Devant une salle de cinéma bondée, François Gemenne a tenu son public en haleine pendant presque deux heures, saluant d’emblée « les trésors d’hospitalité et de solidarité » à l’œuvre dans de nombreuses communes de France, comme autant de belles réponses aux propos haineux et xénophobes.
François Gemenne est chercheur à l’Université de Liège et enseignant à Sciences Po Paris. Il a tenu un discours parfois dur à entendre, sans concession, mais toujours argumenté et pétri d’altruisme. Il n’y a pas eux, les migrants, et nous, les Français : nous faisons partie de la même humanité.
L’immigration n’est pas une anomalie
L’orateur nous a invités à déconstruire le concept de crise migratoire. C’est parce que nous pensons « crise migratoire » que nous fermons nos frontières, et c’est cette fermeture qui provoque la crise. Les images de détresse surmédiatisées renforcent l’idée qu’il y a une crise des réfugiés. Plus nous sommes convaincus de l’existence de cette crise, plus nous ressentons ce besoin de nous en protéger.
Faut-il fermer les frontières ? Le degré de fermeture des frontières fixe-t-il les flux migratoires ? Non, répond sans hésitation François Gemenne. Ce sont des facteurs exogènes qui les régulent : les guerres, les dictatures, les conséquences du réchauffement climatique et, surtout, les inégalités de développement, de revenus, de liberté. L’histoire a montré qu’une frontière fermée n’empêche pas l’immigration mais la rend plus dangereuse. Le chercheur déplore l’absence d’un projet européen commun pour l’accueil des […]