L’évangile du dimanche 7 avril

Jn 20.19-31 – La résurrection de Thomas

Introduction
Dans le verset précédent, Marie de Magdala a annoncé aux disciples qu’elle a vu le Seigneur, mais ces derniers restent enfermés dans une maison bien close par crainte des religieux. Ils sont toujours dans la sidération de la croix et dans la déception. Ils n’étaient pas prêts à cette fin à laquelle ils n’avaient pas cru.
C’est dans leur enfermement qu’ils vont recevoir la visite du ressuscité.

Points d’exégèse
Attention sur deux points.

La peur des disciples

Les disciples ont peur, ils n’ont pas envie de subir le même sort que leur maître. Cette crainte n’est pas illégitime. Lors de l’arrestation de Jésus, l’évangile précise que Jésus est allé au-devant de ceux qui sont venus l’arrêter pour que s’accomplisse la parole qu’il avait dite : « Je n’ai perdu aucun de ceux que tu m’as donnés (Jn 18.9). » Si l’évangile précise cette précaution, c’est que la menace était réelle.
Lorsque Jésus a demandé à ses disciples de ne pas le défendre, c’était aussi pour les protéger. C’est lui qui devait mourir, pas eux.

L’énigme du corps du ressuscité

Jésus se retrouve au milieu des disciples alors que la porte de la maison dans laquelle ils étaient était fermée. Comment le ressuscité a-t-il traversé les portes fermées ? Comme pour les miracles de l’évangile, nous nous enfermons dans une impasse si nous nous arrêtons à la matérialité des faits. Nous risquons alors de passer à côté du vrai sens de ce passage.
Si nous ne pouvons expliquer, nous devons écouter. Le ressuscité a un corps – le verset suivant insistera sur cette dimension – mais c’est un corps différent.

Pistes d’actualisation

1er thème : La paix du Christ
À trois reprises en quelques versets, le Christ dit à ses disciples : La paix soit avec vous ! C’était certes la salutation d’usage, mais nous pouvons aussi l’entendre au sens premier comme Jésus l’a promis dans son discours des adieux à ses disciples : Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix. Moi, je ne vous donne pas comme le monde donne. Que votre cœur ne se trouble pas et ne cède pas à la lâcheté ! (Jn 14.27)

La grande annonce de la résurrection, c’est que nous pouvons accueillir la paix du Christ sur nos peurs et nos frayeurs. Chaque fois que je suis menacé par les soucis ou les ennuis, je dois me redire : le Christ est ressuscité, il me donne sa paix.
C’est de cette paix dont à témoigné Paul lorsqu’il a dit que rien, ni la détresse, ni l’angoisse, ni la persécution, ni la faim, ni le dénuement, ni le péril, ni l’épée ne pourrait le séparer de l’amour de Dieu en Jésus Christ (Rm 8.35-39).

2e thème : Le pardon comme mission de l’Église
Lorsque Jésus souffle son Esprit sur les disciples, il leur dit : À qui vous pardonnerez les péchés, ceux-ci sont pardonnés ; à qui vous les retiendrez, ils sont retenus. La première mission de l’Église, c’est de porter le pardon de Dieu, de vivre selon l’économie du pardon et de la réconciliation plus que de l’accusation.

Le pardon est une guérison contre la rancune, les regrets et les culpabilités. Il est une résurrection par rapport aux fautes et aux blessures de notre histoire.
Vivre dans l’économie du pardon, c’est savoir que nous ne sommes pas prisonniers de notre passé, mais qu’un nouveau chemin est toujours possible.
C’est cette libération que l’Église a la mission de partager.

3e thème : La foi de Thomas
Nous pouvons critiquer le manque de foi de Thomas qui déclare qu’il ne croira pas s’il ne voit pas, mais nous pouvons aussi saluer son solide bon sens.
Garder un sens critique en toutes circonstances est une attitude sage.
Thomas est un vrai sceptique, et pourtant lorsque Jésus lui propose de le toucher, il n’en a plus besoin, une simple parole lui a suffi pour confesser la foi : Mon Seigneur et mon Dieu.
Au-delà de la vue et du toucher, la foi, c’est d’entendre que Christ est ressuscité pour nous et de le confesser comme son Seigneur et son Dieu.

Une illustration : La nécessité du pardon

Jonathan Sacks est le grand rabbin de Londres. Dans un de ses livres, il évoque la nécessité du pardon.
« Je suis juif. En tant que juif, je porte en moi les larmes et les souffrances de mes grands-parents et de leurs parents au fil des générations… Des siècles durant, les Juifs ont su qu’eux ou bien leurs enfants risquaient d’être assassinés simplement parce qu’ils étaient juifs. Ces larmes sont incrustées dans l’étoffe même de la mémoire juive, c’est-à-dire de l’identité juive.

Pourquoi devrais-je renoncer à cette douleur gravée au plus profond de mon âme ?
Je le dois pourtant. Pour l’amour de mes enfants et des enfants de mes enfants qui ne sont pas encore nés. Je ne saurais bâtir leur avenir sur les haines du passé, ni leur enseigner qu’ils aimeront Dieu davantage en aimant moins les gens. Quand j’implore le pardon de Dieu, j’entends dans ma requête
elle-même, qu’Il exige de moi que je pardonne aux autres. Et je pardonne parce que j’ai un devoir à l’égard de mes enfants aussi bien qu’envers mes ancêtres… J’honore le passé non en le répétant, mais en en tirant les leçons, en refusant d’ajouter la douleur à la douleur, le malheur au malheur. C’est pourquoi il nous faut répondre à la haine par l’amour, à la violence par la paix, au ressentiment par la générosité et au conflit par la réconciliation. »

L’épître du dimanche 7 avril

07.04.2024 : 1 Jn 5.1-6 – L’amour comme signe de la foi 

Le contexte – La première épître de Jean

La tradition johannique qui comporte le quatrième évangile, les trois épîtres de Jean et l’apocalypse. Elle s’adresse à une communauté confrontée à des dérives sur la nature du Christ : Est-il possible que celui qu’on proclame fils de Dieu soit mort sur une croix ? Est-ce digne de Dieu ? Ne serait-il pas finalement plus simple de considérer que l’homme Jésus de Nazareth et le Christ de Dieu soient deux personnes distinctes.

