Une petite-fille de réfugiés
Née le 24 juin 1962 à Mexico, Claudia Sheinbaum est la petite-fille de juifs venus de Bulgarie pour fuir le nazisme, rapporte BFMTV. Dans sa famille, décrite comme engagée, “on parlait politique matin, midi et soir”, a écrit la nouvelle présidente du Mexique dans son autobiographie intitulée Claudia Sheinbaum, presidenta. D’ailleurs, en 1968, quand de nombreux Mexicains manifestent pour demander un changement démocratique, la mère de Claudia Sheinbaum est expulsée de l’université où elle enseigne, pour avoir soutenu la contestation.
Éduquée par des parents activistes, Claudia Sheinbaum a 15 ans quand elle devient volontaire pour aider les mères à la recherche de leurs enfants disparus dans un Mexique marqué par les gangs et la violence. En 1991, une photo publiée à la une du Stanford Daily montre Claudia Sheinbaum manifestant contre une visite du président mexicain libéral de l’époque, Carlos Salinas de Gortari. Sur la pancarte qu’elle brandit figure ce message : “Commerce équitable et démocratie maintenant !”
Une scientifique co-autrice d’un rapport du Giec
Comme plusieurs membres de sa famille, Claudia Sheinbaum a la fibre scientifique. Elle s’intéresse depuis longtemps à la question climatique. Son frère aîné, ingénieur de recherche en modélisation océanique, l’a persuadée d’étudier la physique, raconte franceinfo. Après avoir terminé un doctorat en ingénierie énergétique en décembre 1994, la nouvelle présidente du Mexique se lance dans la politique. Elle est élue maire de Mexico en 2000, et Andrés Manuel López Obrador la nomme ministre de l’Environnement de la capitale. Après la défaite de son mentor à la présidentielle en 2006, Claudia Sheinbaum retourne à la vie académique. Elle participe néanmoins à la création du Mouvement régénération nationale (Morena). Parallèlement à ses activités, elle s’investit dans les travaux du Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (Giec). En 2007, elle contribue à la rédaction d’un chapitre du rapport consacré à l’atténuation du changement climatique.
Une vraie féministe ?
Si Claudia Sheinbaum se présente comme féministe, tout le monde n’est pas de cet avis. Dans un pays qui enregistre l’un des plus forts taux de féminicides par nombre d’habitants au monde, la cheffe d’État a promis qu’elle inscrirait la lutte contre l’impunité et les violences sexistes et sexuelles au cœur de sa politique. En 2023, « 3 800 femmes ont été tuées, même si seulement 24% de ces meurtres sont investigués comme des féminicides par les ministères publics, ce qui contribue à l’impunité pour ces crimes », explique à franceinfo Delphine Lacombe, sociologue et politiste, chargée de recherche au CNRS. D’après les données de l’ONU, 70% des Mexicaines de plus de 15 ans ont été victimes de violences de genre au moins une fois dans leur vie, dont le harcèlement et les abus sexuels. Pourtant, dans la sphère féministe, des militantes doutent de l’engagement de Claudia Sheinbaum. “Elle incarne un féminisme d’accompagnement de l’opinion et pas de remise en cause de la société patriarcale, comme peut le faire un mouvement féministe beaucoup plus jeune et radical”, commente Hélène Combes.
La gestion du maintien de l’ordre à Mexico lors de rassemblements féministes a notamment été très critiquée. Le fait que la Présidente n’ait pas pris formellement position sur une décision de la Cour suprême dépénalisant en septembre 2023 l’avortement à l’échelle nationale est également montré du doigt par les féministes. “Comme son adversaire, Xóchitl Gálvez, Claudia Sheinbaum a éludé cette question pour des raisons stratégiques alors que 18 États sur 32 pénalisent encore l’avortement”, précise Delphine Lacombe. Elle ajoute : “À partir de son bilan mitigé à Mexico, des féministes même modérées ont jugé que ses prises de parole pendant la campagne étaient très en deçà des exigences de la nouvelle génération féministe.”
Elle prend la suite de son mentor
Élue le dimanche 2 juin, Claudia Sheinbaum prendra officiellement le 1er octobre le relais du président de gauche sortant Andrés Manuel López Obrador, son mentor en politique. Surnommé AMLO, le chef d’État lui a fait confiance dès 2000. Il lui a alors confié pendant six ans l’un des portefeuilles les plus importants de l’administration : celui de l’environnement, rappelle 24 Heures. Un poste clé dans la capitale qui comptait neuf millions d’habitants en 2023. C’est dans ce cadre que Claudia Sheinbaum a contribué à la construction du second étage du “périphérique”, afin de désengorger l’une des autoroutes urbaines traversant Mexico. Elle est également à l’origine du développement des voies réservées aux autobus et des pistes cyclables dans la capitale.
La volonté affichée de lutter contre les cartels
Pour s’attaquer aux cartels et à la violence dans le pays, la Présidente a promis d’en cibler les causes, de renforcer la Garde nationale, et d’aller vers une politique du “zéro impunité” face aux criminels. “Nous mènerons le Mexique sur le chemin de la paix et de la sécurité”, a assuré la cheffe d’État, après sa victoire. D’ailleurs, les cartels et la violence ont marqué la campagne électorale présidentielle, relate 24 Heures. Pas moins de 37 candidats politiques ont été tués au Mexique au cours des derniers mois, élections législatives et locales incluses. Aussi, quelque 27 000 militaires ont été mobilisés dimanche 2 juin, afin d’assurer la sécurité du scrutin.
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