“J‘ai présenté ma démission”, a déclaré Andrés Allamand à Santiago, revenant d’un voyage en Espagne, rapporte Le Figaro. Dimanche 6 février, le ministre des Affaires étrangères du Chili a ainsi démissionné pour diriger le Secrétariat général ibéro-américain (Segib), une institution regroupant les 22 pays de la communauté ibéro-américaine. Il avait élu secrétaire général en novembre dernier. Cela intervient alors que le Chili et son gouvernement font face à de vives critiques sur fonds de crise migratoire dans la région du nord du pays.
“Je considère l’absence du ministre des Affaires étrangères pour faire face à la crise migratoire comme extrêmement grave”, a dénoncé le député de l’opposition Jaime Naranjo. “Comment est-il possible qu’un ministre des Affaires étrangères, dont la fonction principale est de veiller aux intérêts de l’État, travaille à Madrid dans une organisation internationale ?”, s’est demandé sur les réseaux sociaux un député, Iván Flores. Le séjour d’Andrés Allamand en Espagne, et donc son absence, avait suscité la consternation des habitants d’Iquique et d’Arica, qui protestent contre la présence de migrants sans papiers, pour la plupart vénézuéliens.
Poussée de la xénophobie
À Iquique, plusieurs milliers de personnes ont manifesté, dimanche 30 janvier, pour s’opposer à l’arrivée de migrants vénézuéliens qui traversent la frontière séparant le Chili de la Bolivie. “Ça suffit. Plus d’immigrés délinquants. Fermeture des frontières”, ont-ils dénoncé, selon Le Monde. Certains s’en sont pris à un des camps de migrants, criant des insultes xénophobes. Des actes qualifiés de “discrimination” et “xénophobie” par l’ONU. Le lendemain, des camionneurs et des chauffeurs de taxi ont bloqué l’accès aux routes pour protester contre la délinquance et l’immigration, raconte le quotidien. Ces rassemblements font suite à l’agression de policiers de la ville par des migrants vénézuéliens, quelques jours plus tôt.
D’après le procureur de la région de Tarapaca, dont Iquique est la capitale, les chiffres de la délinquance, en 2021, montrent une augmentation de 183% des homicides, de 42% du trafic de drogues et de 501% du trafic de migrants. “Depuis un an environ, il y a une poussée de la xénophobie, avec une tendance à lier la délinquance à l’immigration, notamment vénézuélienne”, souligne, auprès du Monde, Patricia Rojas, présidente de l’Association vénézuélienne au Chili, qui promeut les droits des migrants.
Pas assez de centres d’accueil
“Les manifestations contre la délinquance sont légitimes et la ville d’Iquique est totalement débordée”, soutient-elle. Un rapport de septembre 2020 du Service jésuite aux migrants (SJM) montre qu’il “n’existe pas de preuves que l’augmentation de migrants résidant au Chili soit associée à une augmentation des délits”.
À cause de ces manifestations, “le Chili envoie une image terrible de lui-même. Mais il faut aussi regarder ce qu’il y a derrière : les personnes accueillantes se sentent totalement abandonnées. La responsabilité revient aux autorités publiques”, déplore Francisca Vargas, directrice de la Clinique juridique des migrants et réfugiés de l’université Diego Portales, dans Le Monde. “Il manque des centres d’accueil et une politique organisée”, ajoute Macarena Rodriguez, présidente du directoire du SJM, citée par le quotidien.