Les Jeux olympiques de Paris 2024 vont-ils entraîner le déplacement massif de sans-abri ? Le Gouvernement souhaite inciter des milliers de SDF de la région parisienne à quitter la région. Début avril, l’exécutif a demandé aux préfets de créer des « sas d’accueil temporaires régionaux » dans toutes les régions pour « désengorger les centres d’hébergement » d’Île-de-France.
Le Gouvernement suit l’exemple de plusieurs pays qui ont déjà appliqué la méthode à l’approche de grands événements mondiaux, comme le Brésil ou le Royaume-Uni.
Alors que la décision française crée la polémique, des sans-abri franciliens seront déplacés en Bretagne dès la semaine du 30 mai, indique France 3 Bretagne. Ils seront logés temporairement, car l’hôtel social de Montgermont a été choisi pour servir de « sas d’accueil » aux personnes à la rue, comme le confirme l’association Aurore, spécialisée dans l’accompagnement social.
Ces personnes sans domicile fixe devaient d’abord être accueillies à Bruz, en Ille-et-Vilaine. Mais le terrain désigné par la préfecture ne permettait pas un accueil « dans des conditions dignes », selon le maire de la commune, Philippe Salmon. Il dénonçait la pollution des lieux « par des hydrocarbures et des métaux lourds ».
Une urgence sociale ?
Les sans-abri sont déplacés de Paris sur la base du volontariat. Ils seront accueillis dans un bâtiment de trois étages, longtemps tenu par l’hôtel Formule 1. Cinquante chambres seront mises à disposition, pour des familles et des personnes seules, avec un dispositif de roulement. Les sans-abri seront accueillis toutes les trois semaines pour laisser la place à d’autres personnes. Ils seront ensuite réorientés vers des associations locales.
Le ministre du Logement, Olivier Klein, affirmait fin mai que ces déplacements massifs n’étaient pas liés aux JO. Il évoque une urgence sociale, car sur les 200 000 personnes hébergées chaque soir, la moitié sont en Île-de-France, selon ses chiffres.
Mais la méthode du Gouvernement rappelle d’autres opérations mises en place par d’autres pays à l’approche d’événements mondiaux. Le Télégramme rappelle, par exemple, que la Ville de Rio de Janeiro au Brésil avait été accusée de déplacer de force des sans-abri, pendant qu’elle organisait la Coupe du monde de 2014 et les JO de 2016. L’Onu avait alerté le Brésil sur la tentation d’« épuration sociale » qui allait à l’encontre des droits de l’homme. Des équipes municipales passaient alors, avec un camion à ordures, pour jeter les affaires personnelles des SDF.
Des méthodes similaires dans le passé
Toujours d’après Le Télégramme, la méthode est ancienne et peut donner aux villes organisatrices un prétexte pour cacher la misère. Aux Jeux olympiques de 1988, la Capitale de la Corée du Sud, Séoul, arrêtait et expulsait des sans-abri et des marchands ambulants au nom de l’« embellissement » de la ville. Puis, en 2004, Athènes déplaçait des centaines de Roms au prétexte que les autorités avaient besoin de terrain pour les Jeux olympiques en Grèce.
Enfin, en 2010, l’Afrique du Sud a utilisé ce procédé pour la Coupe du monde de football. Le média NPR explique que la police du Cap arrêtait des sans-abri et les relogeait, dans certains cas, à la périphérie de la ville.
Raquel Rolnik, rapporteure spéciale des Nations unies sur le droit à un logement convenable, se préoccupait alors du fait que de tels « méga-événements » conduisent souvent à l’expulsion forcée de personnes à la rue.