Le vin, un évangile de la joie

Dans la Bible, le vin traverse les Écritures comme un fil rouge reliant la terre et le ciel, le travail des hommes et la bénédiction divine. Pour le théologien et pasteur Antoine Nouis, il ne s’agit pas d’un simple détail culturel ou rituel, mais d’un symbole spirituel majeur, signe de la vie et de la joie que Dieu désire pour l’humanité.

Le vin apparaît dès les premières pages de la Genèse, avec Noé plantant une vigne après le déluge. Ce premier geste d’un monde qui renaît tourne pourtant au désordre : l’ivresse, la nudité, la honte. Dans un commentaire rabbinique savoureux qu’évoque Antoine Nouis, on dit que Satan aurait aidé Noé à planter la vigne en sacrifiant successivement un agneau, un lion, un singe et un porc – pour rappeler que le vin, selon la mesure, peut transformer l’homme de l’innocence à la déchéance. La sagesse biblique tient dans cet équilibre : un verre réjouit, l’excès détruit.

Mais à l’autre extrémité de la Bible, dans l’Évangile de Jean, le vin devient signe du Royaume. Aux noces de Cana, Jésus transforme l’eau des rites de purification en un vin nouveau, meilleur que le premier. Geste inaugural, presque subversif, qui remplace la religion du devoir par la religion de la joie. Le vin n’y est plus interdit, mais transfiguré : il devient la matière même de la fête, le signe d’une alliance renouvelée.

Du vin de Noé au vin de Cana, puis au vin du dernier repas, Antoine Nouis fait dialoguer les alliances : celle de la création avec Noé, celle de la promesse avec Abraham, celle de la Loi avec Moïse, et enfin la nouvelle alliance scellée dans le pain et le vin. Le vin, dit-il, symbolise « la joie du Royaume », une joie exigeante, liée à la responsabilité et à la mesure.

Dans un monde souvent marqué par la peur, la morosité ou les excès, ce symbole garde toute sa force : le vin devient un évangile miniature, un rappel que la foi n’est pas un carcan mais une ouverture, un appel à la vie, à la gratitude et à la joie partagée.

« Le vin, dans la Bible, n’est pas un piège pour l’homme, mais une promesse de bonheur — à condition de le boire à la mesure de la grâce. » — Antoine Nouis

Production : Fondation Bersier – Regards protestants
Remerciements : Antoine Nouis
Entretien mené par : David Gonzalez
Technique : Paul Drion