L’évangile du dimanche 21 janvier
Marc 1.14-20 – Les premiers disciples chez Marc
La prédication de Jésus et l’appel des disciples
Introduction
Après que Jean eut été livré, les premiers mots de notre texte nous rappellent que l’évangile se passe dans notre monde, le vrai monde dans lequel les hommes libres dérangent lorsqu’ils remettent en question l’ordre établi.
Hérode pensait s’être débarrassé de Jean en le faisant emprisonner, c’est oublier que s’il est facile de faire taire un homme, il est plus difficile de faire taire une aspiration à la liberté. Après Jean un autre va se lever pour porter la parole du changement radical.
Points d’exégèse
Attention sur deux points.
Le temps est accompli : le kairos
En Grec, il y a deux mots pour dire le temps. Le chronos désigne le temps mesurable, c’est le temps des montres et des calendriers, des chronomètres et de la chronologie. Et puis il y a le kairos qui est le temps où il se passe quelque chose, le temps où survient l’événement qui donne le sens. Si le chronos est quantitatif, le kairos est qualitatif.
Lorsque Jésus proclame que le temps est accompli, il évoque l’apparition d’un nouveau temps dans l’histoire des humains, c’est maintenant le temps de Dieu.
Dans la succession des jours et des semaines, des hommes vont entendre l’irruption de ce nouveau temps dans leur histoire, ce sont les pécheurs qui vont répondre à l’appel du Christ.
Jean le prophète
On savait de Jean que c’était un ascète. L’évangile l’a décrit comme un homme qui était vêtu de poil de chameau, avec une ceinture de cuir autour des reins, et qui se nourrissait de criquets et de miel sauvage (v.6). On apprend maintenant qu’il a été arrêté et nous apprendrons plus tard que c’est parce qu’il dénonçait le mauvais comportement du roi.
La vie ascétique et la parole tranchante inscrivent Jean dans la lignée des prophètes. Dieu se révèle dans le monde à travers la tension entre le prêtre et le prophète. Le prêtre qui dit Dieu dans le quotidien, dans la succession des jours et des semaines, dans le temps des horloges et des chronomètres lorsque le prophète proclame le kairos de la justice de Dieu.
Pistes d’actualisation
Prédication de Jésus et de Jean
Jean et Jésus prêchaient tous les temps le changement radical, mais l’inflexion est un peu différente, Jean prêchait en vue du pardon des péchés alors que Jésus prêchait parce que le temps est accompli.
Pour actualiser leur parole, nous dirons que la prédication de Jean dit : « Le monde va mal et notre vie est courte. Sommes-nous prêts à rencontrer Dieu ? Changez de comportement pour être en règle avec votre créateur. » Alors que la prédication de Jésus dit : « Dieu est venu habiter notre monde pour le sauver. Notre monde est malade et notre vie est précaire, mais ils sont aimés de Dieu. Changez de comportement pour accueillir la bonne nouvelle d’un Dieu qui nous a rejoints. »
Dans la bouche de Jésus, l’appel au changement de comportement n’est pas une condition du pardon, mais une conséquence de la grâce.
La décision des pécheurs
Des hommes qui ont entendu l’appel de Jésus sont les pêcheurs qui ont tout quitté pour le suivre.
Pourquoi un homme est-il prêt à changer de vie pour répondre à un appel ? Cela procède du cheminement de l’esprit dans une personne. La seule chose que nous pouvons dire est qu’après son baptême, Jésus était tellement plein de la présence de Dieu qu’il rayonnait d’une force intérieure qui a conduit des hommes à vouloir le suivre pour partager son espérance.
Ces hommes n’étaient ni des enfants ni des inconscients. S’ils ont tout quitté, c’est qu’ils ont compris que Jésus était porteur d’une grande nouvelle qui leur disait la vérité de leur vie. La suite de l’évangile montrera que ces hommes, à ce moment-là, étaient loin de tout comprendre. Ils avaient néanmoins la conviction qu’ils commençaient une aventure qui méritait de tout laisser pour y entrer.
Le métier de pêcheur
« Venez à ma suite, et je vous ferai devenir pêcheurs d’humains. » La première tâche du disciple est de marcher à la suite du Christ qui n’a pas dit : « Croyez en moi ! », mais : « Suivez-moi ! ». La vie de foi est d’abord une marche. Où en sommes-nous aujourd’hui, dans notre marche sur les chemins de l’Évangile ?
Ensuite le travail de pêcheur est fait de patience. Il faut lancer le filet, encore et encore, après l’avoir raccommodé maille après maille, nœud après nœud. La patience et la persévérance font la qualité d’un bon disciple du Christ.
Suivre le Christ, c’est marcher et persévérer.
Une illustration : Le goût de la liberté
Pourquoi les pécheurs ont répondu si rapidement à l’appel de Jésus ? Un père du désert disait : « Lorsqu’ un esclave voit un homme libre, il veut être libre. Lorsqu’un pauvre voit un riche, il veut être riche. Lorsqu’un soldat a vu un général, il veut être général… Lorsqu’un pécheur voit un homme lutter pour vivre de la grâce, il veut en faire autant. » Au bord du lac, des pêcheurs ont été appelés par un homme libre, ils ont entendu dans cet appel une bonne nouvelle pour leur vie. Puissent-ils nous donner le goût de cette liberté !
