La mort vient d’emporter avec elle le dernier visage de la lutte anti-apartheid en Afrique du Sud. Dimanche 26 novembre, l’archevêque Desmond Tutu est mort à l’âge de 90 ans. Affaibli et souffrant d’un cancer de la prostate, il est probablement mort de vieillesse, selon ses proches, cités par France 24.

Connu pour son rire charismatique et le visage toujours souriant, Desmond Tutu aura combattu sans relâche le régime de ségrégation raciste et inégalitaire qui, pendant 43 ans (de 1948 à 1991), a “enfermé la population noire dans une infériorité de droit vis-à-vis de la population blanche”, écrit Mediapart. Le journal en ligne rapporte d’ailleurs que Desmond Tutu avait, dans les années 1980, l’habitude de dire : “L’apartheid est le mal. C’est le système le plus vicieux inventé par l’homme depuis le nazisme.”

Prix Nobel de la paix en 1984

Partisan de la non-violence et combattant des injustices, il est né le 7 octobre 1931 dans une petite ville à une centaine de kilomètres de Johannesburg. Issu d’un milieu modeste, il se tourne d’abord vers le métier d’instituteur. Mais il démissionne en 1957, “révolté par la piètre qualité de l’éducation donnée aux Noirs”, relate La Croix. Il décide alors de se lancer dans des études théologiques au sein de l’Église anglicane. Ordonné prêtre à 30 ans, il devient ensuite doyen du diocèse de Johannesburg quatre ans plus tard, premier Noir à occuper un tel poste – au même titre qu’il sera, plus tard, le premier archevêque noir du Cap

C’est lorsqu’il est prêtre qu’il organise des marches pacifiques pour dénoncer la ségrégation et qu’il appelle à des sanctions internationales à l’encontre du régime blanc de Pretoria. Contrairement à d’autres figures telles que Nelson Mandela ou Steve Biko, il échappe à l’incarcération de longue durée grâce à son statut de clerc. Son combat non-violent est récompensé en 1984 par le prix Nobel de la paix.

“Je refuserais d’aller dans un paradis homophobe”

Après l’avènement de la démocratie en 1994 et l’élection de Mandela, précise France 24, Desmond Tutu surnomme l’Afrique du Sud la “Nation arc-en-ciel”. En 1995, il préside la Commission de la vérité et de la réconciliation (TRC) visant à faire la lumière sur l’apartheid. Il n’hésite pas non plus à dénoncer les dérives du gouvernement de l’ANC jusqu’à récemment, notamment sous la présidence de Jacob Zuma. En 2013, il jure même de ne plus voter pour le parti qui a mis fin à l’apartheid : “Je n’ai pas combattu pour chasser des gens qui se prenaient pour des dieux de pacotille et les remplacer par d’autres qui pensent en être aussi”, dira-t-il.

Parmi ses autres combats, ce militant des droits de l’homme s’est aussi fait remarquer pour avoir défendu les droits des homosexuels : “Je ne vénérerais pas un Dieu homophobe (…) Je refuserais d’aller dans un paradis homophobe”. En 2016, il milite par ailleurs pour le droit au suicide assisté. L’annonce de sa disparition a suscité l’émoi partout à travers la planète. D’ailleurs, le “combat” de Desmond Tutu “pour la fin de l’apartheid et la réconciliation sud-africaine restera dans nos mémoires”, a salué le président Emmanuel Macron, rendant hommage à quelqu’un qui “consacra sa vie aux droits de l’homme et à l’égalité des peuples”.