Notre critique ciné Jean-Luc Gadreau s’intéresse à la représentation de Jésus au cinéma. Une réflexion particulièrement pertinente pendant le Carême, qui précède Pâques.

Coup de projecteur sur les défis et les interprétations artistiques du personnage de Jésus au cinéma, un sujet qui a fasciné les cinéastes et le public.

Tout commence par une ancienne question de Grégoire de Nysse, un père de l’Église, qui se demande pourquoi, si le Fils de Dieu s’est fait homme, son image ne devrait pas être représentée. Cette question a motivé d’innombrables artistes à visualiser le divin rendu visible, une entreprise que le cinéma a embrassée avec plus de 300 films mettant en scène le Christ.

L’adaptation du Nouveau Testament au cinéma présente des défis uniques, notamment celui d’élaborer un récit qui respecte le matériau d’origine tout en captivant le public moderne. Contrairement aux autres formes d’art, les films doivent naviguer entre les complexités de la narration, du développement des personnages et de l’exactitude historique. Les Évangiles, qui n’ont pas été écrits comme des récits de fiction ou des comptes rendus journalistiques, posent des difficultés particulières aux scénaristes qui souhaitent donner vie à l’histoire de Jésus.

La représentation de Jésus par des acteurs ajoute une couche de complexité supplémentaire, exigeant non seulement une ressemblance physique (un point discutable étant donné l’absence d’images contemporaines de Jésus), mais aussi une incarnation profonde de son esprit et de ses enseignements. La transition vers les films parlants a introduit la voix de Jésus au cinéma, avec des films remarquables comme « Golgotha » de Julien Duvivier (1935) qui ont créé des précédents dans la manière dont les paroles de Jésus sont transmises à l’écran.

Les dialogues dans les films sur Jésus ont évolué, passant d’une stricte adhésion aux textes de l’Évangile, comme dans « L’Évangile selon Matthieu » (1964) de Pier Paolo Pasolini, à l’incorporation des langues de l’époque, comme l’araméen et le latin, dans « La Passion du Christ » (2004) de Mel Gibson. Cette approche confère une authenticité historique mais crée également une distance qui peut freiner l’engagement du public.

Certains cinéastes ont opté pour une représentation indirecte de Jésus, en se concentrant sur les personnages qui le rencontrent, contournant ainsi les difficultés de la représentation directe. Cette technique est évidente dans des classiques comme « Ben-Hur » et « The Robe », ainsi que dans des films plus contemporains qui humanisent Jésus par des dialogues familiers ou le dépeignent de manière symbolique pour explorer la résonance universelle de son histoire.

Certains films ont réussi à relever ces défis, en présentant Jésus de manière à la fois respectueuse et innovante, encourageant les spectateurs à réfléchir à l’impact durable de son histoire dans le cinéma.

Production : Fondation Bersier – Regards protestants
Réalisation : Anne-Valérie Gaillard
Chroniqueur : Jean-Luc Gadreau