Plusieurs milliers de jeunes entre 14 et 20 ans ont participé aux émeutes partout en France, du 27 juin au 3 juillet, après la mort de Nahel. Le vaste mouvement de colère des jeunes de banlieue contre les violences policières ne suffit pas à expliquer les attaques au mortier, les incendies et les pillages. Plusieurs facteurs indiquent que les banlieues sont au bord de l’asphyxie, et que la violence couvait depuis longtemps.

C’est d’abord contre la ghettoïsation des quartiers que les jeunes émeutiers se sont exprimés. Une vidéo d’Explore Media explique comment ces quartiers, croulant sous les tours et les appartements étroits voire insalubres, ont été isolés du reste de la société. Construits dans les années 1960 pour pallier le manque de logements, ils ont été quittés progressivement par les classes moyennes. 

Leurs habitants sont pauvres, et bien souvent, lorsqu’une famille s’élève socialement, elle quitte le quartier pour être remplacée par une famille encore plus pauvre. Dans ce contexte de pauvreté, l’inflation a plongé un certain nombre d’habitants dans une situation de détresse alimentaire.  

Les garçons, dans une logique de bande

Pour ne rien arranger à ce phénomène de ghettoïsation, les politiques de mixité sociale ont du mal à être appliquées. Les inégalités persistent entre les établissements scolaires en REP et les autres établissements publics et privés, et certains maires sont réticents à construire des logements sociaux dans des communes plus favorisées.

Le Monde souligne aussi que la majorité des dégâts, dans les émeutes, ont été commis par de jeunes hommes. Selon l’ancienne ministre de l’Éducation nationale Najat Vallaud-Belkacem, les jeunes adolescents sont enfermés dans un schéma très stéréotypé et se retrouvent dans des bandes où ils se jugent mutuellement sur leur virilité et le refus de l’autorité. 

Les garçons, beaucoup plus présents dans l’espace public que les filles dans les quartiers défavorisés, ressentent un sentiment exacerbé de toute-puissance qui a pu s’exprimer sur les réseaux sociaux. Certains banalisent ainsi la violence, et accumulent un sentiment de haine et de compétition.

Décrochage scolaire et chômage

L’extrême jeunesse des émeutiers pose aussi la question de leur avenir. Le taux de chômage est plus élevé dans les banlieues que dans le reste du pays, et peut atteindre les 25 %, comme c’est par exemple le cas à Val-de-Reuil dans l’Eure. 

L’échec scolaire y est aussi plus massif. La majorité des prévenus au tribunal, à la suite des émeutes, ont arrêté l’école très tôt. Ils témoignent qu’ils ont été orientés dans la « mauvaise voie », rapporte Le Monde

D’autres événements récents, comme la pandémie de Covid, ont alimenté un sentiment d’abandon. Le confinement a eu des effets désastreux sur les adolescents les plus fragiles, et a renforcé le décrochage scolaire. 

Enfin, la violence s’explique par le manque de soutien politique, de collectifs ou de porte-voix de la jeunesse en banlieue. Peu d’acteurs émergent pour faire une campagne médiatique efficace sur la situation des banlieues, et les figures « modèles » des banlieues, comme le footballeur Kylian Mbappé, sont désormais trop éloignées de ces problématiques. Les jeunes les valorisent, entre autres, parce qu’elles ont réussi à quitter leur quartier.