À partir d’une question d’actualité, la « boussole de la FEP » propose des pistes de réflexion pour nourrir le sens de nos actions et tenter d’éclairer le sens des événements que nous traversons.

La parole

« L’homme dont les démons étaient sortis sollicitait Jésus ; il demandait à être avec lui. Mais Jésus le renvoya en disant : « Retourne dans ta maison et raconte tout ce que Dieu a fait pour toi. » Et l’homme s’en alla, proclamant par toute la ville tout ce que Jésus avait fait pour lui. »

La Bible, évangile de Luc, chapitre 8, versets 38 et 39

Chemin de réflexion

Soutenir et libérer

Une des conséquences, souvent involontaire, des actes de charité c’est le risque de mettre les personnes que l’on aide en dépendance. On les oblige à ne regarder que dans une direction, celle de la main qui soutient, retardant de fait leur mise en liberté. Toute action d’aide devrait donc être envisagée à l’aune de sa disparition. Les miracles du Christ dans l’Évangile ont souvent comme objectif le retour de la personne guérie dans sa communauté. La personne malade ou handicapée est à l’époque considérée comme impure et de fait rejetée par le groupe social.
La guérison peut aussi provoquer l’interruption du gagne-pain du bénéficiaire, par exemple quand son handicap lui donnait un statut de mendiant. Pour lui, c’est une coûteuse délivrance mais c’est une délivrance. Ainsi dans le texte de la guérison du possédé, le Christ refuse, une fois guéri, que celui-ci le suive et souhaite qu’il devienne un porte-parole de l’action salvatrice de Dieu en lui. De fou il devient prédicateur !

Brice Deymié, pasteur de l’Action Chrétienne en Orient à Beyrouth

 

Responsables de nos liens

Jésus vient de sauver un homme. Cet homme était lié, enchaîné à de nombreux démons, dans un chaos. Il s’était approché de Jésus dans un cri rauque, sauvage. Après avoir retrouvé un esprit et un corps sains, il souhaite rester avec son libérateur, Jésus. Mais Jésus voit l’avenir autrement. Il souhaite transformer l’ancien cri sauvage de cet homme en un cri nouveau du témoignage. Au lieu de le garder avec lui et d’une certaine façon de créer un nouveau lien de dépendance, Jésus ouvre à cet homme un horizon de parole et de relations humaines. Il l’envoie pour témoigner de la vie qu’il porte dorénavant pleinement en lui.
Quels liens maintenons-nous avec les personnes accueillies dans nos lieux d’action sociale ou médico-sociale ? Ce récit nous questionne. La personne accueillie a besoin de se sentir libre à vis à vis de l’aidant, afin de disposer d’un espace pour être elle-même. C’est alors qu’elle pourra se dire en vérité et donner, soutenir à son tour, avec la richesse qu’elle porte en elle.

Bertrand Marchand, pasteur. Église Protestante Unie de France

 

Tous au bénéfice de l’amour de Dieu

20 ans après la loi de 2002, c’est presque un poncif de l’action sociale : le bénéficiaire doit être « acteur de son projet ». On le sait aujourd’hui, consentir à être accompagné, accorder sa confiance, décider de « vivre quand même » n’ont rien de passif. Mais derrière cette attention sincère à la parole des personnes accueillies, à leur capacité à décider, peut subsister une restriction mentale : nous autres bénévoles ou salariés, nous agissons pour autrui, alors que le bénéficiaire-acteur agit… pour lui-même ! Ce serait oublier l’acteur principal : ni le malade, ni les disciples, mais le Christ seul qui libère et qui guérit. « Retourne dans ta maison et raconte » : cette injonction nous appelle, tous, à la conversion (retournement) et au témoignage-action, mais depuis la place et selon la vocation qui sont les nôtres.
N’attendons pas des personnes accompagnées que toutes s’investissent dans la distribution alimentaire ou le soin aux malades. La maison, c’est aussi le jardin intérieur, nettoyé de ses démons, dont la mise en culture sous le soleil de Dieu produira du fruit. Quelle sorte de fruit, en quelle saison, pour nourrir qui ? C’est le secret du Semeur, pas le nôtre. Tous acteurs pour le Royaume, nous le sommes bien sûr, également et diversement. Parce que tous nous sommes d’abord bénéficiaires… de la Grâce.

Luce Gaume, Vice-Présidente du Diaconat Protestant de Nantes

 

Des mots pour prier

Seigneur,
Donne-nous de prendre soin des hommes et des femmes que tu mets sur notre route pour les aider et les accompagner.
Apprends-nous à partager leur souci en respectant leur personnalité et leur désir de liberté.
Nous voulons ouvrir avec eux un espace de partage, d’entraide et de fraternité qui témoigne de ton amour pour que chacune et chacun reçoive de toi force et joie pour accomplir sa mission.
Fais de nous tous des acteurs de paix et d’espérance pour que nous puissions œuvrer ensemble pour un monde plus juste.
Conduis-nous par ton Esprit et aide-nous à transmettre ta promesse avec fidélité.