L’ UAECNE, ou l’Union comme nous l’appelons familièrement, est la principale Église héritière de la première Église protestante arménienne, fondée en 1846 à Istanbul, et qui s’était développée de manière florissante jusqu’à la catastrophe du génocide de 1915. Elle regroupait à cette époque plus de 60000 membres répartis en plusieurs communautés dans l’ensemble de l’Empire ottoman.
Aujourd’hui, elle est une Église membre de la Communion Mondiale d’Églises Réformées et est l’un des six partenaires de notre structure internationale, « l’ACO Fellowship». C’est dans ce cadre que l’Union nous demande d’entretenir un soutien constant à deux œuvres importantes: l’Église du Christ à Alep, en Syrie, et le Centre d’Action Sociale (SAC) de l’Union à Bourj Hammoud, dans la banlieue de Beyrouth au Liban.
Une œuvre diaconale
L’Église du Christ est le nom donné à l’ancien centre missionnaire de l’ACO à Alep. L’œuvre a été confiée à l’Union dans les années 1960 dans le contexte de l’après-guerre où l’action de l’ACO s’est progressivement inscrite dans celle des Églises partenaires, autonomes et porteuses ellesmêmes de leur engagement missionnaire. Ce passage de relais faisait également écho à l’évolution du monde avec la décolonisation et l’indépendance de la Syrie. Toutefois, l’Église du Christ s’est appuyée sur l’héritage missionnaire de l’ACO pour devenir un lieu d’Église original dans le paysage religieux d’Alep. Sans être une communauté paroissiale, elle propose cultes, études bibliques et école du dimanche, en arménien et en arabe, et surtout elle prolonge l’engagement diaconal originel en offrant aux plus vulnérables soins médicaux et dentaires, écoute et aides sociales. Le pasteur Bchara Moussa Oghli est l’âme de ce lieu qu’il a su maintenir comme un havre de paix et d’entraide lors de la récente guerre.
La situation économique et sociale catastrophique que connaît actuellement la Syrie fait que l’Église du Christ garde toute sa pertinence au milieu des autres acteurs engagés dans la solidarité, Églises voisines ou ONG. Les personnes qui en franchissent le seuil – arméniennes, arabes, chrétiennes ou musulmanes – y reçoivent un accueil inconditionnel et bienveillant, avec discrétion et sans contrepartie. La qualité de cet accueil est un témoignage en soi et vient souvent fortifier la personne en détresse qui perçoit que sa dignité est respectée. Les personnes qui viennent demander de l’aide pour le financement de soins, des questions matérielles ou une bourse scolaire sont invitées à un temps d’écoute et de dialogue avec le pasteur Bchara qui les reçoit et garde, avec leur accord, une trace de leur récit de vie, comme un témoignage pour les générations à venir.
Une œuvre sociale
Le SAC, le centre d’action sociale de l’Union près de Beyrouth, était aussi à l’origine une œuvre missionnaire, créée par des Suisses à l’époque où la localité de Bourj Hammoud n’était encore qu’un camp de réfugiés accueillant des rescapés du génocide.
Le SAC soutient les personnes défavorisées de la communauté arménienne dans de nombreux domaines. Plusieurs publics sont aidés : les familles, les enfants et les jeunes, les personnes âgées isolées et les réfugiés syriens. Avec la grave crise libanaise qui a débuté fin 2019, le nombre de nouvelles personnes accueillies ne cesse d’augmenter au point que ce sont, comme à l’Église du Christ, des centaines de bénéficiaires qui sont soutenus.
Les trois assistantes sociales permanentes du Centre font de leur mieux pour recevoir chaque personne et évaluer ses différents besoins : médicaux, alimentaires, financiers, matériels, psychologiques, spirituels… Ainsi des familles se sont vues aidées pour réparer leur logement suite à l’explosion du port de Beyrouth (août 2020) et d’autres suivent des sessions de psychothérapie pour faire face aux traumatismes engendrés par la situation de grande incertitude qui règne au Liban depuis plusieurs années. Un groupe de femmes syriennes et libanaises participent aussi à des cours de gymnastique, une occasion de détente et de partage qui contribue à leur faire retrouver du courage et de l’énergie. Une attention particulière est portée aux besoins concernant la petite enfance comme le lait en poudre infantile et les couches pour bébé : ce sont des produits qui sont chers et connaissent souvent des pénuries. Les personnes âgées sont visitées et suivies : certaines d’entre elles se retrouvent seules suite au départ en exil de leurs enfants et peuvent être démunies lorsque la maladie ou le grand âge les touchent.
Le SAC met aussi en œuvre toute une série de programmes spécifiques pour les enfants et les jeunes. Du soutien scolaire avec un suivi personnalisé est proposé pour une quarantaine d’élèves l’après-midi, après l’école. Jusqu’à 80 enfants se retrouvent les samedis matin pour un centre aéré chrétien et durant les vacances d’été, ce sont plus de 5 semaines de rencontres et d’activités qui sont offertes à une centaine de participants. Ces moments incluent des temps de prière, d’animation biblique et de prévention à l’égard des risques présents dans le quartier (drogue, délinquance, abus, décrochage scolaire…). L’espace du SAC est limité mais l’enthousiasme de tous ces enfants n’en est que plus décuplé !
En plus de ces deux lieux de diaconie que sont l’Église du Christ et le SAC, l’Union nous propose aussi de soutenir des projets plus limités dans le temps. Ainsi nous avons récemment financé des formations à l’artisanat pour plusieurs dizaines de femmes en Irak afin de leur permettre de générer un revenu pour leur foyer. Ces sessions ont été organisées par l’ONG de la paroisse arménienne de Bagdad qui agit là aussi dans un contexte difficile. Nous restons ainsi aux côtés de nos frères et sœurs arméniens du Proche-Orient et nous rendons grâce pour leurs engagements remplis d’espérance, témoignage de la lumière de l’Evangile au milieu de l’adversité !
Par Mathieu Busch, pasteur et directeur de l’ACO