La hausse des émissions mondiales de CO2 n’est pas près de diminuer… C’est la conclusion de ce rapport inquiétant issu du Global Carbon Project, un réseau international de recherche sur le carbone. Dans le cadre de la COP28, cette organisation présentera ce mardi un bilan des émissions de CO2 causées par les énergies fossiles, comme rapporté par nos confrères des Échos. S’il s’agit d’une première estimation sur l’année en cours, les conclusions ne sont pas brillantes : la hausse s’élèverait à 1,1 %, un chiffre plus conséquent que celui de l’année dernière. Une inquiétude que partage Philippe Ciais, chercheur au Laboratoire des sciences et du climat et de l’environnement (du CEA et du CNRS) et l’un des coauteurs de l’article : “Celles-ci dépassent de 1,4 % leur niveau de 2019, pré- Covid”. Il résume pour le Figaro : “Nous allons vers le mur, en appuyant un peu moins fort sur l’accélérateur, mais toujours sans mettre le pied sur la pédale de frein.”
Aucun signe d’une diminution rapide nécessaire
L’un des objectifs de l’accord de Paris, qui consisterait idéalement pour les États à limiter le réchauffement à 2 °C, voire à 1,5 °C, d’ici 2100, risque donc de ne pas être tenu. Selon les derniers calculs, si cette situation se maintient, il faudra quinze ans pour atteindre 1,7 °C, et vingt-huit ans seulement pour franchir cette limite des 2 °C. Les experts sont formels : il est donc urgent de réduire les émissions de gaz à effet de serre, et plus précisément celles liées à la combustion du charbon et du pétrole. Malgré l’ampleur de la situation, les auteurs de l’étude expliquent ne voir “aucun signe de la diminution rapide nécessaire”. Pierre Friedlingstein, chercheur au Global Systems Institute à l’université d’Exeter (Grande-Bretagne) précise toujours au Figaro : “hélas, l’action visant à réduire les émissions de carbone issues des combustibles fossiles reste terriblement lente.”
Un décalage entre les grands émetteurs
Le bilan pointe également du doigt les larges différences entre les différents pays émetteurs. La Chine et l’Inde, qui partagent à eux deux plus de 15 milliards de tonnes de CO2, ont eu une progression assez conséquente, avec des hausses respectives de 4 % et de 8,2 % cette année. Pour la Chine, cette nette augmentation s’explique surtout par une reprise économique tardive après les fermetures dues au Covid, tandis qu’au niveau de l’Inde, il s’agit d’une hausse des émissions liées au charbon. Cette conclusion alarme fortement Philippe Ciais, qui précise pour Les Échos, “qu’avec cette hausse de l’Inde de 8 %, les émissions du pays vont dépasser celle de l’Union européenne cette année. Si cette tendance se poursuit dans la décennie à venir, on risque de voir les émissions grimper à nouveau très fortement.”
De leur côté, les États-Unis et l’Union européenne font bonne figure en faisant partie des “28 pays représentant 26 % des émissions qui ont baissé leurs émissions tout en affichant une croissance économique”, indique Philippe Ciais. Malgré tout, Antoine Halff, cofondateur de la société d’intelligence climatique Kayrros et chercheur à l’université Columbia (États-Unis), tempère pour le Figaro : “Les États-Unis, qui sont redevenus le premier pays producteur d’énergies fossiles au monde, envisagent une diminution des émissions de gaz à effet de serre, mais sans réduire leur production d’hydrocarbures.”