“C’est très loin d’être satisfaisant.” Dans un entretien au Figaro, le garde des Sceaux Éric Dupond-Moretti a reconnu que le nombre de féminicides a baissé de 20 % en 2023, passant de 118 en 2022 à 94 en 2023. Si, selon le ministre, qui a admis que la lutte “contre ce fléau prend du temps”, “l’engagement de la justice française pour endiguer les féminicides porte ses premiers fruits”, le taux actuel est pourtant “loin d’être satisfaisant”. Dupond-Moretti a évoqué le déploiement “de téléphones grave danger” et de “bracelets antirapprochements” supplémentaires, en “espérant que la lutte sera encore plus efficace”.

Un décompte décrié par les associations

Mais ce décompte des autorités reste décrié par les associations, comme le collectif Nous toutes, qui, le 31 décembre 2023, décomptait 134 féminicides commis en France. Le collectif précise sur X : “Dans 72 % des cas, il s’agit d’un féminicide conjugal. Dans 74 % des cas, il a eu lieu au domicile.”

De son côté, le collectif Féminicides par compagnons ou ex, qui répertorie les féminicides conjugaux évoqués dans la presse depuis 2016, a également interpellé le garde des Sceaux sur X afin de contester ses chiffres : “À ce jour, nous avons recensé dans la presse 102 féminicides conjugaux en France en 2023.” L’association a aussi accusé le ministre de “supprimer quelques victimes”, tout en précisant que plusieurs enquêtes pour “mort suspecte” étaient encore en cours.

Des mesures pas assez efficaces pour les associations

Comme expliqué par L’Humanité, en novembre, Maëlle Noir, une des coordinatrices de Nous toutes, accusait le Gouvernement de mettre à la tête de ministères des hommes soupçonnés d’agressions sexuelles : “Malgré la place prise par ce sujet dans le discours politique, les politiques publiques ne sont pas à la hauteur, on doit se contenter de mesurettes. Et au niveau budgétaire, c’est la même chose : au lieu des 2,6 milliards d’euros nécessaires pour lutter contre les violences, on plafonne à 150 millions par an.”

Toujours en novembre, le ministre de la Justice avait annoncé qu’au 1er janvier 2024, chacun des 164 tribunaux français et 36 cours d’appel seraient dotés d’un “pôle spécialisé dans les violences intrafamiliales”. Le Monde précise que la mesure a été prise : désormais, ces pôles sont placés sous la responsabilité de “magistrats coordonnateurs” spécialement formés.

Éric Dupond-Moretti a également déclaré : “Nous savons que lutter contre ce fléau prend du temps. C’est ce que l’on doit conclure de l’expérience espagnole, qui nous montre qu’il a bien fallu six à sept ans d’un plan d’envergure avant de voir les chiffres baisser drastiquement.”

Une déclaration qui parvient alors que les associations féministes recensent déjà deux féminicides pour l’année 2024, qui vient tout juste de commencer.