Le journaliste David Métreau et le réalisateur Alban Robert, s’apprêtent à repartir en Ukraine. Après avoir déjà livré des images fortes du pays en guerre, ils travaillent désormais sur deux projets ambitieux qui interrogent autant la foi que la violence.

Pour David Métreau, la réflexion part d’un parallèle : l’Empire romain et son usage politique de la religion, de Constantin jusqu’à l’institutionnalisation du christianisme. Aujourd’hui, l’« empire russe » reprendrait des mécanismes similaires. Vladimir Poutine, appuyé par le patriarche Kirill, convoque l’imaginaire de la guerre sainte et oppose symboliquement les forces du bien et du mal. Le projet de documentaire vise à montrer comment le religieux peut être instrumentalisé par le pouvoir, mais aussi à donner la parole aux Ukrainiens sur la façon dont ils perçoivent cette rhétorique.

Cette démarche pose une question plus large : quels dangers recèle le nationalisme chrétien ? En Russie, il nourrit la propagande guerrière ; en Ukraine, certaines Églises participent à l’effort national, parfois au risque d’un glissement similaire. David Métreau veut documenter ces tensions, tout en ouvrant la réflexion sur les dérives du religieux ailleurs dans le monde, aux États-Unis comme en Europe.

Alban Robert, lui, choisit une autre focale. Son projet s’ancre dans le Donbass, autour de Kramatorsk et Pokrovsk, territoires meurtris et proches du front. Dans ce décor sombre, il veut révéler la lumière : celle des volontaires, ukrainiens ou venus de l’étranger, qui se dévouent sans condition. À travers des figures comme Sacha, un jeune de 21 ans engagé dans l’aide humanitaire, il entend filmer la résilience et la générosité d’un peuple.

Tous deux insistent sur une même conviction : l’Ukraine ne se résume pas aux ruines et aux combats. C’est un pays de culture vivante, où la guerre a libéré une énergie artistique et civique nouvelle. Métreau invite à « rencontrer des Ukrainiens », à découvrir leur humour, leur autodérision et leur hospitalité. Robert veut montrer « ce qu’il y a de plus beau, l’amour gratuit qui surgit au cœur du pire ».

Au croisement de la foi, de la politique et de l’humanité, leurs futurs documentaires cherchent à dévoiler une autre Ukraine : blessée mais debout, menacée mais porteuse d’espérance.

Production : Fondation Bersier – Regards protestants
Remerciements : David Métreau, Alban Robert
Entretien mené par : David Gonzalez
Technique : Horizontal Pictures, Alban Robert