Les Argentins ont élu leur nouveau président, dimanche 19 novembre. Javier Milei a battu Sergio Massa, le ministre centre-gauche de l’Économie sortant, rappelle franceinfo. Embourbé dans une terrible crise économique, l’Argentine, dont 40 % de la population vit désormais sous le seuil de pauvreté, lui a préféré l’économiste libertarien, polémiste antisystème. Le nouveau chef de l’État, qui se décrit comme étant un “anarcho-capitaliste”, se distingue également par son admiration pour l’ancien président américain Donald Trump. Ses positions en partie d’extrême droite ont néanmoins séduit 55 % des votants. S’il trouve des soutiens au Parlement, il pourrait mettre en place des mesures radicales.
Le dollar au lieu du peso
Député depuis 2021, l’économiste a fait de la dollarisation de l’économie argentine une mesure phare de son programme. Le pays subit l’inflation depuis des décennies et celle-ci a dépassé les 142 % sur un an, selon la Banque centrale du pays. En remplaçant le peso par le dollar d’ici 2025, Javier Milei promet une sortie de crise. Mais pour 200 économistes, cette promesse est un mirage qui fragiliserait davantage le pays. En parallèle, le nouveau président envisage de “dynamiter” la Banque centrale nationale, alors que tous les pays ne seraient-ce qu’un peu développés ont une banque centrale.
Des coupes budgétaires
Durant sa campagne, le vainqueur de la présidentielle a également promis des coupes budgétaires drastiques. Il ambitionne de réduire les dépenses publiques de 15 % du PIB et, ainsi, d’en finir avec “cette aberration appelée justice sociale, synonyme de déficit budgétaire”. Pour atteindre son objectif, il évoque la privatisation des 34 entreprises publiques du pays, la fin des subventions sur le gaz et l’électricité, ou encore la mise en place d’un système d’appel d’offres privé pour les travaux publics. Javier Milei compte aussi réduire le nombre de ministères, arrêter de verser une retraite aux ex-présidents, aux juges ou aux diplomates, et même diminuer les fonds versés aux provinces. Peu avant le vote, le chef d’État avait cependant pris le soin de rassurer les plus pauvres en affirmant qu’il ne privatiserait ni la santé ni l’éducation.
Une régression des droits des femmes
Avec dans le viseur la réduction des dépenses publiques, Javier Milei pense supprimer le ministère des Femmes, des Genres et des Diversités. Une mesure en phase avec ses convictions antiféministes. Pour mémoire, le nouveau président déclarait en mai 2022 : “Je ne m’excuserai pas d’avoir un pénis.” Il n’hésite pas non plus à nier l’existence d’inégalités salariales entre les femmes et les hommes, alors que l’écart atteint 27,7 % en Argentine. “Si les femmes gagnaient moins que les hommes, les entreprises en seraient remplies, car les patrons veulent gagner de l’argent !” a-t-il lâché lors d’un débat télévisé au mois d’octobre dernier.
Également contre l’avortement, légal jusqu’à la 14e semaine de grossesse depuis décembre 2020, Javier Milei souhaite organiser un référendum sur le sujet. Il considère en effet l’interruption volontaire de grossesse comme un meurtre. “Évidemment, la femme a les droits sur son corps, mais l’enfant n’est pas son corps”, argue-t-il.
En revanche, le nouveau président défend la primauté des libertés individuelles sur des sujets comme la légalisation des drogues, du moment que “cela n’implique pas l’aide de l’État ». Il se dit également favorable à la dérégulation de la vente d’armes et à une “solution de marché” pour le don d’organes.
Les humains pas à l’origine du réchauffement climatique
Si les scientifiques s’accordent à dire que le réchauffement climatique est lié aux activités humaines, Javier Milei estime qu’il s’agit d’“un mensonge des socialistes”. “Il existe, dans l’histoire de la Terre, un cycle de températures”, a assuré le président argentin en octobre dernier. Aussi, il a profité de sa campagne pour faire savoir qu’il refuse d’adhérer à l’agenda 2030 de l’Onu. Celui-ci prévoit un programme de 17 objectifs de développement durable à atteindre lors des six prochaines années.
Parallèlement à cette idée, il a osé défendre la privatisation des fleuves en Argentine. Ainsi, “si l’eau se fait rare, elle arrête de ne rien valoir et alors un commerce commence, et vous allez voir comment la pollution [des entreprises] se termine”, a-t-il déclaré pendant la campagne présidentielle.
Un président révisionniste
Toujours lors de la campagne, ses paroles à propos de la dictature militaire ont choqué. Javier Milei a laissé entendre une révision de l’histoire concernant la période allant de 1976-1983. “Pendant les années 1970, il y a eu une guerre. Et pendant cette guerre, les forces de l’État ont commis des excès”, a-t-il expliqué, toujours en octobre dernier. Il a ensuite contesté le bilan des morts et des disparus, qui avoisinerait les 30 000 personnes selon les organismes des droits de l’homme, toujours sous la dictature.