J’étais la semaine dernière en Égypte pour une série de conférences à l’invitation d’une ONG locale, et j’ai pu constater les ravages causés par le terrorisme sur le tourisme. J’étais logé dans un grand hôtel qui était pratiquement vide. Mes hôtes ont tenu à me montrer les pyramides : le nombre de visiteurs occidentaux pouvait se compter sur les doigts d’une main sur un lieu touristique qui attire les foules en temps normal.
Quand on mesure les conséquences économiques des attentats, on comprend que le gouvernement égyptien ait maintenu jusqu’au bout l’hypothèse de la défaillance technique dans le crash du Sinaï. Ce qui aurait pu n’être qu’une catastrophe aérienne devient un cataclysme pour l’économie touristique de la péninsule. Si les tueries contre Charlie et l’hypermarché casher ont fait une vingtaine de morts, les attentats en Tunisie et en Égypte ont en plus porté un coup fatal à la première ressource économique de ces pays, pour des années.
La logique terroriste est à la fois aveugle et diabolique. Aveugle, parce que son but n’est pas de s’en prendre à des prétendus coupables, mais de faire des morts, beaucoup de morts, pour terroriser une population. Elle est diabolique en ce qu’elle cultive le mal pour arriver à ses fins. L’intelligence du mal consiste à croire qu’on peut affaiblir un peuple en le frappant. La réponse au diabolique qui isole et éclate est le symbolique qui unit et rassemble. Balzac a écrit que, dans les grandes crises, un cœur se brise ou se bronze. Les épreuves brisent les peuples affaiblis et endurcissent ceux qui résistent. L’État islamique cherche à étendre son influence par la terreur, mais il ne tiendra pas. La leçon de l’Histoire nous apprend que les pouvoirs tyranniques ne subsistent pas. Si la défaite de l’État islamique est certaine, ses capacités de nuisances demeurent. C’est quand une bête est blessée qu’elle est la plus dangereuse. C’est pourquoi il faut se préparer au pire, mais sans renoncer à l’espérance.