Le Royaume-Uni subit de violentes émeutes. Du jamais-vu depuis plus de dix ans. Au moins deux hôtels hébergeant des demandeurs d’asile ont été pris pour cible à Rotherham et près de Birmingham dimanche 4 août, indique Le Point. Un point de non-retour pour le Premier ministre Keir Starmer, qui a promis que les casseurs anti-migrants et islamophobes regretteront leurs actes. Les émeutes ont débuté après que trois fillettes ont été tuées dans une attaque au couteau lundi dernier à Southport, dans le nord-ouest de l’Angleterre. Après ce drame, des rumeurs et de fausses informations, à propos de la religion et de l’origine du suspect présumé, se sont multipliées sur les réseaux sociaux.
“Je vous garantis que vous regretterez d’avoir participé à ces désordres”, que ce soit directement ou “en ayant provoqué ces actions en ligne”, a assuré le chef du gouvernement travailliste, au pouvoir depuis un mois, dans une déclaration filmée depuis Downing Street. Keir Starmer a promis que son gouvernement ferait “tout ce qu’il faut pour traduire ces voyous en justice aussi vite que possible”. Sa prise de parole a fait suite à de nouvelles manifestations dimanche. Leur mot d’ordre : “Enough is enough” (“Trop, c’est trop”), en référence à l’arrivée au Royaume-Uni de migrants traversant la Manche à bord de canots pneumatiques.
Affrontements avec les policiers
À Rotherham, des centaines de personnes se sont rassemblées devant un hôtel hébergeant des demandeurs d’asile. Là, des affrontements ont éclaté avec les forces de l’ordre. Certains participants ont brisé des vitres de l’établissement, y ont mis le feu, pendant que d’autres jetaient des projectiles sur les forces de l’ordre. D’autres, encore, ont crié des slogans comme “Mettez-les dehors”.
Des émeutiers sont parvenus à entrer dans l’hôtel, sans qu’il soit clair que des demandeurs d’asile étaient à l’intérieur ce jour-là. La ministre de l’Intérieur Yvette Cooper a qualifié sur X ces violences de “tout à fait effroyables”. “Il s’agit d’un incendie délibéré d’un bâtiment dans lequel se trouvaient des personnes”, a-t-elle affirmé. Au moins dix policiers ont été blessés, mais aucun membre du personnel ni client de l’hôtel, a indiqué la police locale.
Vitres brisées, incendie…
Dans le centre de l’Angleterre, à Tamworth, la police locale a été contrainte d’intervenir dimanche soir, près d’un hôtel. Il était pris pour cible par un “important groupe d’individus”. Ils ont “jeté des projectiles, brisé des vitres, allumé des feux et ciblé la police” et un policier a été blessé, a-t-elle listé.
Middlesbrough, dans le nord-est, n’a pas été épargnée. Des débordements se sont produits dans le centre-ville. À Aldershot (sud-ouest), des dizaines de personnes arborant des pancartes avec des inscriptions hostiles aux demandeurs d’asile se sont rassemblées dans le calme. C’est le quatrième jour de violences que connaît le Royaume-Uni. Des émeutes et affrontements entre police, manifestants, et parfois contre-manifestants antiracistes, ont eu lieu dans une dizaine de villes, dont Liverpool (nord-ouest), Hull (nord-est), Belfast (Irlande du Nord), Leeds (nord), ou encore à Southport mardi contre une mosquée. Les forces de l’ordre ont indiqué avoir procédé à près de 150 arrestations depuis samedi.
L’appel au calme de religieux
Le suspect des trois meurtres, un adolescent de 17 ans, a été inculpé et placé en détention. Dimanche, des responsables religieux de toutes confessions de Liverpool ont publié un communiqué appelant à l’unité et au “calme”. Le pays n’avait pas connu une telle flambée depuis 2011, après la mort d’un jeune homme métis, Mark Duggan, tué par la police au nord de Londres.
Depuis une semaine, Keir Starmer multiplie les messages de fermeté et son soutien aux forces de l’ordre contre ce qu’il a de nouveau décrit dimanche comme “des violences d’extrême droite”. “Si vous ciblez des gens à cause de la couleur de leur peau ou de leur religion, c’est de l’extrême droite”, a-t-il insisté.
“Un signal d’alarme”
Dans ce climat des plus tendus, le gouvernement a annoncé qu’il renforçait la protection policière des mosquées. L’ambassade d’Indonésie à Londres a appelé sur X ses ressortissants à la “vigilance”. Certains commentateurs et responsables politiques ont estimé que la montée d’un discours anti-immigration dans la classe politique avait légitimé les manifestants.
Lors des dernières législatives, le parti anti-immigration Reform UK a engrangé plus de 14 % des voix. Karina, une mère de famille de 41 ans, a participé au rassemblement samedi à Nottingham. “J’en ai marre que des gens […] nous disent que les Blancs de la classe ouvrière sont fascistes parce que nous ne voulons plus voir de personnes venir illégalement”, a-t-elle affirmé. Pour la coprésidente du parti Vert, Carla Denyer, ces violences doivent servir de “signal d’alarme pour tous les responsables politiques » ayant utilisé une rhétorique anti-immigration.