Le 10 septembre dernier, Charlie Kirk, influenceur conservateur américain, est assassiné en plein débat public. Ce drame a suscité une onde de choc, mais aussi des réactions inattendues, notamment chez les jeunes croyants. Foi et politique sont-elles compatibles ? Comment impacter la société lorsqu’on est attaché aux valeurs chrétiennes ? Analyse avec Samuel Le Goff, anciennement journaliste et assistant parlementaire, aujourd’hui conseiller en communication et affaires publiques.
L’assassinat de Charlie Kirk est un assassinat politique, ce qui est déjà assez important et grave. À cela s’ajoute le fait que les vidéos ont été diffusées en direct par les réseaux sociaux. L’assassinat d’une personnalité aussi connue et médiatique suscite forcément une onde de choc. Le fait qu’il ait eu lieu dans un contexte politique très clivé aux États-Unis ne pouvait que donner un tel résultat et effectivement provoquer une émotion. Charlie Kirk s’appuyait très clairement sur la Bible. Il citait les évangiles. Il parlait à une communauté qui se sentait représentée, qui était un peu le porte-voix de ce mouvement. Donc c’est tout à fait logique que les milieux chrétiens aient particulièrement réagi.
L’assassinat de Charlie Kirk a provoqué une vague d’émotion, mais aussi une forme d’adhésion à ses valeurs chrétiennes, notamment chez la jeune génération, de plus en plus fervente. Les chiffres montrent une hausse significative de la fréquentation des églises ainsi que des baptêmes, particulièrement chez les jeunes aux États-Unis tout comme en France.
Il y a eu un abandon de la foi chrétienne par toute une génération. Les jeunes qui viennent dans les églises aujourd’hui redécouvrent une foi à leur mesure, qu’ils construisent et qui n’est pas un héritage. C’est quelque chose d’important puisque cela renouvelle complètement le rapport à la foi entre ceux qui la découvrent et ceux qui doivent leur faire une place.
La femme de Charlie Kirk a publiquement pardonné l’assassin de son mari, un geste qui a marqué les esprits. Des valeurs comme le pardon peuvent aujourd’hui encore influencer le débat public et politique.
Le débat public a vraiment besoin d’être apaisé et respectueux, et donc tous les gestes qui permettent de pouvoir se parler sont finalement bons à prendre. Cela dit, ce geste de l’épouse, bien que majeur, ne doit pas être utilisé pour remettre de l’huile sur le feu. Il doit être suivi par l’ensemble des personnes qui se revendiquent de Charlie Kirk pour avoir vraiment du sens.
De plus en plus de jeunes revendiquent leur foi et les valeurs qui en découlent, comme le pardon, la justice ou la solidarité. En quête de sens, ils sont prêts à assumer leur foi et ses valeurs. Ne se contentant plus de vivre leur foi en privé, ils l’expriment dans l’espace public. Dans une société comme la France, où la laïcité est un principe fondateur, cette spiritualité affirmée peut interroger. Cette visibilité religieuse est-elle compatible avec une société laïque comme l’est la France ?
La conception de la laïcité en France est assez étrange, puisque c’est un concept sur lequel tout le monde n’est pas d’accord. Un certain nombre l’instrumentalise comme une interdiction de l’expression religieuse dans l’espace public, ce qui est faux. La laïcité, c’est permettre à toutes les sensibilités de s’exprimer dans l’espace public. Donc, selon moi, les gens sont légitimes à exprimer leur foi dans l’espace public à condition que cela n’exclue pas l’autre et sa foi. C’est à l’État de garantir que tout le monde puisse le faire à égalité et sans favoritisme. Malgré tout, cela suscite des critiques parce qu’il y a une culture française très particulière sur cet aspect de la laïcité.
Les valeurs issues de la foi peuvent impacter positivement la société sans remettre en cause la laïcité. Et cette nouvelle génération croyante, en assumant pleinement sa spiritualité, redéfinit peu à peu le rôle de la foi dans l’espace public.
Heureusement, le principe de laïcité ne s’oppose pas à ce que chacun agisse en fonction de ses convictions. C’est par l’action que l’on peut avoir un impact sur la société. Dans les évangiles, il est bien écrit « c’est à vos gestes qu’on verra que vous êtes des disciples ». Il n’est pas question de proclamation, mais d’action. On peut ensuite expliquer qu’on est motivé par un certain nombre de valeurs et qu’on le fait pour le bien de tous. Donc, pour moi, la laïcité ne doit pas empêcher les gens d’agir au nom de principes religieux, parce qu’on porte sinon atteinte à la liberté.
À partir du moment où des gens, suffisamment nombreux, s’expriment pour dire qu’ils ont une vision particulière de la société, de ce qu’elle doit être, de ce qu’elle doit faire, cela aura un impact. La foi doit rester vivante, elle doit continuer à s’exprimer dans les débats publics. Il faut compter sur la jeune génération pour le faire.
Une émission de Phare FM.