Sécheresses plus fréquentes, inondations dévastatrices, etc. Les pays les plus pauvres subissent de plein fouet les conséquences du changement climatique. Dans un entretien accordé à l’AFP en marge du 36e sommet de l’Union africaine à Addis-Abeba (Éthiopie), William Ruto, le président kényan, a estimé que le moment “d’un changement de paradigme” était arrivé, relate Sciences et Avenir. “Nous sommes à un moment où il n’y a plus le choix”, a-t-il souligné. Et d’ajouter : “Nous n’avons pas fait entendre notre voix assez clairement. Nous n’avons pas parlé suffisamment haut et fort de ce sujet.”

Quelque 22 millions de personnes ne mangent pas à leur faim du sud de l’Éthiopie au nord du Kenya en passant par la Somalie. En cause, une sécheresse historique commencée fin 2020 et amenée à durer encore, selon les prévisions de l’ONU. “Nous voulons un système fondé sur la responsabilité, qui tienne les émetteurs qui polluent la planète pour responsables. Si ce n’est pas fondé sur la responsabilité, alors c’est biaisé”, a poursuivi le chef d’État. S’il a les pays dans le viseur, il verrait également d’un bon œil un changement d’attitude de la part des institutions financières. Selon lui, elles voient les pays d’Afrique comme “des mendiants” lors des négociations sur le climat, et non pas comme des “atouts”.

Énergies fossiles

Ce n’est pas la première fois que les pays pauvres en appellent à la responsabilité des pays riches. Ils ont déjà demandé la mise en place d’un mécanisme de financement visant à indemniser les pays vulnérables pour les “pertes et dommages” dus aux catastrophes induites par le climat. Et si la COP27 s’est conclue par un compromis actant le principe de la création d’un fonds spécifique, des questions laissées en suspens doivent être réglées lors de la COP28 à Dubaï, rappelle le mensuel.

Président du comité des dirigeants africains sur le changement climatique, William Ruto appelle aussi à des objectifs plus ambitieux sur les réductions d’émissions. “Poursuivre en toute impunité le recours aux énergies fossiles, se tourner vers le charbon comme c’est le cas aujourd’hui, c’est mettre toute la planète en danger. Nous ne pouvons pas être aussi irresponsables. Nous ne pouvons pas être indifférents”, avertit-il.

Injustices

Pour le président, il est également temps que les instances financières internationales évoluent. “Les émetteurs (de gaz à effet de serre) et les pollueurs obtiennent de meilleurs taux (d’intérêt) pour leur développement que nous (…), est-ce à dire que ceux qui polluent le moins sont punis ?”, s’interroge William Ruto. Samedi 18 février, devant l’assemblée plénière du sommet de l’Union africaine, Antonio Guterres, le secrétaire général des Nations unies, a également montré du doigt un système financier international “dysfonctionnel et injuste”.

Selon lui, l’Afrique est confrontée “à des défis énormes (…) sur à peu près tous les fronts”, en raison des conséquences de crises pour qu’elle n’a pas causées. “La brutale injustice du changement climatique est manifeste à chaque inondation, sécheresse, famine et vague de chaleur sur le continent”, a ajouté Antonio Guterres.