En Ukraine, la religion est une affaire de politique, et même de nationalisme. Depuis l’invasion russe en février 2022, les Ukrainiens orthodoxes sont de plus en plus nombreux à désavouer le Patriarcat de Moscou, l’Église orthodoxe russe qui comptait auparavant de très nombreux fidèles en Ukraine.

Selon le sondage du centre Razoumkov, en février 2023, seuls 4% des Ukrainiens se réclameraient encore de l’Église orthodoxe rattachée au Patriarcat de Moscou, contre plus de 20% auparavant. La Croix précise que plus d’un millier des quelque 12 000 paroisses du Patriarcat de Moscou se sont réenregistrées auprès de l’Église orthodoxe d’Ukraine.

Une Église complaisante envers la Russie

L’Église rattachée au Patriarcat de Moscou est ancrée dans le pays depuis la fin du XVIIe siècle. Dans le contexte de la conquête de la Russie, elle voit ses rangs s’amoindrir à vue d’œil depuis l’annexion de la Crimée en 2014. L’institution a proclamé son indépendance en mai 2022 pour rompre avec la Russie qui a envahi son pays. Mais elle reste accusée de complaisance envers les Russes, car certains membres du clergé affichent leur soutien à l’Église russe, comme l’explique La Vie.

Soupçonneux, l’État ukrainien a mené plusieurs perquisitions dans des monastères. Plusieurs prêtres ont été condamnés pour soutien aux envahisseurs. Au printemps dernier, le ministère de la Culture a décrété le départ de cette Église affiliée à la Russie. Une première date fixée au 29 mars n’a pas été respectée. Le ministère a finalement décidé de vider les locaux occupés par des moines.

Jeudi 6 juillet 2023, la laure des Grottes de Kiev, l’un des monastères les plus réputés d’Ukraine, a donc vu ses moines être expulsés manu militari. Le site est placé sous l’autorité du Patriarcat de Moscou, indique La Croix.

Une Église dissidente

De nombreuses paroisses ont décidé de rejoindre les rangs de l’Église orthodoxe d’Ukraine. Cette institution a proclamé son indépendance de l’Église russe bien avant la guerre, en 2018. La juridiction autocéphale n’est toujours pas reconnue par le patriarche Kirill de Moscou, qui soutient l’invasion menée par Vladimir Poutine. Cette Église ukrainienne dissidente soutient l’État ukrainien contre son agresseur. Elle vilipende le patriarche Kirill en l’accusant de promouvoir le racisme et l’impérialisme russe.

Pour rejoindre l’Église autoproclamée, les paroisses doivent entamer des procédures administratives et judiciaires interminables. L’Église russe fait tout pour ralentir le processus, malgré son déclin. L’Église orthodoxe d’Ukraine, elle, poursuit son rapprochement avec l’Occident. À partir du 1er septembre 2023, elle devrait régler sa vie liturgique sur le calendrier julien moderne, synchronisé avec le calendrier grégorien occidental. La date de Noël deviendra donc différente de celle des orthodoxes russes.