L’évangile du dimanche 8 décembre

Jean et la prophétie d’Ésaïe…

Introduction

Le premier dimanche de l’avent évoquait une sorte de fin du monde avec des signes cosmiques et l’appel à prier. Le récit était plutôt inquiétant, c’est pourquoi le deuxième dimanche évoque une espérance avec l’arrivée imminente du Seigneur.

Les quatre évangiles sont d’accord pour commencer le ministère public de Jésus avec la personne de Jean le baptiseur qui accomplit l’appel d’Ésaïe à préparer le chemin du Seigneur.

Points d’exégèse

Attention sur deux points.

Titre : Le politique et le religieux

Luc en bon historien prend soin d’inscrire le commencement du ministère public de Jésus dans le temps : La quinzième année du gouvernement de Tibère César – alors que Ponce Pilate était gouverneur de la Judée… et du temps des grands prêtres Anne et Caïphe. L’empereur, le procurateur et le grand prêtre.

L’Évangile n’est pas un message hors-sol, il s’incarne dans l’histoire dans un pays et dans un temps particuliers.

Pilate et Caïphe présentent le politique et le religieux. À la fin de l’évangile, Pilate condamnera Jésus à mort à l’instigation du grand prêtre Caïphe.

Titre : Jean, figure de prophète

La parole de Dieu parvint à Jean, fils de Zacharie, dans le désert. L’expression la parole de Dieu parvint est utilisée pour évoquer l’appel des prophètes dans le Premier Testament (Jr 1.2, Jo 1.1, Mi 1.1). Cette filiation prophétique avait été annoncée dans l’hymne de Zacharie qui avait dit dans son cantique à propos de son fils : Et toi, mon enfant, tu seras appelé prophète du Très-Haut ; car tu iras devant le Seigneur pour préparer ses chemins(1.76).

Les évangiles de Matthieu et de Jean accentue cette filiation en décrivant Jean vêtu d’un vêtement de poil de chameau qui est une référence à Élie dans le Premier Testament.

Si on suit une lecture canonique des évangiles, ce moment de l’histoire est l’accomplissement d’une annonce qui avait été faite trente ans plus tôt.

Enfin, l’évocation du désert évoque un temps de retour à Dieu.

Pistes d’actualisation

1er thème : Jean, fils de Zacharie

Jean, fils de Zacharie. Qui est Jean ? Les premiers versets de l’évangile disent qu’il est prêtre puisque c’est pendant qu’il accomplissait son service sacerdotal dans le temple de Jérusalem qu’un ange lui a annoncé la naissance d’un enfant qu’il n’espérait plus au regard de son grand âge. Si Zacharie est prêtre, son fils Jean l’est aussi puisque c’est une fonction héréditaire. Si Jean est prêtre que fait-il dans le désert ? Sa place naturelle est d’être dans le temple de Jérusalem à assumer sa responsabilité sacerdotale.

Ce verset est l’annonce d’un message qu’on retrouve régulièrement dans l’évangile : c’est dans le désert et non dans le temple, dans le changement de comportement et non dans le rite, que se prépare la venue du Seigneur. Ce verset contient en filigrane une critique de la théologie du temple qui sera reprise par Jésus.

2e thème : Jean et Ésaïe

Dans la suite de la première piste, le passage cité est issu du prophète Ésaïe. Le propre de ce livre est qu’il s’étale sur deux siècles puisqu’il évoque la chute de Samarie (722) et le retour d’exil (538). Il est enfin facile de repérer trois parties dans le livre si bien qu’on peut se demander pourquoi il n’a pas été divisé en trois livres distincts. Une explication est qu’un thème parcourt tout le livre qui est justement la critique de la théologie du temple qu’on trouve dans le premier et dans le dernier chapitre (Es 1.10-16, 66.1-3). En commençant le ministère de Jésus avec la personne de Jean et la citation d’Ésaïe, les quatre évangiles inscrivent leur message dans la veine d’un prophète qui appelle à un dépassement du temple.

3e thème : L’évangile et l’exil – il se prépare dans le désert

C’est dans le désert que se prépare le chemin du Seigneur. Le passage d’Ésaïe se situe au commencement de la deuxième partie du livre qui évoque l’exil qui est aussi un temps de désert, de retour vers Dieu. Le désert est un lieu de dépouillement, où on se libère du superflu pour retrouver sa pauvreté intérieure, là où le Seigneur vient se nicher.

Pour préparer la venue du Seigneur – ce qui est le thème de l’avent – il faut opérer la démarche intérieure pour se reconnecter avec son intériorité, ce qui est le propre de la démarche spirituelle.

Les temps liturgiques sont une pédagogie. Pendant l’avent on se prépare au nouveau, on combat la dégradation de l’étonnement.

Une illustration : Les montagnes et les vallées

Toute vallée sera comblée, toute montagne et toute colline seront abaissées. Le père de l’Église Léon le Grand a écrit que « la vallée signifie la douceur des humbles, et la montagne et la colline l’élèvement des superbes… C’est donc à bon droit que les vallées s’entendent dire qu’elles comblées et les montagnes qu’elles seront abaissées. » Par cette allégorie, ce verset reprend le cantique de Marie qui annonce un évangile qui élève les humbles et qui résiste aux orgueilleux : Heureux êtes-vous, vous les pauvres, car le royaume de Dieu est à vous !… Mais quel malheur pour vous, les riches ! Vous tenez votre consolation ! (Lc 6.20,24)

Le texte de l’épître aux Philippiens du dimanche 8 décembre

Ph 1.4-11 – Encouragements en prison

Le contexte – L’épître aux Philippiens

Lorsque Paul écrit l’épître aux Philippiens, il est en prison. Lorsqu’il évoque sa situation particulière, il envisage paisiblement sa mort prochaine (Phi 1.20, 23, 2.17) et, en même temps, il évoque son assurance d’être bientôt libéré (Phi 1.19,25, 2.24). Le plus impressionnant est qu’on a le sentiment qu’il envisage l’une ou l’autre issue avec la même sérénité, car le plus important est son attachement au Christ.

