Depuis l’attentat d’Arras, le débat sur l’immigration prend de l’ampleur en France. Et l’attaque terroriste pourrait bien avancer le projet de loi immigration du Gouvernement, dans un contexte de psychose.
Le terroriste présumé, Mohammed Mogouchkov, était un islamiste radicalisé âgé de 20 ans, originaire de la région d’Ingouchie, une république russe dans le Caucase. Il était fiché S, ce qui signifie que son nom figurait dans le fichier des signalements pour la prévention et la radicalisation à caractère terroriste.
Il n’était pas pour autant expulsable, selon les informations du ministère de l’Intérieur. Débouté du droit d’asile, Mohammed Mogouchkov était toutefois protégé par le droit français car il était arrivé sur le territoire avant ses 13 ans. Il n’avait pas non plus de casier judiciaire.
Un projet de loi avancé à décembre ?
Samedi 14 octobre, Gérald Darmanin, le ministre de l’Intérieur, s’est rapidement emparé de la question lors d’un point presse, comme le relate Public Sénat. « Il y a 4 000 étrangers délinquants que je ne peux pas expulser du territoire national alors que je le veux, parce que la loi l’empêche, déclarait-il. Soit parce qu’ils sont mariés en France, soit parce qu’ils ont eu des enfants en France, soit parce qu’ils sont arrivés avant 13 ans sur le territoire de la République, quand bien même ils auraient commis leur acte après 18 ans. »
Le ministre de l’Intérieur martèle qu’une réponse existe, dans le projet de loi sur l’immigration qu’il tente de faire voter depuis l’automne 2022. Le Monde rapporte qu’après une nouvelle réunion de sécurité à l’Élysée, Gérald Darmanin a rappelé l’article 10 du projet permettant l’expulsion d’étrangers condamnés, sous des conditions plus strictes, et l’article 13, qui permet d’expulser un étranger non condamné, sur des accusations de « non-respect des valeurs républicaines ».
Mohammed Mogouchkov, placé en garde à vue début 2023 et accusé d’avoir frappé sa mère, aurait donc pu être expulsé avec ce projet de loi immigration, selon le ministre de l’Intérieur. Le texte vise, en particulier, à accélérer les procédures d’expulsion pour les personnes en situation irrégulière en mettant l’accent sur les étrangers auteurs d’actes de délinquance.
Un projet de loi avancé à décembre ?
Le Monde rappelle que, quelques mois auparavant, le texte crispait bien davantage sur la question des métiers en tension. Le Gouvernement projetait de régulariser les travailleurs étrangers dans certains secteurs en proie à de graves difficultés de recrutement. Mais l’aile droite du Parlement menaçait de voter contre le projet de loi, si cet article était voté. Son opposition ferme à cette mesure a contribué à retarder les débats à l’Assemblée.
L’attentat d’Arras bouleverse désormais le débat public. L’examen du texte au Sénat, qui devait débuter le 6 novembre, pourrait être reporté au 10 décembre, avant d’arriver à l’Assemblée nationale, selon le cabinet de Yaël Braun-Pivet, la présidente Renaissance de l’Assemblée.
Les Républicains se trouvent désormais dans une situation embarrassante, pressés de se mettre en accord avec Renaissance pour adopter le projet de loi. Mais au Parlement, la difficulté pour les partis de trouver un terrain d’entente ne garantit pas d’avancée rapide sur la question.