L’épître du dimanche 21 janvier
1 Co 7.29-31 – Le temps est court
Le contexte – Une morale du détachement
L’Église de Corinthe est jeune et ses membres ont des difficultés à trouver un équilibre entre la liberté et la loi dans le domaine de l’éthique sexuelle.
Paul consacre trois chapitres à cette question. Le passage que nous avons lu déplace le débat en développant une morale du détachement lorsqu’il affirme que le temps est court. Les relations doivent se penser à la lumière de l’urgence de l’Évangile qui relativise toutes les questions.
Nous pouvons ajouter que Paul a vécu ce qu’il proclame : toute sa vie était consacrée à son ministère.
Que dit le texte ? – Le temps se fait court
La réflexion éthique de l’apôtre se conduit à la lumière de ce principe herméneutique : le temps se fait court. Les situations de vie – la conjugalité, la tristesse, la joie, la possession… – sont envisagées à partir de ce principe.
Dans l’épître aux Romains, la brièveté des temps conduit à l’urgence de l’amour, car vous savez en quel temps nous sommes : c’est bien l’heure de vous réveiller du sommeil, car maintenant le salut est plus proche de nous que lorsque nous sommes venus à la foi. La nuit est avancée, le jour s’est approché. Rejetons donc les œuvres des ténèbres et revêtons les armes de la lumière (Rm 13.10-12).
Pour les stoïciens comme pour les épicuriens, le bonheur se définit par l’absence de troubles, donc par le détachement vis-à-vis des plaisirs illusoires de ce monde. Chez Paul, ce même détachement est enseigné parce que le temps se fait court.
Quel est le lien avec le passage de l’Évangile ? – Paul et les disciples de Jésus
Lorsque les pêcheurs qui réparaient leur filet ont entendu l’appel de Jésus, ils ont tout laissé pour le suivre. Ils ont entendu une parole qui relativisait tous leurs attachements et toutes leurs activités.
La réponse radicale de ces travailleurs de la mer nous rappelle l’urgence de l’Évangile. Nous pouvons entendre cette parole pour nous. Comme le dit Jésus dans la parabole du riche insensé, peut-être que ce soir je serai mort (Lc 12.20). Que le soir de ma mortsoit aujourd’hui ou dans quelques décennies, le temps est court. C’est pourquoi il est urgent de me convertir et de vivre des graines d’Évangile dans ma vie et dans mes relations.
Le Premier Testament du dimanche 21 janvier
Jonas 3.1-10 – La conversion de Ninive
Des étrangers se tournent vers Dieu
Le contexte – Le livre de Jonas
Jonas est envoyé à Ninive qui était la capitale de l’Assyrie, l’empire qui a envahi le royaume du nord et détruit la ville de Samarie.
Le prophète Nahum décrit la chute de Ninive comme une vengeance du Seigneur à cause de la violence et de la prostitution qui régnaient dans la ville. Celui de Jonas est dans une tonalité différente puisqu’il raconte le pardon que Dieu accorde à la ville ennemie.
Il faut ajouter que ce récit ressemble plus à un conte oriental qu’à un livre prophétique et la présence d’animaux miraculeux relève plus du récit légendaire que de la tradition biblique.
Le décalage est d’autant plus marqué que le message du livre – Dieu fait miséricorde aux Ninivites qui se sont repentis – est l’inverse de celui du personnage éponyme qui, dans le dernier chapitre, attend avec impatience que Dieu fasse descendre son feu sur la ville pécheresse. Avec humour, le récit se moque du prophète nationaliste qui proteste contre un Dieu qui est compatissant avec les ennemis de son peuple.
Que dit le texte ? – La repentance des Ninivites
Dieu a une première fois appelé Jonas pour qu’il annonce le jugement de Ninive, mais je prophète a fui sa vocation en partant dans la direction opposée.
Rattrapé par un grand poisson, il est recraché sur le rivage et Dieu lui demande une seconde fois d’aller prêcher à Ninive. Obligé, Jonas s’exécute et un vrai miracle se produit : au lieu de se débarrasser du prophète de malheur, les Ninivites sont touchés pas son message et le roi ordonne à tous les humains de la ville – et aussi aux animaux – de se revêtir de sacs en signe de repentance – et de revenir de leurs mauvaises actions.
Le chapitre se termine par un deuxième miracle : Dieu vit qu’ils agissaient ainsi et qu’ils revenaient de leur voie mauvaise. Alors Dieu renonça au mal qu’il avait parlé de leur faire ; il ne le fit pas (Jon 3.10).
Quel est le lien avec le passage de l’Évangile ? – La réponse des premiers apôtres
Jésus commence son ministère en proclamant, lui aussi le changement de comportement : Le temps est accompli et le règne de Dieu s’est approché. Changez radicalement et croyez à la bonne nouvelle (Mc 1.15).
Ceux qui entendent cette parole ne sont pas les Ninivites, mais des pêcheurs qui laissent leurs filets pour aller à sa suite. Les premiers disciples de Jésus n’ont pas été des religieux qui passaient leurs journées à scruter les Écritures, mais des travailleurs de la mer.
L’Évangile s’adresse à tous, et parfois ceux qui l’entendent ne sont pas ceux à qui on s’attendrait.