L’évangile du dimanche 31 mars

Marc 16.1-7 – Inquiétante résurrection

Introduction

Dans l’évangile de Marc, les apôtres ont opposé une incrédulité farouche à la perspective de la croix. Quand Jésus a été crucifié, ils sont dans la sidération, enfermée dans une pièce par peur.

C’est un sympathisant, Joseph d’Arimathée qui s’est occupé de lui donner une sépulture et ce sont des femmes qui vont l’embaumer.

Points d’exégèse

Les aromates pour embaumer

De femmes achetèrent des aromates pour l’embaumer. Les soins apportés au défunt sont un invariant anthropologique, on en trouve dans toutes les civilisations. Le propre de l’humain dans le monde animal est qu’il prend soin de ses défunts. Les corps étaient lavés, puis recouverts de plantes aromatiques pour lutter contre les mauvaises odeurs.

Les femmes sont venues pour l’embaumer, mais elles ne l’ont pas fait car le corps de Jésus n’était plus là. L’embaumement a eu lieu quelques jours avant lors de l’onction à Béthanie lorsqu’une femme – anonyme dans l’évangile de Marc – a répandu un parfum de grand prix sur la tête de Jésus. Aux disciples choqués par le geste dispendieux, Jésus a répondu : « Elle a d’avance embaumé mon corps pour l’ensevelissement[1]. »

C’est avant la mort que Jésus avait besoin qu’on prenne soin de lui. Après, il ne sera plus là.

Le jeune homme dans le tombeau

Quand les femmes arrivent au tombeau, elles se demandent qui leur roulera la pierre, mais elle est roulée. Elles entrent en tremblant et voient un jeune homme assis à droite, vêtu d’une robe blanche… 

Le mot jeune homme évoque le disciple qui s’est enfui nu, en abandonnant son vêtement au moment de l’arrestation de Jésus[2]. Il n’est plus nu, il n’est plus en fuite, il est assis dans le tombeau en attendant les femmes pour leur annoncer la grande nouvelle de la résurrection : Ne vous effrayez pas !

Pistes d’actualisation

1er thème : La résurrection par le vide 

L’évangile ne décrit pas la résurrection, il ne raconte pas comment Jésus a brisé les chaînes de la mort, elle annonce un tombeau vide. À celui qui cherche Jésus parmi les morts, il annonce que c’est parmi les vivants qu’ils le trouveront : Il vous précède en Galilée.

Dans la première épître aux Corinthiens, lorsque Paul annonce le message de la résurrection, il parle des témoins qui l’ont rencontré : « Il est apparu à Céphas, puis aux Douze. Ensuite, il est apparu à plus de cinq cents frères à la fois… : la plupart d’entre eux sont demeurés en vie, quelques-uns se sont endormis dans la mort. Ensuite, il est apparu à Jacques, puis à tous les apôtres[3]. » La foi en la résurrection s’appuie sur la façon dont des hommes et des femmes l’ont rencontré vivant dans leur existence.

2e thème : Il vous précède en Galilée

C’est en Galilée que les femmes vont rencontrer le Christ. La Galilée est le pays de la plupart des disciples, le pays de leur enfance, de leur rencontre avec Jésus, le pays où il a exercé la plus grande partie de son ministère. Le renvoi en Galilée annonce une résurrection qui se situe au cœur de leur histoire.

Ce n’est pas en allant à l’autre bout de monde que nous trouverons le Christ, mais en l’accueillant dans notre Galilée. C’est dans notre Galilée que nous sommes appelés à ressusciterPar la grâce de Dieu, j’ai retrouvé ma Galilée.

3e thème : La peur de la résurrection 

En entrant dans le tombeau dont la pierre a été roulée, les femmes sont effrayées. Le jeune homme assis dans le tombeau leur dit de ne pas s’effrayer, mais le dernier verset de notre passage dit : elles ne dirent rien à personne, car elles avaient peur. 

Dans sa version initiale, l’évangile se terminait sur la peur des femmes. Les derniers versets de l’évangile sont un ajout postérieur.

Avons-nous peur de la résurrection ? Si nous n’avons pas peur, est-ce parce que nous sommes des anges qui avons totalement intégré la victoire du Christ, où est-ce par ce que nous sommes habitués ?

La peur des femmes nous invite à recevoir ce message comme l’annonce la plus importante qui n’a jamais été dite à notre vie.

Une illustration

La résurrection commence par un vide, mais c’est un vide qui change tout.

Lao-Tseu est un sage du VIe siècle avant Jésus-Christ. Il a dit : « Trente rayons convergent vers le moyeu, mais le vide entre eux fait avancer le char. D’une motte de glaise on façonne la jarre, mais c’est le vide en elle qui en donne l’usage. Murs, portes et fenêtres forment la maison, mais le vide de la chambre permet d’y habiter. Voici l’explication : la matière est utile, l’immatériel donne l’usage véritable. »

[1] Mc 14.8.

[2] Mc 14.51-52.

[3] 1 Co 15.5-7.

L’épître du dimanche 31 mars

Col 3.1-4 – Vous êtes ressuscités 

Le contexte – L’épître aux Colossiens

Paul n’est pas le fondateur de l’Église de Colosse, mais l’épître qui lui est attribuée a été intégrée dans le canon car elle évoque un danger qui menace toutes les Églises.

