Quelle invitation étonnante ! Étonnant car la plupart du temps nous sommes incités à être la voix des sans voix, à dénoncer la torture qui sévit dans le monde. Le centre Primo Levi, dont l’objectif est d’accueillir et soigner les personnes victimes de la torture, propose cette action originale pour alerter l’opinion publique. En France, plus de 125 000 réfugiés ont été victimes de la torture et restent hantés par le bruit des violences subies. C’est ce bruit qui résonne dans la tête des victimes qui a donné l’idée d’une pétition silencieuse. « En 2012, nous avions réalisé une première campagne autour des objets du quotidien qui peuvent avoir un sens douloureux pour les personnes victimes de la torture. Prolongeant cette initiative, nous avons voulu centrer cette nouvelle campagne sur ces bruits de la torture qui, des décennies plus tard, continuent à les hanter et font suinter des souffrances invisibles qui nécessitent des soins adaptés » expliquent Romain Arrigoni et Nicolas Richard, de la société Grey Paris à qui Primo Levi a confié la réalisation de cette campagne.
Viser la reconstruction
Grâce à un site internet dédié (www.thesoundofsilence.fr), nous sommes invités à donner symboliquement de notre silence pour ceux qui restent à jamais hantés par les bruits de la torture. Celui-ci est alors matérialisé instantanément : les sillons d’un vinyle noir illustrant la violence s’emplissent de blanc au rythme du silence donné. Pour le lancement de ce projet des artistes ont accepté de participer à une expérience immersive filmée. La vidéo, visible sur le site internet, met en avant leurs réactions face à un parcours regroupant des témoignages de victimes et des explications sur les souffrances endurées. Avec « The Sound of silence », Primo Levi tient à démontrer que le silence peut résonner plus fort que les bruits de la torture. Les signatures seront remises à la Ministre de la Santé et des Affaires sociales avec le texte de la pétition dans lequel est listé un certain nombre de mesures visant à adapter le dispositif de santé public aux besoins de ces milliers d’hommes, de femmes et d’enfants en souffrance. Originaires de Syrie, de République Démocratique du Congo, de Tchétchénie, de Tunisie… Ils ont vécu l’horreur : torturés, violés, tabassés, humiliés, enfermés arbitrairement, témoins de scènes insupportables… Cherchant refuge et protection en France, ils doivent pouvoir recevoir des soins appropriés pour faire face aux blessures physiques et aux traumatismes psychiques causés par la torture, soins sans lesquels aucune reconstruction, aucun avenir n’est possible. Donnons notre silence pour eux.