Le théologien Antoine Nouis se penche sur la signification spirituelle du carême, en particulier pour ceux qui ne sont pas de tradition catholique, comme les protestants. Si le protestantisme a historiquement rejeté le carême comme une forme d’auto-mortification en vue du salut – un rejet que le théologien Antoine Nouis considère comme justifié -, il prévient également qu’en agissant de la sorte, il a peut-être écarté une pratique spirituelle précieuse.
Le carême, explique-t-il, n’est pas simplement une saison rituelle, mais un outil liturgique conçu pour attirer l’attention du croyant sur un aspect particulier de la foi. Les 40 jours qui précèdent Pâques rappellent le cheminement du Christ vers Jérusalem, qui a culminé avec sa crucifixion. Traditionnellement, le premier dimanche de Carême est centré sur le passage de l’Évangile relatant la tentation de Jésus dans le désert, un moment qui suit son baptême et son affirmation divine en tant que « Fils bien-aimé » de Dieu.
Le désert, lieu de chaleur, de froid et de solitude, devient le théâtre de la confrontation de Jésus avec le diable, une rencontre riche en significations symboliques. Le diable, le « diviseur », remet en question l’identité et la vocation de Jésus à travers trois tentations clés : l’attrait de la consommation (transformer les pierres en pain), la séduction du pouvoir (dominer les nations) et le désir d’admiration (un saut miraculeux dans le temple). Dans chaque cas, Jésus résiste, affirmant sa mission ancrée non pas dans la domination ou le spectacle, mais dans l’humilité et le service.
Antoine Nouis souligne que ces tentations reflètent les luttes modernes : la poursuite incessante de la richesse, du pouvoir et de la séduction. Il avertit que ces forces façonnent souvent nos vies et infiltrent même l’Église, qui a parfois compromis sa mission en succombant aux tentations mêmes que Jésus a rejetées.
En fin de compte, le Carême est présenté comme une saison non pas d’autopunition, mais d' »ascèse lucide » – un temps pour examiner notre relation avec ces tentations, pour les nommer, les affronter et, comme le Christ, les rejeter. C’est un appel à l’honnêteté spirituelle et au renouveau, tant pour les individus que pour l’Église.
Production : Fondation Bersier – Regards protestants
Remerciements : Antoine Nouis
Technique : Horizontal Pictures