À partir d’une question d’actualité, la « boussole de la FEP » propose des pistes de réflexion pour nourrir le sens de nos actions et tenter d’éclairer le sens des événements que nous traversons.
La parole
Judas a pris la tête d’une troupe de soldats et de gardes et il vient livrer Jésus. Alors Simon-Pierre, qui portait un glaive, dégaina et frappa le serviteur du grand prêtre auquel il trancha l’oreille droite ; le nom de ce serviteur était Malchus.
La Bible, Évangile de Jean, chapitre 18, verset 10
Chemin de réflexion
Désarmer la violence
Jésus, dans son ministère, n’a fait que peu d’incursions en territoire étranger. Pourtant, il annonce ici qu’il faut sortir de l’enclos, aller voir ailleurs. D’autres ont besoin de l’Évangile. Bien souvent, nous sommes affairés à la priorité du moment, aux urgences qui s’imposent à nous, et nous n’avons pas le temps de penser au-delà. Faut-il, quand nous prenons soin de quelqu’un, se demander si d’autres ont besoin de nous au risque de négliger la personne présente ? Le philosophe Martin Buber (1878-1965) disait à propos de cet amour universel du prochain, ou de l’humanité, qu’il s’agissait « d’une bienfaisance falote envers des numéros sans visage ».
Lorsque nous sommes engagés dans un face à face, nous ne pensons pas forcément à l’ensemble de la société qui aurait aussi besoin de notre soin. Emmanuel Levinas (1905 – 1995), philosophe aussi, pense donc la nécessité du politique à partir de cette impuissance relative à ne pas pouvoir être partout. Mais, dit-il, l’action politique est possible parce qu’il y a toutes ces rencontres individuelles et exclusives. Le politique, dans l’idéal, pense à notre place à ceux que nous ne rencontrons pas.
Christian Tanon, pasteur, Église protestante unie de France
La force de l’amour
La montée des violences verbales, qui ne font pas l’objet de statistiques comme les crimes et délits, a de quoi nous inquiéter. Qu’elles soient liées à la pandémie ou plus généralement au rejet de l’autre, elles nous interpellent : si j’étais moi-même victime de menaces ou de violences, comment réagirais-je ? Jésus, Gandhi, Mandela… ont prôné la non-violence absolue. Ne pas résister. Tendre l’autre joue… désolé, mais j’en suis incapable !
En outre, ne pas résister à l’agresseur, c’est lui laisser le champ libre pour agresser d’autres après moi. Peut-être devrais-je apprendre à résister sans haïr et, à l’image du Christ, à détester le péché mais à aimer le pécheur ? Peut-être devrais-je prier Dieu de pardonner à mon agresseur ? Pareille attitude, humainement très difficile, ne serait-elle pas un but à atteindre ? Ainsi, comme l’a fait Jésus-Christ il y a deux mille ans en invitant Pierre à ranger son épée, au moment de son arrestation, nous pourrions contribuer à désarmer la spirale de la violence dans le monde.
Bertrand Marchand, pasteur, Église protestante unie de France
De l’importance de communiquer
La vie en collectivité peut favoriser des comportements agressifs, plus souvent verbaux que physiques heureusement, mais qui sont susceptibles de blesser profondément. Les résidents des Collines affirment que les agressions verbales créent une tension. Et vivre en permanence dans un climat tendu est difficile. Les explications sont inévitables et aboutissent, en général, à une réconciliation. « On essaie de comprendre la réaction de l’autre et ce qui la motive », explique un résident, « et on s’aperçoit qu’il y a souvent de mauvaises interprétations… » Un autre confie : « Là où je me fais le plus violence, c’est quand je renonce à ma violence ».
Chacun est responsable du maintien d’un climat paisible, et conscient de l’importance de la communication, car quand il n’y a plus de mots à partager, que reste-il ? Des insultes, des coups ? Les résidents reconnaissent que la dimension spirituelle rassure, protège, réconcilie… Nous vérifions au quotidien combien cette parole des Proverbes (15.1) est vraie : « Une réponse douce calme la fureur, mais une parole dure excite la colère. »
Christian Puiroux, directeur de la Maison Les Collines, association AC3, qui accueille des hommes de 18 à 40 ans ayant des difficultés sociales avec conduites addictives.
Des mots pour prier
Seigneur mon Dieu,
ton commandement d’amour du prochain est magnifique, mais souvent hors de ma portée.
Jésus-Christ, par son exemple, a mis la barre trop haut ! Donne-moi la force de ne pas réagir à la violence par la violence ou la haine. Apprends-moi la douceur et l’humilité, selon que tu as dit à tes disciples : « Apprenez de moi que je suis doux et humble de cœur. »
Et surtout, car j’en ai besoin, fais-moi toujours mieux connaître la force de ton amour pour moi.