Après les gardiens de prisons et policiers pris en otages et les écoles et magasins fermés, l’Equateur vient de connaître un nouvel épisode de violence inédit. Mardi 9 janvier, des hommes armés ont fait irruption sur le plateau d’une télévision publique à Guayaquil, prenant en otage des journalistes et d’autres employés présents. L’attaque est diffusée en direct pendant de longues minutes malgré l’extinction des lumières sur le plateau. “Ne tirez pas, s’il vous plaît, ne tirez pas !”, crie une femme tandis que les assaillants, armés de pistolets et de fusils à pompes, tirent des coups de feu tout en frappant les personnes terrorisées. Les hommes, qui sont soit encagoulés soit à visage découvert, se filment, lorsqu’ils ne font pas avec leurs doigts les signes de reconnaissance des bandes criminelles liées au narcotrafic.  

Ce nouvel événement est le point culminant d’une crise sécuritaire depuis que l’ennemi numéro 1 du pays, un dangereux chef de gang nommé Adolfo Macias, surnommé “Fito”, s’est évadé de prison il y a quelques jours. Chef des “Choneros”, ce gang d’environ 8 000 hommes est devenu le principal acteur du trafic de drogue florissant en Equateur. Soupçonné d’être impliqué dans l’assassinat d’un des principaux candidats à la présidentielle en aout 2022, “Fito” s’est évadé de manière spectaculaire du complexe de Guayaquil, où il purgeait depuis 2011 une peine de 34 ans de privation de liberté pour crime organisé, trafic de stupéfiants et meurtre. Suite à cette évasion, plusieurs mutineries et prises d’otages ont eu lieu dans plusieurs prisons. Dans un communiqué cité par 20 Minutes, l’administration pénitentiaire (SNAI) a recensé 139 de ses personnels toujours retenus en otage dans cinq prisons du pays.  

L’état de “conflit armé interne” 

Le président Daniel Noboa, qui est le plus jeune président de l’Equateur, a par la suite déclaré son pays en état de “conflit armé interne” et ordonné “la neutralisation” des groupes criminels impliqués dans le narcotrafic selon un décret publié mardi. Ainsi, il dit “reconnaitre l’existence d’un conflit armé interne” et ordonne “la mobilisation et l’intervention des forces armées et de la police nationale pour garantir la souveraineté et l’intégrité nationale contre crime organisé, les organisations terroristes et les belligérants non étatiques.” Le président a également ordonné la “neutralisation” de tous ces groupes criminels.  

Mardi, le secrétaire à la communication de la présidence Roberto Izurieta a pris la parole : “Ce sont des jours extrêmement difficiles” sachant que l’exécutif a pris “la décision importante de lutter de front contre ces menaces terroristes.” Face à ce déferlement de violence qui résume bien la situation dans laquelle se trouve l’Equateur depuis quelques années, le gouvernement a déploré “un niveau d’infiltration” des groupes criminels au sein de l’Etat “très élevé” tout en qualifiant le système pénitentiaire équatorien “d’échec”.  

RFI indique que la situation inquiète l’international : le Pérou a déclaré sa frontière Nord en état d’urgence et a déployé ses forces armées pour essayer de bloquer le passage éventuel de délinquants fuyant la police et les forces armées équatoriennes. La Chine a quant à elle interrompu les activités consulaires de son ambassade ainsi que celles de son consulat. Du côté des Etats-Unis, le gouvernement se dit “extrêmement préoccupés » et affirme être “prêts à fournir de l’assistance”.