L’héritage du prophète : changement et transformation

Omero Marongiu-Perria est l’auteur de l’ouvrage « En finir avec les idées fausses sur l’islam et les musulmans », abordant notamment l’idée fausse selon laquelle l’islam est une religion impossible à réformer. Selon lui, affirmer cela revient à dire qu’un prophète n’apporte aucun changement, ce qui est contradictoire avec la perspective monothéiste. Le rôle du Prophète Mohammed, comme celui de tout prophète biblique, est d’apporter une transformation majeure de la société, en ouvrant des perspectives individuelles et sociales qui bouleversent les structures existantes.

Dire qu’une religion ne peut pas se réformer revient à nier les ressources internes présentes dans les textes religieux et la capacité des fidèles à agir pour une évolution. Il compare cette situation à celle du christianisme au 12e siècle, où l’idée de réforme aurait pu sembler tout aussi improbable. Cependant, il reconnaît qu’il existe actuellement un déficit dans la production intellectuelle, l’organisation politique et économique dans de nombreux pays musulmans, mais cela ne signifie pas que l’islam est incapable de se réformer.

La notion de réforme dans l’islam

La notion de réforme dans l’islam peut être comprise à travers le terme coranique « Islah », qui signifie assainir, réparer et rendre meilleur. Cette réforme concerne non seulement les mœurs et les valeurs spirituelles, mais aussi l’organisation sociale pour créer une société plus juste. L’islam a évolué comme toute autre religion, et la problématique actuelle n’est pas la fermeture des portes de l’interprétation, mais le raidissement des institutions religieuses face à la modernité.

Les institutions religieuses perçoivent souvent la démocratie comme une menace, associée à des mœurs perçues comme perverties. Les régimes politiques en place exploitent cette peur, affirmant que la démocratie mènerait à la dépravation morale. Cette manipulation politique crée un environnement où le discours religieux est utilisé pour justifier le statu quo et résister aux changements sociétaux nécessaires.

Les défis internes et externes

La véritable problématique n’est pas l’islam en soi, mais le projet de société défendu dans un contexte donné, influencé par des facteurs historiques, économiques et politiques. Les discours religieux endogènes, notamment ceux des mouvements islamistes et du wahhabisme saoudien, ont propagé des visions rétrogrades de l’islam, exacerbant le repli sur soi et la peur du changement.

Cependant, des signes de changement apparaissent. Certains pays du Golfe, malgré leur richesse pétrolière, commencent à évoluer et à s’ouvrir à de nouvelles perspectives. L’auteur exprime l’espoir que ces dynamiques internes puissent finalement conduire à une réforme plus profonde et positive de l’islam.

En définitive, Omero Marongiu-Perria reconnaît que la réforme religieuse est un processus long et complexe, rappelant que le christianisme a également mis des siècles à intégrer les sciences humaines et à évoluer. Le Concile Vatican II, par exemple, n’a eu lieu qu’il y a environ soixante ans, marquant un tournant dans l’histoire de l’Église catholique romaine pour s’adapter aux réalités contemporaines. De même, l’islam a le potentiel de se réformer et de s’adapter aux défis modernes, à condition que les voix progressistes puissent se faire entendre et que les peurs infondées soient surmontées.


Production : Fondation Bersier – Regards protestants
Entretien mené par : Antoine Nouis
Réalisation : Horizontal pictures
Intervenant : Omero Marongiu-Perria