Cette petite remarque dans une superproduction estivale ne vous a peut-être pas échappé. Projetée hors de son monde idéal, Barbie est confrontée à des émotions nouvelles:
– «C’est bizarre, je ressens comme une sorte de peur générale, mais je ne sais pas de quoi.»
– «Ah, mais c’est de l’anxiété! Moi aussi, ça me fait ça, toute la journée!» lui lance une passante.

Si le propos féministe du film pointe en priorité les affects des femmes, exposées, en raison de leur socialisation, à des dissonances cognitives permanentes, des commentateurs ont noté combien la santé mentale est traitée frontalement tout au long de l’œuvre. Un propos qui résonne avec notre époque, marquée par une combinaison inédite d’incertitudes: risques climatiques et environnementaux historiques, bouleversements géopolitiques, fragilisations démocratique et économique. Jamais ou presque la prévisibilité pour les entreprises n’a été aussi faible. La paupérisation des classes moyennes occidentales se poursuit inexorablement. La pandémie a mis à nu les fragilités de nos sociétés. Les ressorts de sens et de croyances collectives qui opéraient depuis la Seconde Guerre mondiale s’érodent: confiance dans le progrès, la science, la croissance économique. Pour une part de plus en plus grande de nos contemporains, le futur n’a rien de radieux, mais suscite une angoisse diffuse… ou inquiète profondément.

Dans ce contexte, difficile de se laisser porter par une libération intérieure. Même si elle est potentiellement accessible à tous, parce qu’elle a à voir avec l’enfance, assure Frédéric Lenoir dans La Puissance de la joie (voir encadré):

« La joie parfaite, celle promise au terme de ces deux chemins d’accomplissement de soi et de communion avec le monde, n’est autre qu’une expression profonde, active et consciente de ce qui est offert à tous dès les premiers instants de notre existence et que nous avons bien souvent perdu au fil des difficultés rencontrées: la joie de vivre. »

Nos confrères de La Vie ont d’ailleurs consacré un dossier complet à la manière de retrouver ce précieux «esprit d’enfance» (édition 4067, du 10 août 2023).

Mal du siècle

Si notre passé peut nous procurer une ressource, le futur proche ne cesse de l’obérer. Un dixième de la population mondiale […]