Dans la nuit de mercredi à jeudi, 16 détenus occidentaux ont été libérés par la Russie et le Bélarus, et sont arrivés à Washington, aux États-Unis, et à Cologne, en Allemagne. Révélé par les médias américains, cet échange fait suite à des jours de spéculation après que certains prisonniers en Russie ont été transférés vers une destination inconnue, relate Les Échos. Selon des vidéos, un échange a été effectué sur le tarmac d’un aéroport turc. La Turquie est, en effet, l’unique pays agréé par la Russie comme médiateur.
Dix prisonniers sont partis vers la Russie, treize vers l’Allemagne et trois vers les États-Unis. Dans la soirée, Vladimir Poutine a annoncé qu’il avait gracié les 13 prisonniers libérés. De son côté, Joe Biden s’est réjoui de la “prouesse diplomatique” et de la fin du “calvaire” des prisonniers du Kremlin.
Soulagement
Jeudi en toute fin de soirée, le président Joe Biden et la vice-présidente Kamala Harris ont accueilli les ex-détenus à leur descente de l’avion. Le chancelier allemand Olaf Scholz en a fait autant du côté de Cologne. En accueillant les prisonniers libérés, le chancelier allemand Olaf Scholz a déclaré qu’ils avaient “craint pour leur vie”. Le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, n’a pas caché son soulagement. “L’Union européenne est soulagée par la libération et le transfert vers la liberté hors de Russie et du Bélarus d’un certain nombre de prisonniers politiques, dont des ressortissants européens, avec l’aide de la Turquie”, a-t-il dit.
Parmi les prisonniers libérés figure l’Américain Evan Gershkovich. Le journaliste du Wall Street Journal avait été arrêté en mars 2023 et condamné le 19 juillet en Russie à seize ans de prison à l’issue d’un procès expéditif pour “espionnage”. Une accusation jamais prouvée. Un ex-marine, Paul Whelan, qui a aussi les nationalités britannique, irlandaise et canadienne, était quant à lui emprisonné en Russie depuis décembre 2018 pour le même motif.
Des collaboratrices de Navalny
Des opposants russes de Vladimir Poutine ont également été libérés. C’est le cas d’Ilia Iachine, d’Oleg Orlov et de Vladimir Kara-Mourza. Lilia Tchanycheva et Ksenia Fadeïeva, ainsi qu’Alexandra Skotchilenko, deux collaboratrices d’Alexeï Navalny, mort en prison en février dernier, ont elles aussi quitté leur geôle. Elles purgeaient une peine de sept ans de prison pour avoir remplacé des étiquettes de prix de supermarchés par des messages dénonçant l’offensive contre l’Ukraine.
Kevin Lik, un jeune russo-allemand condamné pour “trahison”, Daniil Krinari, le militant condamné en avril dernier à cinq ans de prison pour avoir “coopéré avec l’Ukraine”, ou encore l’Allemand Rico Krieger, condamné à mort au Bélarus après avoir été jugé coupable de “terrorisme”.
“Concessions importantes”
En contrepartie, Moscou devrait se voir remettre Vadim Krassikov. L’agent russe était emprisonné en Allemagne pour l’assassinat d’un ex-commandant séparatiste tchétchène à Berlin en 2019. Alexander Vinnik, un informaticien accusé d’avoir dirigé BTC-e, une plateforme d’échange de cryptomonnaies grâce à laquelle des milliards de dollars de revenus criminels auraient été blanchis. Vladislav Kliouchine, lui, offrait des services de surveillance des médias et réseaux sociaux. Il avait été condamné aux États-Unis pour fraude. Vadim Konochtchenok, accusé d’avoir fourni à la Russie des semi-conducteurs et munitions fabriqués aux États-Unis, Roman Selezneva, Artema et Anna Dultseva, détenus en Slovénie, Mikhail Mikushin, emprisonné en Norvège et Pavel Rubtsov, emprisonné en Pologne, rentreront aussi à Moscou.
Pour que des journalistes et des militants recouvrent la liberté, les Occidentaux ont accepté de relâcher des espions et criminels. Joe Biden a publiquement exprimé sa “grande reconnaissance” à Olaf Scholz pour les “concessions importantes” faites dans le cadre de cet échange. “La décision n’a pas été facile à prendre par le gouvernement allemand”, a reconnu le porte-parole d’Olaf Scholz, au sujet de Vadim Krassikov. Celui-ci était, en effet, condamné à perpétuité. Mais le “difficile” échange de prisonniers a permis de “sauver des vies”. Moscou et Washington ont renoué avec un rituel tombé en désuétude depuis la fin de la guerre froide. Des échanges de prisonniers avaient eu lieu ces dernières années, mais ils ne concernaient qu’un seul individu à chaque fois.