Prédication de James Woody au temple de la rue de Maguelone (Montpellier) dimanche 28 janvier 2024 https://espritdeliberte.leswoody.net/…
Chers frères et sœurs, c’est ce verset biblique qui est à l’origine de la formule latine « Deus absconditus ». La traduction de ce verset, dans la Vulgate, donne ceci : vere tu es Deus absconditus Deus Israhel salvator – « vraiment tu es Dieu, un Dieu abscons, sauveur d’Israël ». Ceux qui sont familiers du philosophe Pascal et qui ont lu ses Pensées, auront croisé des réflexions à ce sujet. Cette traduction latine aura probablement jeté bien des croyants dans une forme de trouble préjudiciable, laissant imaginer que Dieu soit abscons. Cela favorise l’idée selon laquelle Dieu serait incompréhensible, que la religion serait un « truc » trop compliqué et la théologie quelque chose de profondément obscur dont il n’y a pas lieu de s’intéresser. Voyons avec le prophète Ésaïe, qu’il n’est pas du tout question de cela.
Dieu n’est pas caché, il se cache
Pour bien comprendre ce que le prophète Ésaïe veut nous expliquer, il convient, tout d’abord, de bien traduire ce verset clef. Le verbe SaTaR signifie caché et il est conjugué à une forme grammaticale qui intensifie le verbe et qui indique que l’action est faite pour soi-même – la conjugaison est au mode intensif réfléchi. Ainsi, Dieu n’est pas caché, il se cache. C’est en quelque sorte un acte délibéré de sa part. Il n’est pas caché parce que beaucoup d’autres choses le rendraient invisible. Il n’est pas non plus caché parce que nous aurions bien d’autres choses en tête et que nous ne le voyons plus (cela peut arriver, mais le texte ne parle pas de cela). Dieu se cache, délibérément. Et pour bien insister, le rédacteur a utilisé un verbe à la forme intensive que nous pourrions peut-être rendre à l’oral par « Dieu se planque ». Il fait vraiment exprès de se cacher : il se planque comme un criminel essayant d’échapper à la justice ou comme un témoin gênant qui ne doit pas être trouvé par les assassins lâchés à ses trousses. Comment comprendre que Dieu se cache ? Pourquoi se cache-t-il ? C’est tout l’intérêt de ce passage biblique qu’il faut replacer dans son contexte, celui de l’histoire biblique du salut, puisque ce verset parle non seulement du Dieu qui se cache (‘El Mistatar), mais aussi du Dieu qui est le sauveur d’Israël.
Lorsque la face de Dieu est cachée
Ce n’est pas le narrateur qui dit que Dieu se cache. Ce sont les peuples qui vont se prosterner devant l’Éternel qui disent cela de lu. Il ne faut donc pas prendre cette déclaration pour un énoncé théologique qui tient lieu de vérité dernière sur Dieu. Cette phrase, mise dans la bouche de gens qui se soumettent à Dieu est une confessi Allons un peu plus loin dans l’observation de qui parle et des circonstances de cette affirmation du Dieu qui se cache. Égyptiens, Kushites (Éthiopiens) et Sabéens (même zone géographique) sont désormais dans les chaînes et ils s’interrogent sur leur nouvelle situation, comme les Hébreux peuvent l’avoir fait au moment de la chute de Jérusalem face à Babylone, lorsque les Hébreux ont été réduits à l’état d’esclaves en emmenés vers Babylone. Où était Dieu quand Nabuchodonosor assiégeait Jérusalem ? Où était Dieu quand la ville a été prise et le temple détruit ? Où était Dieu quand une partie de la population a été déportée ? L’expérience du peuple hébreu est celle d’un Dieu qui se cache, qui n’intervient pas, qui n’a rien fait pour empêcher la chute de Jérusalem. L’expérience du Dieu qui se cache, c’est l’expérience de la face de Dieu qui nous serait cachée. Non seulement Dieu est incompréhensible – c’est la face cachée de Dieu – mais Dieu ne se montre pas, il n’est pas visible dans le cours de l’histoire – donc il se cache. Si Dieu ne se cachait pas, on le verrait à l’œuvre. Il serait à côté des pauvres qui manquent de tout. Il serait sur les champs de bataille pour instaurer la paix. Il serait dans les chambres d’hôpital avec ceux qui sont malades, ceux qui souffrent etc. Mais on ne voit Dieu nulle part. On ne le voit pas là où on l’attendrait. Il n’est manifestement pas là où il faudrait. L’expérience des croyants est que Dieu se cache. Dieu ne répond pas présent pour faire face aux problèmes. Dieu est irresponsable. Bien des psaumes disent ce sentiment d’absence de Dieu, ce sentiment d’abandon par Dieu. L’expérience de Dieu est d’abord l’expérience du silence de Dieu et de son invisibilité dans notre existence…