Face au débat parlementaire sur la légalisation de l’aide active à mourir, Marjorie Legendre, pasteure, professeure d’éthique et présidente de la commission d’éthique protestante évangélique, se positionne fermement contre. Défendant une vision humaniste et biblique de la fin de vie, elle appelle à renforcer les soins palliatifs, dénonçant ce qu’elle considère comme une dangereuse dérive sociétale.
« On se pense dans une fausse alternative : soit mourir dans la souffrance, soit l’aide active à mourir », affirme-t-elle. Or, pour Marjorie Legendre, des moyens existent pour accompagner dignement les personnes en fin de vie sans franchir le seuil de l’acte létal. Son opposition repose sur plusieurs fondements.
Premier fondement : la théologie. La vie, affirme-t-elle, est un don de Dieu. Elle cite Deutéronome chapitre 32, qui rappelle que seul Dieu donne et reprend la vie. La volonté de maîtriser la mort serait donc, à ses yeux, une usurpation du rôle divin.
Vient ensuite un argument juridique. La loi, dit-elle, doit structurer le vivre-ensemble, poser des interdits universels, notamment celui de tuer, et non répondre à des exceptions. Rompre ce tabou serait une rupture anthropologique.
Sur le plan social, Marjorie Legendre dénonce un risque majeur : fragiliser les plus vulnérables, en particulier les personnes âgées, handicapées ou isolées, qui pourraient se sentir de trop dans une société obsédée par la performance. Elle évoque ces patients qui disent : « Je suis un poids », et qui, face à une telle souffrance morale, mériteraient écoute et soutien, non l’option d’une mort anticipée.
La pasteure évoque également une rupture dans la vocation médicale. Le rôle du médecin est de soigner ou d’accompagner, pas de provoquer la mort. Autoriser l’aide active à mourir transformerait la médecine, brouillant sa finalité.
Elle met aussi en garde contre des effets collatéraux : une dérive économique qui verrait dans l’euthanasie une option moins coûteuse que les soins palliatifs ; un élargissement inévitable des critères d’éligibilité, comme observé au Canada ; et une mauvaise interprétation de la demande de mort, qui relève souvent d’un cri de détresse, pas d’un choix librement consenti.
Enfin, Marjorie Legendre plaide pour un investissement massif dans les soins palliatifs, bien trop peu développés aujourd’hui. À ses yeux, la dignité humaine passe par la présence, l’écoute et l’accompagnement, pas par un geste létal.
Sa conviction est claire : « Ce n’est pas la mort qu’il faut précipiter, c’est la qualité de l’accompagnement qu’il faut relever. »
Production : Fondation Bersier – Regards protestants
Remerciements : Marjorie Legendre
Entretien mené par : David Gonzalez
Technique : Quentin Sondag, Horizontal Pictures
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