L’auteur de l’épître répond à ces dérives en disant que Dieu a envoyé son fils par amour et cet amour est allé jusqu’à la croix.. C’est l’amour qui est la clef de l’épître et le signe de la foi.

Nous pouvons résumer son message en quelques affirmations : Dieu est amour – la marque de son amour est qu’il a envoyé son fils – en retour nous pouvons aimer Dieu et nous aimes les uns les autres.

Que dit le texte ? – La marque de l’amour de Dieu

L’épître insiste sur le fait que l’amour n’est pas un sentiment ni une émotion, mais il repose sur un acte de Dieu qui est venu jusqu’à nous par l’eau et par le sang. Les commentaires voient dans cette expression des références au baptême et à la croix.

Au baptême Jésus a accepté d’être assimilé au plus humble des humains en ayant besoin du signe de la présence de Dieu sur sa vie, et à la croix il a montré jusqu’où son amour allait. 

Si nous savons poser notre vie dans cette réalité du don de Dieu, c’est toute notre existence qui en est changée : nous pouvons vivre des commandements de Dieu en entrant dans cette communion d’amour entre le père et le fils.

Quand l’épître parle de garder les commandements, elle n’évoque pas l’obéissance à une série de prescriptions, mais faire entrer la vie de Dieu dans notre propre existence. 

Quel est le lien avec le passage de l’Évangile ? – L’esprit rend témoignage

Dans l’évangile, Jésus souffle son Esprit sur ses disciples et dans l’épître, c’est l’Esprit qui rend témoignage qu’en Jésus, le Christ est venu jusqu’à nous par l’eau et le sang, parce qu’il est l’Esprit de vérité.

Quand Jésus envoie ses disciples en mission, ces derniers peuvent compter sur son Esprit. Ils savent que par eux-mêmes, ils sont bien peu capables de transmettre le message du pardon : c’est l’Esprit qui convainc. Le rôle de l’Église n’est pas de convertir ni d’imposer le Royaume, c’est de le vivre et le proclamer, la façon dont le message est reçu relève de l’Esprit. 

Dans la Bible l’Esprit est ce qui permet à une parole entendue de devenir pour une personne une parole de vie, la parole la plus importante qui a jamais été proclamée sur sa personne. 

Le livre des Actes du dimanche 7 avril

Ac 4.32-35 – La première Église

Le contexte – La vie de la première Église

Les premiers chapitres du livre des Actes présentent plusieurs passages qui évoquent la manifestation de l’Esprit. Le premier est le récit de la Pentecôte qui signe le commencement de la vie de l’Église.

Après le discours de Pierre, la première Église est décrite par des signes et des prodiges, le partage des biens et quatre persévérances : Ils étaient assidus à l’enseignement des apôtres, à la communion fraternelle, au partage du pain et aux prières (Ac 2.42). Comme conséquence de cette vie fraternelle : Tous les croyants étaient ensemble et avaient tout en commun.

Les chapitres qui suivent sont une illustration de ce programme puisque Pierre guérit un infirme qui était à la porte du temple et proclame que c’est par Jésus le ressuscité qu’il l’a fait. Il est arrêté par le sanhédrin, mais il a le courage de témoigner de sa foi. Quand il est relâché et que les apôtres se retrouvent, une nouvelle fois l’Esprit remplit la maison dans laquelle ils se trouvent. 

Pour marquer la vitalité de cette première Église, une nouvelle fois le partage des biens est évoqué. 

Que dit le texte ? – Les signes de l’Esprit

Dans la première Église, la multitude… était un seul cœur et une seule âme. Les hommes et les femmes étaient tellement habités par la présence de l’Esprit qu’ils partageaient leurs biens en mettant en pratique le commandement de la Torah : Il ne devrait pas y avoir de pauvre chez toi, car le Seigneur te bénira dans le pays que le Seigneur, ton Dieu, te donne comme patrimoine, afin que tu en prennes possession (Dt 15.4).

Pourquoi ne partageons-nous pas ? Parce que nous tenons à notre argent qui est un maître pour nous, parce que nous avons peur de demain, parce que nous préférons notre petit confort. Toutes ces excuses ne tiennent pas face à la grâce de l’Évangile. 

À partir de ce verset, nous pouvons entendre que notre rapport à l’argent est un signe de la vitalité de notre foi. 

Quel est le lien avec le passage de l’Évangile ? – Les fruits de l’Esprit

Dans la Pentecôte du quatrième évangile, Jésus retrouve les disciples qui étaient enfermés et souffle sur eux son Esprit pour les envoyer proclamer le pardon de Dieu. L’Esprit est celui qui envoie les disciples, mais le message de l’Évangile passe autant par la vie que par les mots.

C’est dans le quatrième évangile que l’on trouve le verset qui dit : Si vous avez de l’amour les uns pour les autres, tous sauront que vous êtes mes disciples (Jn 13.35). C’est en vivant le partage que les disciples ont été témoins de la vie de l’Esprit.

La question que nous posent ces récits est la suivante : de quoi notre façon de vivre témoigne-t-elle ?

Production : Fondation Bersier – Regards protestants
Intervenant : Antoine Nouis