Ma vie a basculé le 7 décembre 1988, le jour du terrible séisme qui a dévasté la région de Spitak et tué des dizaines de milliers d’Arméniens. Je n’avais aucun lien direct avec ce pays mais devant la souffrance du peuple arménien, j’ai été très ému. Je suis devenu arménien ce jour-là.

Une amitié profonde

Quand Samuel Sahagian, pasteur de l’Église réformée du Luxembourg à Paris, m’a sollicité pour rejoindre son association, je n’ai pas hésité, le peuple arménien avait besoin d’aide. Nous avons reçu très vite le soutien de milliers de personnes. Trente-cinq ans plus tard, cet engagement continue, porté par la confiance, la fidélité et la générosité de ceux qui nous ont suivis depuis le début, avec un seul mot d’ordre : on ne compte pas les jours mais on fait en sorte que les jours comptent.

En février 1990, quand j’ai mis les pieds pour la première fois en Arménie, j’ai été choqué : tout était à reconstruire. Les premières actions ont ciblé les écoles, le chauffage, pour que les enfants ne soient pas isolés dans le froid glacial de l’hiver arménien (– 30°). Quatre-vingt-dix-huit pays sont venus en aide à l’Arménie, à commencer par la France.

Depuis le Moyen Âge, La France a une place très particulière dans le cœur des Arméniens. Après le génocide, elle a accueilli nos grands-parents, nous lui en sommes très reconnaissants. Plus de six cent mille Français d’origine arménienne vivent aujourd’hui en France. Il faut entretenir ce lien fort ; aujourd’hui plus que jamais, la paix reste fragile.

SPFA est pionnière en matière de francophonie : quatre cents jeunes apprennent le français gratuitement dans nos neuf centres équipés d’ordinateurs, des universités d’été sont ouvertes, les enfants découvrent l’univers du livre, la faculté de théologie d’Etchmiadzine est soutenue, le talent de jeunes prodiges musicaux – dont certains sont devenus des solistes à la réputation internationale – est valorisé (des tournées sont régulièrement programmées en France).

Des actions multiples

SPFA œuvre dans de nombreux domaines : l’acheminement d’eau potable dans les villages, le soutien agropastoral, la reconstruction d’écoles, la rénovation d’équipements sportifs, l’organisation de centres de loisirs et colonies de vacances. À Gyumri, mille cinq cents élèves sont accueillis dans des structures périscolaires ; cent cinquante personnes âgées reçoivent un repas quotidien et sont emmenées deux fois par mois aux douches municipales. À Pyunic, enfants valides et enfants porteurs de handicap se côtoient ; la directrice de l’établissement, amputée des deux jambes lors du tremblement de terre, s’en occupe merveilleusement. Nous ouvrons pour eux des centres aérés, subventionnons les frais de chauffage, salarions une psychologue, faisons éditer des livres en braille… On essaie de satisfaire les demandes.

Depuis 2020, nous aidons les déportés du Karabakh. Dernièrement, un centre de soutien psychologique pour les soldats et leur famille a ouvert ses portes. SPFA propose des parrainages d’enfants ou de familles et organise deux voyages découverte par an.

L’Arménie est un musée à ciel ouvert avec ses quatre mille monuments dont la plupart sont inscrits au patrimoine de l’humanité. On reste très humble. Ma devise, c’est que le bien ne fait pas de bruit et que le bruit ne fait pas de bien.