Il y a trois ans, le général Mahamat Idriss Déby Itno prenait le pouvoir à la tête d’une junte militaire. Jeudi 9 mai, il a été élu président de la République du Tchad, dès le premier tour de l’élection. Une victoire contestée par Succès Masra, son Premier ministre et candidat malheureux de l’élection. Selon les résultats officiels provisoires de la commission électorale qu’il avait nommée, Mahamat Idriss Déby a obtenu 61,03 % des voix, et Succès Masra 18,53 %. Le Monde ajoute que le taux de participation a atteint 75,89 %. Des décomptes qui doivent encore être validés par le Conseil constitutionnel, également nommé par le chef de la junte.

L’annonce des résultats provisoires a vite été suivie de tirs en l’air à l’arme légère à N’Djamena, dans le quartier où siège le parti de Succès Masra. Une manifestation de joie, mais aussi un moyen de dissuader les gens de se rassembler. D’ailleurs, les rues ont rapidement été désertées. Pendant ce temps, près du palais présidentiel, de nombreux partisans de Mahamat Idriss Déby fêtaient sa victoire.

Selon le quotidien, Succès Masra avait revendiqué la victoire avant la proclamation des résultats officiels. Dans un long discours sur Facebook, il accusait par avance le camp Déby d’avoir truqué les résultats. Lors de son intervention, il a aussi appelé les Tchadiens à “ne pas se laisser voler la victoire” et à la “prouver” en “se mobilisant pacifiquement, mais fermement”. De son côté, Mahamat Idriss Déby a déclaré : “Je suis désormais le président élu de tous les Tchadiens.” Dans son court discours, il a simplement promis qu’il mettrait en œuvre ses “engagements”.

Un des États les plus pauvres du monde

Le scrutin devait mettre un terme une transition militaire de trois ans. Beaucoup d’observateurs l’estimaient joué d’avance en faveur du général, proclamé chef pour remplacer son père, Idriss Déby Itno, tué par des rebelles alors qu’il se rendait sur le front. Idriss Déby Itno avait dirigé d’une main de fer, pendant trois décennies, le Tchad qui figure parmi les États les plus pauvres du monde. Farouche opposant des Déby, Succès Masra avait finalement rallié la junte. Il avait été nommé Premier ministre quatre mois avant la présidentielle.

Son choix avait suscité la colère du reste de l’opposition, muselée et violemment réprimée. Elle avait traité Succès Masra de “traître” et affirmait qu’il se présentait à la présidentielle pour “donner un vernis démocratique et pluraliste” à un scrutin joué d’avance. Mais pendant la campagne, Succès Masra a créé la surprise en rassemblant des foules considérables. Si bien que, si les partisans de l’économiste protestent, cela pourrait déboucher sur des violences meurtrières, les manifestations de l’opposition étant systématiquement réprimées.