27.11.2022 : Matthieu 24.37-44 – Nul ne connaît l’heure

La venue du Christ, aujourd’hui

Introduction

Nous sommes le premier dimanche de l’avent, et l’année liturgique commence par un texte qui parle de veille et de l’importance de se tenir prêt.

Avant d’entrer dans le détail du texte, encore une question sur le lectionnaire. Le verset 37 commence par la particule en effet, il est donc une explication du verset précédent. Pourquoi ne pas l’avoir retenu alors que ce qu’il dit est essentiel : pour ce qui est du jour et de l’heure, personne ne les connaît.

Pourquoi le texte ne commence-t-il pas au verset 36 ?

Points d’exégèse

Attention sur deux points.

L’avent et la veille

Tous les ans, le temps de l’avent propose à notre méditation des textes qui nous invitent à la veille et à la vigilance. Cela nous donne le sens de ce temps liturgique. Commencer l’année par l’avent, c’est nous réveiller de notre torpeur, pour que nous ne cessions d’attendre la venue du Christ dans notre monde et dans nos journées. Aujourd’hui, je peux être amené à rencontrer le Christ : suis-je prêt ?

L’avent et la spiritualité

Pourquoi sommes-nous appelés à la prière ? Pour changer le monde ? L’efficacité de la prière ne nous appartient pas. Sûrement pour nous changer nous-mêmes, pour lutter contre la peur et l’habitude. Etty Hillesum a écrit, alors qu’elle était menacée par les nazis : « Les menaces extérieures s’aggravent sans cesse et la terreur s’accroît de jour en jour. J’élève la prière autour de moi comme un mur protecteur plein d’ombre propice, je me retire dans la prière comme dans la cellule d’un couvent et j’en ressors plus concentrée, plus forte, plus ramassée. » 

Pistes d’actualisation

1er thème : Le signe de Noé

Le texte qui précède notre passage est la parabole du figuier qui nous invite à prêter attention aux signes des temps : ses jeunes pousses annoncent l’arrivée de l’été. Ce texte nous dit qu’au temps de Noé les hommes n’ont pas vu la catastrophe venir.

Cette tension est l’illustration de ce qu’on appelle l’effet ketchup. On tape sur le cul de la bouteille et rien de sort, et tout à coup toute la bouteille s’écoule. On sait que ça arrivera, mais on ne peut pas dire quand.

Ce principe s’applique particulièrement aux effets du réchauffement climatique.

2e thème : L’un sera pris, l’autre pas

De deux hommes, de deux femmes, l’un sera pris et l’autre pas, car l’un sera prêt et l’autre pas. Le sens de cette comparaison n’est pas de nous faire peur, mais de nous exhorter à la vigilance. Dans la tradition monastique, nous trouvons ce qu’on a appelé la meditatio mortis qui consiste à se projeter sur son lit de mort pour mettre de l’urgence dans notre quotidien. Si je savais que je devais mourir ce soir, que ferai-je ? Ce que je ferais, je dois le faire maintenant. Il est urgent de se convertir, il est urgent d’aimer, il est urgent de se convertir, il est urgent de mettre de l’essentiel dans nos journées.

3e thème : Le fils de l’homme viendra à l’heure que vous ne pensez pas

Le premier verset dit que personne ne connaît le jour ni l’heure et le dernier répète cette affirmation en disant que le fils de l’homme viendra à l’heure qu’on ne pense pas.

Dans les Actes des Apôtres, lorsque les disciples demandent à Jésus quand il établira son royaume, Jésus leur répond qu’ils seront témoins en Judée, en Samarie et jusqu’aux extrémités de la terre. Une façon de dire : la bonne question n’est pas quand viendra le royaume, mais comment être témoin aujourd’hui.

La venue du fils de l’homme n’est pas une date de l’histoire mais un événement quotidien. Cette déshistoricisation de la venue du Christ nous invite à l’accueillir dans notre temps. Il est inutile de se demander quel jour le Christ viendra, il est plus utile de se poser la question de savoir si on est prêt à l’accueillir aujourd’hui.

Une illustration : La vertu de l’attente

À propos de l’attente de Dieu, un commentaire rabbinique s’interroge sur le verset dans lequel Dieu maudit le serpent de la Genèse pour avoir induit le premier couple humain en tentation. Il lui dit : Parce que tu as fait cela, tu seras maudit entre tous les bestiaux et toutes les bêtes des champs ; tu marcheras sur ton ventre et tu mangeras de la poussière tous les jours de ta vie (Gn 3.14). Le serpent est condamné à manger de la poussière ; or la poussière est inépuisable sur la surface de la terre. Le commentaire se demande quelle est la nature de la malédiction : en quoi est-ce une punition d’être condamné à manger ce qui est inépuisable ? Il répond que la condamnation du serpent réside dans le fait qu’il n’aura plus jamais faim, plus jamais soif. Jamais il n’attendra, jamais il ne sera en quête, jamais il ne connaîtra le sens du mot espérer.

Production : Fondation Bersier – Regards protestants
Intervenant : Antoine Nouis