Du fond de sa cellule et dans la précarité de sa situation, Paul pourrait se décourager, mais il poursuit son ministère en faisant la seule chose qu’il peut encore : prier pour les Églises qu’il a fondées. Malgré une situation qui pourrait paraître angoissante, il reste dans la reconnaissance : Je rends grâce à mon Dieu toutes les fois que je me souviens de vous.

Que dit le texte ? – La prière de Paul

Le passage proposé à notre méditation souligne que Paul a une vivre affection pour ses interlocuteurs et qu’il ressent à leur égard la tendresse du Christ. De la prière de Paul, nous pouvons dire trois choses.

Paul est dans la joie à cause de la part que prennent les Philippiens à la bonne nouvelle. Il est en prison, mais l’Évangile continue à se répandre par l’intermédiaire de ses enfants spirituels. Aujourd’hui encore, si on regarde comment l’Évangile se répand dans le monde, on peut se réjouir.

Paul est dans la reconnaissance pour la foi des Philippiens, et il les encourage à la persévérance. La reconnaissance et la persévérance sont les deux piliers de la foi. 

Enfin Paul prie pour que l’amour des Philippiens abonde afin qu’ils sachent discerner ce qui est important. L’amour comme critère de discernement. Quand on a une décision à prendre, choisir celle qui a le plus d’amour. C’est cela ce qu’il appelle le fruit de la justice. 

Quel est le lien avec le passage de l’Évangile ? – la prison et le désert

Jean déclare que c’est dans le désert que se prépare le chemin du Seigneur, pour Paul son désert est une prison. L’évangile ne se répand pas dans les palais et les monuments majestueux, mais dans les déserts et les prisons. C’est par le bas qu’il se manifeste. L’expérience de l’histoire est que la répression religieuse n’a jamais empêché la propagation de l’Évangile, bien au contraire.

Comme Paul, Jean finira sa vie en prison où il sera exécuté, mais ces deux hommes ont été des témoins essentiels du Nouveau Testament. 

Le livre d’Esaïe du dimanche 8 décembre

Esaïe 60.1-11 La montée des nations à Jérusalem 

Le contexte – Le troisième Ésaïe 

Le livre d’Ésaïe rapporte des événements qui se déroulent sur plus de deux siècles puisqu’il parle d’un prophète qui a vécu sous le roi Ozias qui a régné jusqu’en 740 avant notre ère qu’il évoque le retour des exilés de Babylone en 530. Il parcourt donc la fin du royaume d’Israël, les derniers rois de Juda, la chute de Jérusalem, la déportation à Babylone et le retour d’exil.

Le chapitre 60 se trouve dans la troisième partie du livre qui évoque le retour des exils. Les livres d’Esdras et de Néhémie ont raconté les difficultés que les exilés ont rencontrées par les habitants de Jérusalem et la façon dont ils ont dû se battre pour reconstruire le temple et les murailles de la ville. 

S’il y a un thème qui parcourt tout le livre, c’est la critique d’une religion purement ritualiste qui multiplie les cérémonies au détriment de la justice. Les premières séquences de la troisième partie du livre appellent à un retour vers Dieu et sa justice qui s’ouvre sur une promesse de relèvement dans le passage de ce dimanche.   

Que dit le texte ? – La gloire de Jérusalem 

Au retour d’exil, Jérusalem n’est qu’une petite ville qui porte encore les séquelles de sa destruction lors de son sac par les Babyloniens.

Pour encourager ses habitants, la troisième partie du livre d’Ésaïe annonce que la ville est appelée à être une lumière pour les nations car sur elle resplendit la gloire du Seigneur.

Ce qui fait la beauté de Jérusalem, ce ne sont ni ses palais, ni ses bâtiments ni le temple qui a été détruit, c’est qu’elle est aimée de Dieu. Le prophète annonce que toutes les nations s’y rendront pour apporter leurs offrandes et la couvrir de richesses. 

Cette prophétie a pour objet d’encourager les habitants de la ville pour les convaincre qu’ils sont au service d’un projet qui les dépasse. 

Quel est le lien avec le passage de l’Évangile ? – La prophétie de Jean

L’évangile de ce dimanche est le commencement du ministère de Jésus avec la proclamation de Jean le baptiseur qui accomplit la prophétie du début de la seconde partie d’Ésaïe : C’est celui qui crie dans le désert : Préparez le chemin du seigneur, rendez droit ses sentiers. Le désert évoque un temps d’appauvrissement intérieur pour retrouver les voies du Seigneur. On peut dire que Jérusalem au retour des exilés était une forme de désert.

De même que le désert de Jean ouvre sur l’évangile de Jésus-Christ, la pauvreté de la ville de Jérusalem va s’ouvrir sur le pèlerinage des nations qui viendront lui rendre gloire. 

Le passage qui suit chez Luc rapporte le baptême de Jésus. C’est quand il est le plus humble en se laissant immerger dans les eaux du baptême qu’il est déclaré fils de Dieu par une voix descendue du ciel. Dans la même optique, c’est quand Jérusalem est au plus bas que le prophète proclame qu’elle sera glorifiée par toutes les nations. 

Production : Fondation Bersier – Regards protestants
Intervenants : Laurence Belling, Antoine Nouis