Autrefois, une femme surmenée, fatiguée ou simplement angoissée, était réputée « avoir ses vapeurs » ou « ses jours », quand elle n’était pas traitée d’hystérique par Charcot qui a tant fasciné Freud. Les temps ont changé, mais l’inégalité demeure.

L’inégalité en matière de santé a toujours touché les femmes. Elle revêt divers aspects. Moins angoissée peut-être que l’homme, la femme attend avant de consulter ; elle est moins encline à s’inquiéter.

Cette relative insouciance concourt à rendre le dépistage du cancer du sein plus tardif pour la moitié d’entre elles, qui n’y recourt pas. Le tabagisme, autrefois privilège – s’il en est – des hommes, atteint désormais plus de femmes que d’hommes avec une augmentation spectaculaire des cancers du poumon féminins. Deux cents femmes meurent chaque jour de maladie cardiaque, c’est-à-dire sept fois plus que du cancer du sein, mais une douleur thoracique inquiète toujours plus un homme qu’une femme.

Des médicaments à risque pour les femmes

Les risques liés aux médicaments atteignent tout particulièrement les femmes : le Distilbène, prescrit pour prévenir les fausses couches, a causé une multitude de cancers vaginaux et ovariens transmissibles héréditairement ; le Thalidomide a entraîné de dramatiques agénésies des membres chez les nouveau-nés ; le Médiator destiné – en théorie – à tions cardiaques mortelles. Certes, l’endométriose commence à être reconnue pour ses manifestations douloureuses importantes.

Certes, l’accusation d’hystérie a disparu, mais les gynécologues se font rares, comme les pédiatres. Alors que des maux sont enfin reconnus pour leur spécificité, les professionnels manquent.

Une femme n’est pas un homme

Une femme n’est pas un homme au sens médical du terme ou, plutôt, elle a un corps dont les réactions sont propres. Son système immunitaire est différent. Malheureusement, cette particularité est responsable de son éviction de la recherche. Potentiellement enceinte, la femme est aussi écartée des protocoles de recherche thérapeutique par peur de complications chez le fœtus. Il en résulte que le médicament est conçu d’abord pour les hommes ; son efficacité et sa tolérance sont beaucoup moins connues chez la femme. Le même médicament n’a pas le même effet chez un homme et une femme. Cette différence se vit dans la plus grande indifférence.

Le féminisme est encore bien timide dans le domaine de la santé. Une femme ne se réduit pas à son appareil reproducteur. Il faut que les choses changent. Ce qui devrait être plus aisé puisque, désormais, deux médecins formés sur trois sont des femmes !

Didier Sicard, ancien président du Comité national consultatif d’éthique