Certaines personnes, dont nous ignorons tout, appellent les Colossiens à mener une vie ascétique au nom d’une sagesse supérieure. C’est cette pathologie religieuse qui consiste à penser que nous devons mener une vie exemplaire pour être aimés de Dieu. 

Paul a des propos très durs pour ces acètes en disant que, sous un couvert d’humilité et de culte des anges, ils sont gonflés de vanité par la pensée de leur chair (Col 2.18). Cela le conduit à un vibrant plaidoyer en faveur de la liberté chrétienne : Si vous êtes morts avec le Christ aux éléments du monde, pourquoi, comme si vous viviez dans le monde, vous replacez-vous sous des prescriptions légales : « Ne prends pas, ne goûte pas, ne touche pas… » (Col 2.20-21).

Que dit le texte ? – La vie en Christ

Aux prédicateurs qui veulent remplacer l’Évangile par l’observance de certaines lois, l’auteur de l’épître aux Colossiens oppose la vie nouvelle en Christ. Les prescriptions de la Torah ne sont plus pertinentes pour les croyants car ils sont sortis des catégories religieuses : Vous êtes réveillés avec le Christ… vous êtes morts. La question n’est plus de savoir comment on respecte telle ou telle prescription, mais comment et à quoi on est mort, et comment et à quoi on est réveillé ?

Lorsque l’auteur de l’épître dit que notre vie est cachée en Christ, il parle de la foi comme un colloque intime entre Dieu et nous. Au regard de ce face à face, les obligations religieuses n’ont plus aucun sens. 

Quel est le lien avec le passage de l’Évangile ? – Une vie cachée

Nous pouvons tracer une résonnance entre l’annonce que le Christ nous précède en Galilée et la déclaration selon laquelle notre vie est cachée en lui. 

Notre Galilée, c’est le pays de notre enfance, le pays dans lequel nous avons grandi, dans lequel nous nous sommes construits. C’est là que le Christ nous retrouve, au plus intime de notre personne, dans ce lieu sacré dans lequel nul ne peut pénétrer.

L’annonce de la résurrection n’est pas une théorie qui nous est extérieure, c’est cette assurance que notre vie est en Christ et que rien, pas même la mort, ne saurait nous séparer de son amour. 

Dire « Christ est ressuscité », c’est dire qu’une parole nouvelle est venue s’immiscer dans le plus intime de ma personne pour m’assurer de la bienveillance inconditionnelle avec laquelle Dieu regarde mon histoire et m’appelle à le suivre. 

Le texte du Premier Testament du dimanche 31 mars

Ac 10.34-43 – Discours à la maison de Corneille

Le contexte – La venue de Pierre chez Corneille

Lorsque Jésus a quitté ses disciples à l’Ascension, il leur a fait une promesse : Vous recevrez la puissance de l’Esprit, et il leur a donné un ordre de mission : Vous serez mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et en Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre (1.8). Après la Pentecôte, au lieu d’obéir à cet envoi, ils sont restés à Jérusalem en attendant le retour du Christ. C’est la persécution qui les a envoyés en Judée et en Samarie (8.1). 

La venue de Pierre chez Corneille marque l’entrée de l’Évangile chez des non-juifs, mais pour que Pierre mette les pieds chez Corneille, il a fallu trois interventions de l’Esprit : Un ange envoyé à Corneille, une vision accordée à Pierre, et une interprétation de l’Esprit pour qu’il comprenne le sens de sa vision. 

Forcé par l’Esprit pour mettre les pieds dans la maison du centurion, Pierre lui annonce l’Évangile de Jésus-Christ.

Que dit le texte ? – Qui est Jésus ?

La prédication de Pierre commence par une affirmation qui signe la singularité de l’Évangile : En vérité, dit-il, je comprends que Dieu n’est pas partial, mais qu’en toute nation celui qui le craint et pratique la justice est agréé de lui.

Pierre en cela fait preuve d’une belle disponibilité spirituelle. Il accepte d’ouvrir les yeux sur l’enchainement des événements et d’en tirer les conséquences spirituelles. 

Cette affirmation de l’ouverture du salut aux non-juifs est l’aboutissement d’un parcours qui a commencé avec le baptême de Jésus, puis son ministère de libération, sa crucifixion, son relèvement d’entre les morts et l’envoi en mission des disciples. 

Pierre comprend que sa présence chez Corneille est l’aboutissement de ce cheminement.

Quel est le lien avec le passage de l’Évangile ? – Le rôle des témoins

Le message adressé aux disciples est que c’est en Galilée, quand ils seront retournés dans leur vie quotidienne, qu’ils rencontreront le ressuscité. 

Dans son discours Pierre prolonge cette annonce en déclarant que la résurrection n’est pas tant un fait historique constatable par tous qu’une rencontre avec certains témoins pour qu’ils proclament que Jésus est le juge des vivants et des morts. 

Autrement dit, le message de la résurrection ne fait pas l’économie des médiations humaines. C’est le truchement de Pierre que la maison de Corneille a entendu que le Seigneur qui s’est manifesté en Jésus-Christ est celui qui apporte le pardon des péchés.

Production : Fondation Bersier – Regards protestants
Intervenants : Antoine Nouis, Florence Taubmann