement la question : au lieu de demander qui est mon prochain, Jésus pousse à se demander pour qui suis-je un prochain. Il ne s’agit plus d’une théorie, mais d’un appel à l’action concrète.
Le Samaritain n’est pas seulement ému. Il agit. Il panse, il verse de l’huile, il transporte, il paie. C’est une compassion incarnée, sans discours ni grands principes.
Ce récit égratigne aussi le système religieux de l’époque : le prêtre et le lévite, sans doute préoccupés par les règles de pureté, choisissent l’inaction. En filigrane, Jésus remet en cause un culte centré sur le sacrifice au détriment de la miséricorde. Il reprend la parole des prophètes : « Ce que je veux, ce n’est pas le sacrifice, c’est la compassion. »
Le théologien Vassili Grossman, dans Vie et Destin, oppose les grandes idéologies souvent tyranniques à la « petite bonté » : ce geste discret, sans gloire ni doctrine, par lequel un individu en aide un autre. La bonté du Samaritain est de cet ordre. Elle est sans dogme, sans mise en scène, mais réelle. Et c’est elle, dit Jésus, qui ouvre le chemin vers la vie véritable.
L’épître aux Colossiens du 13 juillet (Colossiens 1.15-20)
La plénitude du Christ
Le contexte – L’épître aux Colossiens
L’épître aux Colossiens partage plusieurs thèmes avec l’Église aux Éphésiens dont celui de partager une vision cosmique de la personne de Jésus depuis avant la fondation du monde. Cette idée est développée dans l’hymne proposé à notre méditation pour cette semaine qui se termine par la récapitulation de toutes choses en Christ.
Pour l’inscrire dans son contexte, on peut noter que cet hymne est précédé par l’action de grâce et le pardon (Rendons grâce au Père… en son Fils bien-aimé nous avons la rédemption, le pardon des péchés) et qu’elle est suivie par la grande affirmation de la justification pas la foi qui dit à propos du Christ : Il vous a maintenant réconciliés, par la mort, dans son corps de chair, pour vous faire paraître devant lui saints, sans défaut et sans reproche.
C’est la totalité de la foi et du salut qui se trouve dans ces versets.
Que dit le texte ? – Un Christ cosmique
L’hymne célèbre la plénitude du Christ d’avant la création jusqu’à la récapitulation de toutes choses. Il se déroule en trois temps.
Il est le premier-né de toute création ; car c’est en lui que tout a été créé. Dans la foi, nous comprenons que le monde a été créé par et pour le Christ. Celui qui est né dans une étable et qui est mort sur une croix est aussi celui qui règne dans les cieux depuis le commencement des temps.
Le visible et l’invisible, trônes, seigneuries, principats, autorités ; tout a été créé par lui et pour lui. Rien n’échappe à sa seigneurie, c’est pourquoi nous pouvons nous appuyer sur lui. Comme le déclare l’épître aux Romains : Car je suis persuadé que ni mort, ni vie, ni anges, ni principats, ni présent, ni avenir, ni puissances, ni hauteur, ni profondeur, ni aucune autre création ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu en Jésus-Christ, notre Seigneur (Rm 8.38).
Il a plu à Dieu de faire habiter en lui toute plénitude et, par lui, de tout réconcilier avec lui-même. Si l’hymne commence avant la création du monde, il se termine dans une la récapitulation de toutes choses en Christ. Cet hymne inscrit la foi dans un règne d’un Christ qui domine les temps et les lieux.
Quel est le lien avec le passage de l’Évangile ? – Le bon Samaritain
L’hymne christologique de l’épître aux Colossiens nous a élevés dans les sphères les plus hautes de la présence de Dieu au-dessus des temps et des lieux alors que l’évangile de cette semaine nous ramène à notre responsabilité humaine la plus ordinaire.
Le Dieu qui est au-dessus de tous les dieux est aussi le Dieu qui nous appelle à prendre soin de notre prochain qui est blessé sur notre chemin. Le Dieu qui règne sur tout l’univers nous présente un Samaritain, un étranger, pour nous donner un exemple.
Élargir notre regard sur Dieu nous invite aussi à changer notre regard sur nos prochains, tous nos prochains.
Le texte du Deutéronome du 13 juillet (Deutéronome 30.10-14)
Une parole proche à mettre en pratique
Le contexte – Le livre du Deutéronome
Le livre du Deutéronome appartient à la tradition deutéronomiste qui est la grande fresque historique qui commence avec l’exode et se termine avec l’exil.
Les chapitres qui précèdent notre passage parlent dans un langage magnifique de malheurs redoutables qui s’abattront sur Israël à cause de son manque de fidélité, notamment au moment de l’exil. Mais le malheur n’est pas la dernière parole des Écritures et le chapitre 30 commence par l’espérance du retour d’Israël vers son Seigneur qui sera suivi du retour d’exil et d’une nouvelle relation entre Dieu et son peuple : Le Seigneur, ton Dieu, circoncira ton cœur et le cœur de ta descendance, pour que tu aimes le Seigneur, ton Dieu, de tout ton cœur et de toute ton âme, afin que tu vives (30.6).
Le passage de ce dimanche est une première conclusion du livre qui insiste sur la mise en pratique de la parole qui est un thème récurrent dans le livre du Deutéronome. Cette mise en pratique est possible parce que la parole est proche, par elle nous connaissons le projet du Seigneur pour les humains.
Que dit le texte ? – Proclamer, méditer, agir
Le premier verset de notre passage évoque le retour vers le Seigneur. La suite dit qu’il est possible car la parole est proche. Depuis que la Torah a été donnée à Moïse, la volonté de Dieu est disponible pour tous les humains. Elle se décline dans les trois points du dernier verset : Cette parole… est tout près de toi, dans ta bouche et dans ton cœur, afin que tu la mettes en pratique.
Cette parole… est dans ta bouche, elle est d’abord proclamée. Il faut la dire à voix haute pour qu’elle pénètre dans notre cœur. Dans l’épître aux Romains, Paul dira que la foi vient de ce qu’on entend (Rm 10.17).
Cette parole… est dans ton cœur. Il ne suffit pas d’entendre et de proclamer la parole, il faut aussi la méditer afin de s’en imprégner et que toute notre personne soit habitée par l’Évangile.
Enfin la parole doit être mise en pratique, c’est ainsi qu’elle révélera sa validité. C’est en vivant la Torah qu’on comprend la Torah, c’est en vivant l’Évangile qu’on comprend l’Évangile.
La mise en pratique de la Parole est un des grands thèmes qui parcourent tout le livre du Deutéronome.
Quel est le lien avec le passage de l’Évangile ? – Le bon Samaritain
Cette parabole qui est une des plus connues de l’évangile souligne l’opposition entre les prêtres et les lévites qui sont de bons religieux mais qui se détournent de l’homme qui est à terre sur leur chemin, et le Samaritain, considéré comme un mauvais croyant, qui s’arrête pour devenir le prochain de l’homme blessé.
Pour Jésus, c’est ce dernier qui est met en pratique le résumé de l’Évangile qui appelle à aimer son prochain comme soi-même. Aimer, ce n’est pas trouver son prochain sympathique, mais c’est accepter de s’arrêter sur son chemin pour porter secours à celui qui est dans le besoin.
L’attitude du bon Samaritain est une illustration de la parole du Deutéronome appelant à mettre en pratique la parole de Dieu. Cette parole qu’on est appelé à méditer nous oblige vis-à-vis de tous les blessés de la vie.
Production : Fondation Bersier – Regards protestants
Intervenant : Antoine Nouis