La médiation, volontaire et confidentielle, offre aux deux parties une occasion d’apaisement et de réparation. Serge Legros est intervenant social, formé à la médiation, dans un service d’actions restauratrices et éducatives bruxellois.

Le système de justice des mineurs belge a été réformé au début des années 2000. Avec la loi relative à la protection de la jeunesse, la prise en charge des mineurs ayant commis un fait qualifié d’infraction et la réparation du dommage commis par ce fait, il a souhaité mieux prendre en considération les victimes. L’offre restauratrice, déclinée sous forme de médiation, leur permet de s’exprimer en dehors d’une action civile. Les deux parties ont le choix d’accepter ou de refuser la médiation. Elle est un processus libre et volontaire, fondé sur la confiance. Avant d’organiser un échange (direct ou indirect), nous devons être sûrs que les attentes des parties sont susceptibles de se rencontrer. Auteur et victime peuvent, à tout moment, interrompre le processus.

Apaiser les tensions

La médiation prend du temps. Si auteur et victime acceptent de s’engager, nous les rencontrons individuellement plusieurs fois pour les préparer. L’entrevue finale, en présence ou en visioconférence, dure entre une heure et une heure trente, davantage s’il y a plusieurs auteurs. Nous posons un cadre neutre et bienveillant, cernons les attentes respectives, anticipons les questions, les réactions. L’objectif est d’apaiser les tensions. Nous sommes deux médiateurs ou médiatrices, nous veillons à ce qu’aucune pression ne soit exercée, pour garantir l’authenticité du processus.

Lors des entretiens préparatoires, si les attentes se révèlent trop différentes, on arrête. Il arrive que le jeune accepte la médiation sous la pression de ses parents ; quand c’est le cas, la démarche n’est pas authentique et risque d’aboutir à un échec. Pour l’auteur, entrer en médiation implique une reconnaissance de la faute et l’expression de regrets, la formulation d’excuses, une demande de pardon dans le meilleur des cas. Il essaie d’expliquer les raisons de son geste Côté victime, la médiation permet l’expression de toutes les questions restées en suspens. Avoir des explications est nécessaire pour pouvoir se reconstruire. Les médiations liées aux faits de mœurs, ou associées à des violences extrêmes, sont plus délicates mais restent néanmoins possibles.

Une décision courageuse

Accepter la médiation est toujours courageux pour les deux parties. C’est un événement traumatique qui les a réunies. La démarche est difficile, chargée en émotions, mais procure un soulagement. On peut humaniser l’autre, exprimer des sentiments, tourner la page. Parfois, des aboutissements sont étonnants, des victimes offrent aux jeunes de travailler dans leur société. Enlever les tags qu’on a faits, réparer les scooters qu’on a cassés… c’est une démarche éducative. Les magistrats proposent de plus en plus souvent des médiations. Les jeunes que nous accueillons ont été arrêtés mais peuvent rester dans leur milieu. Je crois que la médiation devrait être proposée systématiquement. Même si elle n’est pas une garantie. J’ose espérer que ces jeunes qui sont passés par la médiation ne récidiveront pas. Ils ont pris conscience de la gravité des faits, ont accepté d’être confrontés à la victime dont ils ont parfois détruit la vie, de la regarder dans les yeux. Ce n’est pas rien. Ils ont compris la leçon.

Propos recueillis par Brigitte Martin